Avec microphones, haut-parleurs et véhicules, les djihadistes parcourent la zone du Delta central du Niger pour prêcher nuitamment dans les villages. Résultat : des foules incrédules sont tombés dans le piège du djihad, devenant des relais du terroriste Amadou Koufa dont l’emprise s’accentue sur plusieurs communautés dans les localités de Youwarou, Ténénkou et Macina, dans le centre du pays.
«Ce que les gens-là font pour avoir des adeptes est simple : ils vont dans les villages pour installer leurs haut-parleurs et prêchent pendant toute la nuit », déclare un marabout originaire de la localité de Youwarou. Et le même personnage d’ajouter que dès l’aube, ces apôtres de la violence plient leurs matériels pour partir on ne sait où, mais en désignant un représentant parmi la population.
Le marabout en question n’est pas tombé lui-même dans le piège, son souci étant de se faire de l’argent entre son village et Bamako en tant que marabout, sorte d’oracle que les citadins aiment bien consulter au Mali. «Ils(les djihadistes, Ndlr) ne donnent pas d’argent, mais tous les villages les suivent maintenant. Ils promettent de libérer les gens en disant que personne ne paiera d’impôts et que la population gardera tout ce qu’elle possède », a poursuivi le marabout qui estime les agitateurs veulent un Etat islamique.
Entre les campements nomades et les villages sédentaires, les terroristes, en l’occurrence ceux de la branche sud d’Ançardine menés par Koufa, se livrent tranquillement à une campagne de propagande favorisée par l’absence des forces de sécurité du Mali. Les autorités ont récemment annoncé avoir renforcé la présence des forces sécuritaires dans la zone. Peu avant, les Peulh et les Bambara se sont violemment affrontés sur fonds de soupçons mutuels et d’injustice.
Mais le problème demeure l’absence des services administratifs dans les cercles de Youwarou, Ténékou et Macina. A en croire les populations, les unités de la gendarmerie et de la garde nationale sans moyens de défense se sont repliées dans des grandes villes. A cela s’ajoute les vieilles rancunes causées par la brutalité des forces de sécurité que les djihadistes présentent aux populations comme des envahisseurs.
Cette méfiance entre population et forces de sécurité doit être prise au sérieux dans le cadre de la consolidation du processus de paix. D’ailleurs, une vidéo réalisée par l’Institut de recherche Action pour la paix (IMRAP) tire la sonnette d’alerte sur ce clivage entre les citoyens et ceux qui sont censés les protéger partout.
Soumaila T. Diarra
Source: Le Républicain-Mali 20/05/2016