Au niveau de notre parti, nous avons fait le choix que le bon ficher électoral est celui-là qui sortirait du RAVEC. Mieux, le groupement auquel le RDS appartient, à savoir le Mouvement volontariste pour le développement (MVD), a également opté pour un ficher issu du RAVEC. Alors même qu’on préparait les élections municipales de 2009, le ministre de l’Administration territoriale et des collectivités locales nous a informé qu’il allait commencer le RAVEC. Il a fait l’éloge du RAVEC, en mettant en avant tous les avantages qu’on allait tirer d’une telle opération, notamment l’élaboration d’un fichier électoral biométrique.
On a cru au gouvernement et nous nous sommes investis dans la campagne de mobilisation de la population. Nous l’avons fait parce que le ficher biométrique est une rupture totale avec le Race qui a consacré la fraude dans notre pays et qui a consacré aussi l’impunité électorale dans notre pays. Ce ficher contient près de 2 millions de noms fictifs dont les spécialistes de la fraude détiennent les cartes électorales. Quelques cartes ne sont pas enlevées, mais l’essentiel se trouve entre les mains des fraudeurs et c’est avec ces cartes qu’ils continuent de gagner les élections. En un mot, c’est avec l’assurance de toutes les autorités maliennes consacrant le RAVEC comme la voie qui allait sauver la démocratie malienne que nous avons adhéré à cette opération. Mais, depuis 2008, personne ne nous a informé des difficultés de l’opération. Il a fallu attendre le 26 avril 2011, pour que le ministre de l’Administration territoriale et des collectivités locales nous convoque et nous dise que le RAVEC a trop de problèmes et qu’il va falloir recourir au Race amélioré pour les élections de 2012.
Vous pouvez donc imaginer la déception de notre parti et je pense que c’est le cas pour toute la classe politique. Le Race a été décrié et rejeté par toutes les autorités depuis les élections de 2007 et de 2009. Il a été rejeté par ceux-là mêmes qui y voient aujourd’hui des qualités pour vouloir l’utiliser pour les élections de 2012. Au RDS et au MVD, nous conseillons la prudence. Et nous sommes convaincus qu’il est imprudent, voire dangereux d’aller aux élections avec le RACE. Aujourd’hui, si le Président ATT peut trouver un miracle pour nous donner des élections propres et fiables en 2012, nous lui ferons toutes nos bénédictions pour le succès.
Quelle appréciation faites-vous des réformes constitutionnelles annoncées ?
C’est une question sur laquelle, il est difficile de prendre position parce qu’on ne sait pas ce qui est dans ces reformes. Mais, sans même qu’on en connaisse le contenu, on peut simplement s’interroger sur la réalisation du référendum dans les limites de temps que nous avons pour l’organisation des élections. Nous ne sommes pas une monarchie, mais une démocratie. Donc, quand un texte doit passer au référendum, il doit être suffisamment discuté et expliqué au peuple. On doit pouvoir savoir pourquoi une nouvelle constitution et ce qu’elle a de différent de la précédente. Il ne faut pas provoquer le diable. Nous attendons de voir le contenu pour porter notre jugement, mais en nous demandant si le temps qui nous reste est suffisant pour organiser un référendum et des élections propres et crédibles. Telle est la question.
Quelle est votre lecture du contexte politique et social actuel du pays ?
Je suis d’un naturel optimisme. Je fais confiance au peuple malien. Mais en même temps, je pense que le contexte actuel n’est pas sain, parce qu’il y a trop de conjonctures concentrées dans un laps de temps. Je suis optimiste, mais je suis prudent. Les fins d’exercice de pouvoir sont toujours difficiles. C’est pour cela qu’il ne faut pas compliquer davantage la situation. Du point de vue sécuritaire, ce sont des armées étrangères qui ont pénétré dans notre pays pour faire la guerre et tuer des gens chez nous. Je ne crois pas que ce soit une bonne chose que des armées étrangères pénètrent sur notre territoire pour combattre.
C’est la 2ème ou la 3ème fois que cette armée vient combattre au Mali et souvent ce sont des Maliens qui ont été tués. Il existe un état major commun entre le Mali, le Niger, la Mauritanie et l’Algérie. En principe, toutes les opérations doivent être planifiées et autorisées par cet état major qui est à Tamanrasset. En dehors de ce cadre, nous pensons qu’il y a eu une grande violation de notre territoire et cela doit cesser. Je ne pense que la situation sociale aujourd’hui soit pire qu’il y a 2 ou 3 mois. Elle se caractérise par une cherté de la vie et par une situation où le débat n’existe pas. Même la presse a perdu son élan d’il y a 10 ans. Il est important que tous ceux qui soutiennent l’action d’ATT redoublent d’efforts pour que des erreurs ne soient pas commises en fin de mandat. Je le dis en toute sincérité parce que je suis de ceux qui veulent qu’il sorte par la grande porte.
Assane Koné
Le Républicain 30/06/2011