Le président de la République et le Premier ministre doivent déjeuner ensemble ce midi à l’Elysée pour mettre la dernière main à la composition de cette nouvelle équipe un nouveau gouvernement qui devrait être connu dans l’après-midi.
Les partants
On sait déjà qu’Arnaud Montebourg, Benoît Hamon et Aurélie Filipetti ne seront pas dans la nouvelle équipe. Evincé par le Premier ministre, Arnaud Montebourg annonçait hier qu’il reprennait sa liberté. « Je vais chercher un travail comme beaucoup de Français » déclarait-il, tout en assurant qu’il restait « un militant engagé du made in France et du patriotisme industriel, très attaché aux idées socialistes ». Benoît Hamon, ex-ministre de l’Education, a lui expliqué sur la chaîne France 2 qu’il aurait été « incohérent » de participer à cette nouvelle équipe alors qu’il a émis de sérieux doutes sur les choix faits en matières de politique économique. Mais il n’entend pas pour autant devenir un opposant au futur gouvernement et « anéantir tout ce pour quoi je me suis battu auparavant ». Enfin, la ministre de la Culture, Aurélie Filipetti, donnée partante, a pris les devants et refusé d’intégrer la nouvelle équipe.
Laurent Bouvet: « La gauche est depuis très longtemps, y compris au sein du parti socialiste, divisée en deux grands axes»dProfesseur en science politique à l’université Versailles Saint-Quentin en Yvelines et directeur de l’Observatoire de la vie politique à la Fondation Jean Jaurès. Il est l’auteur du livre Le sens du peuple : la gauche, la démocratie, le populisme aux éditions Gallimard (2012). 26/08/2014 – par Florence Thomazeau écouter
La question de la majorité du prochain gouvernement est pour le moins épineuse car en se privant d’Arnaud Montebourg, le couple exécutif a pris le risque de se mettre définitivement à dos les députés socialistes frondeurs. 41 d’entre eux s’étaient déjà abstenus en avril dernier lors du vote du programme d’économies.
Composer une majorité
Mais le Parti socialiste ne dispose que de 290 députés à l’Assemblée, soit seulement un de plus que la majorité absolue. Le danger est donc que le prochain gouvernement se retrouve sans majorité. C’est sans doute pourquoi Manuel Valls a tenté sans succès de convaincre Benoît Hamon, une autre figure de la gauche du PS, de rester dans son équipe.
Pour une majorité, François Hollande devrait brandir la menace en rappelant à l’aile gauche du PS qu’une dissolution ferait imploser son camp. Le président et le Premier ministre vont également tout faire pour conserver les radicaux de gauche avec eux. Ces derniers menaçaient pourtant de quitter le gouvernement si la réforme territoriale était menée à son terme.
Autre piste étudiée par l’exécutif : le débauchage d’élus écologistes. Certains parlementaires regrettent que leur parti ait quitté le gouvernement en avril dernier. Ces élus pourraient donc être sollicités. Les noms de Jean-Vincent Placé ou Barbara Pompili circulent. Des initiatives personnelles, minimise-ton chez les Verts. Le parti a en effet écarté l’idée d’un retour au gouvernement.
Enfin, parmi les noms qui circulent, retenons d’autres noms comme celui de Gérard Collomb, le maire socialiste de Lyon, celui encore de l’ancien communiste Robert Hue, ou de l’ancienne ministre centriste Corinne Lepage.
Analyse
Qui aime ma politique, me suive… François Hollande est allé au bout de la logique qu’il esquivait la semaine dernière dans son interview de rentrée au Monde : « Il n’y a pas d’échappatoire », disait-il à la manière de Margaret Thatcher, pas d’échappatoire à la politique qu’il a mise en place à l’automne 2012, en faveur des entreprises, et qui ne figurait pas dans son programme présidentiel.
En faisant taire les voix contestaires au sein du gouvernement, François Hollande ferme défintivement la porte à tout changement de politique économique. En sacrifiant deux espoirs de la gauche française, il amende aussi le portrait qu’il a longtemps donné à voir. Le président pose un acte d’autorité (qui frôle le caporalisme), et il tourne défintivement le dos à son sens légendaire de la synthèse.
François Hollande liquide aussi le grand malentendu né de son élection. Contrairement à ce qu’il avait tenté de faire croire quelques semaines après son arrivée à l’Elysée, le chef de l’Etat n’a jamais réussi à réorienter l’Europe, à assouplir les politiques de rigueur imposées par le traité de stabilité budgétaire. Celles-là même que dénonçaient Benoit Hamon et Arnaud Montebourg.
RFI