En effet, ce bilan de fin de mandat enjolivé par les grandes réalisations du président de la République a tout à fait occulté les difficultés accumulées. C’est vrai que les chantiers cités par le président ATT peuvent impressionner : Pont de l’Amitié Chine-Mali à Sotuba-Missabougou, les axes routiers Bamako-Kangaba, Kita-Ballé-Bafing-Dabia-Falémé-Kéniéba et Kédougou au Sénégal (Corridor Bamako-Dakar parle Sud), Bougouni-Sikasso, entièrement réalisés; travaux de bitumage des voies urbaines, à Kati, San, Koutiala et Bandiagara, le tronçon Bafoulabé-Mahina. Sur l’axe Bamako-Dakar par le Sud, le pont de Ballé inauguré, les ponts sur le Bafing et la Falémé achevés. Les chantiers ouverts de l’Autoroute Bamako-Ségou.
La route Goma Coura-Nampala-Léré-Niafunké-Tonka-Diré-Goundam-Tombouctou sur près de 500 km qui commence à sortir de terre. L’état d’avancement satisfaisant de la route Kayes-Diamou-Bafoulabé, les travaux d’élargissement en 2X3 voies du Boulevard du 22 octobre 1946, s’étendant du Monument de l’Indépendance à l’Ensup et l’élargissement en 2X2 voies de la Corniche de Bamako. Il a aussi cité les projets routiers dont le financement est acquis à la table ronde des bailleurs de fonds, le nouveau complexe numérique, d’un coût de 17 milliards en construction, l’expansion de la téléphonie mobile, la plateforme aéroportuaire, la deuxième chaine de télévision, les secteurs miniers et aurifères dont les cours sont en hausse.
Ce bilan, dont l’habitat social constitue un motif de fierté pour le président de la République, reste pourtant déséquilibré. En effet, la démocratie, comme l’a signalé un chef de parti politique, se résume-t-elle à ne faire que du béton ? Il a vraisemblablement occulté le revers de la médaille : des besoins encore pressants de financement pour les élections de 2012 dont la préparation est contestée par une bonne frange de la classe politique et de la société civile, qui réclame toujours un fichier biométrique fiable. La question relative à l’identification de l’électeur n’est toujours pas réglée.
Le Collectif Touche pas à ma constitution, pointant du doigt l’inopportunité des réformes a marché vendredi dernier. Dimanche dernier, des associations féminines ont fustigé le nouveau code des personnes et de la famille et Sadi conteste toujours la mise en place de la Ceni. La sonnette d’alarme est tirée à propos des risques de pénurie alimentaire. Même dans son discours de nouvel an, le président ATT a reconnu : ‘’ L’année 2011 qui s’achève a été marquée par un déficit pluviométrique important dans tout le Sahel qui compromet fortement nos prévisions de la campagne agricole 2011-2012. ‘’ Le problème de disponibilité en eau potable et électricité continue de se poser dans l’ensemble du territoire national.
Concernant l’Amo, c’est le remboursement des sommes prélevées qui risque d’être une grosse épine au pied du futur locataire de Koulouba si la situation n’est pas réglée avant sa prise de fonction. Il faut toutefois remarquer que les députés semblent naviguer à contre courant de leurs mandants, car, quoiqu’ils aient voté pour les réformes constitutionnelles, rien ne prouve que le « oui » l’emporterait.
Rien n’indique aussi que la suppression des votes par témoignage acceptée par la majorité de la classe politique, mais rejetée par les élus, soient à l’avantage des populations qui pourraient être floués de leurs suffrages, à cause de la fraude. Le président de la République a reconnu que la paix et la sécurité sont le socle du progrès social et économique.
En fait, c’est dire que son successeur aura à gérer la question relative à l’insertion des émigrés de Libye, la circulation des armes au Nord du pays et les otages. Situation délétère qui a pris des ampleurs inquiétantes dans la zone sahélo-saharienne faisant, du coup, craindre le risque que des élections ne s’y tiennent.
N’est-ce pas là le risque d’une déstabilisation institutionnelle dans la mesure où le temps est actuellement ce qui manque le plus. Même remarque, si par extraordinaire, l’élection présidentielle couplée avec le référendum pour lequel on voudrait voir voter « oui » venait à cafouiller.
Dans ce cas de figure aussi, le temps serait insuffisant pour corriger le tir afin de rester dans les délais constitutionnels. Les nouvelles réformes d’une école dont les cours tardent à démarrer- ce qui peut poser la question de la validation de l’année scolaire- celles de l’emploi des jeunes, les régions qui passent de 8 à 19 demeurent autant de chantiers périlleux mis en veilleuse. Le futur président de la République sera face au rapport du Fonds mondial dont le contenu est devenu redoutable pour tout un département. Notons qu’ATT a omis la lutte contre la corruption et a superbement lâché l’ancien Vérificateur général, avec ses manques à gagner.
Baba Dembélé
Le Républicain Mali 03/01/2012