Chut, rien de doit se savoir. La semaine dernière, une délégation libyenne s’est discrètement rendue en France. Elle se composait du ministre des Affaires étrangères du gouvernement officiel, Mohamed Al-Daïri, du ministre des Finances, Khamal al-Hassi, et du nouveau chef d’Etat-major, Abderrazak Nadhouri. Ces trois hommes, et en particulier M. Nadhouri, sont impliqués dans la lutte armée contre l’Etat islamique (Daech) qui a fait de la Libye une base arrière.
Arrogance française
Une fois à Paris, c’est bizarrement dans le plus grand secret qu’ils ont rencontré le Premier ministre français, Manuel Valls, et le ministre de la Défense, Jean-Yves Le Drian. Au programme également des trois Libyens : une rencontre avec les services de sécurité français où les questions liées à la sécurité dans la région et à l’immigration clandestine ont été abordées.
Si les Libyens sont formels sur le fait qu’ils ont bien rencontré ces deux personnalités françaises, les cabinets de messieurs Valls et Le Drian se refusent à tout commentaire. Pire, ne répondent à aucune question posée sur le sujet. Un bel exemple de l’arrogance à la française qui irrite au plus haut point les Libyens qui auraient aimé rencontrer des membres du Quai d’Orsay et de la cellule diplomatique de l’Elysée. Petite consolation, le ministre des Affaires étrangères a pu rencontrer Laurent Fabius le 14 octobre mais lors d’un mini-sommet improvisé et consacré à la Libye en présence du patron du Département d’Etat américain, John Kerry. La lettre Maghreb Confidentiel avait alors révélé que le Premier ministre libyen, Abdallah Al-Thani, avait refusé de se rendre en France, faute d’être reçu par François Hollande.
Dans ce contexte où les Libyens ont la claire impression que certains à l’Elysée et en particulier au Quai d’Orsay ne soutiennent pas franchement la lutte contre l’Etat islamique, il ne faut pas s’étonner que ce soit le Premier ministre libyen en personne qui ait décidé de ne pas donner suite à une proposition française très intéressée : équiper et mettre à niveau l’armée libyenne contre des… concessions pétrolières. Armes contre pétrole en quelque sorte. Il ne faudra pas non plus s’étonner si les Libyens préfèreront s’approvisionner dans les pays de l’Est pour leurs achats les plus importants.
Publié par Catherine Graciet
http://mondafrique.com 2014-10-20 23:15:49