Turquie: la Cour suprême retoque la réforme judiciaire d’Erdogan

L’opposition, qui avait déposé le recours, jubile, et le ministre de la Justice, sans se prononcer sur le fond, s’est étonné de la rapidité avec laquelle la Cour constitutionnelle a rendu son jugement, ainsi que du « timing » de cette décision. Car, au moment même où le gouvernement annonçait un plan d’action dont la principale mesure est la lutte contre la confrérie Gülen, cet arrêt risque de compliquer passablement la reprise en main annoncée par Recep Tayyip Erdogan, au lendemain de sa victoire aux municipales.

Ce sont en effet quasiment toutes les dispositions de la réforme du Haut Conseil de la magistrature qui ont été bloquées, notamment celles donnant au ministre de la Justice des pouvoirs élargis sur les nominations et les poursuites contre des juges et des procureurs. Ce qui pourrait avoir comme première conséquence de relancer les enquêtes contre les ministres, leurs proches, des hauts fonctionnaires et des hommes d’affaires, voire son propre fils, soupçonnés de corruption.

En ordonnant déjà la levée du blocage de Twitter, en début de semaine, les Sages avaient fortement déplu au Premier ministre, qui ne s’était d’ailleurs pas privé de les critiquer. Désormais, il sait qu’il devra compter avec leur opposition. Le ministre de la Justice Bekir Bozdag a déclaré pour sa part que le gouvernement se soumettra à l’arrêt de la Cour constitutionnelle. Mais au même moment, un député du Parti de la justice et du développement (AKP, parti au pouvoir), Zelkif Kazdal, demandait que le pouvoir de la Cour constitutionnelle, qui consiste à censurer des lois, lui soit « enlevé ».