TRANSITION POLITIQUE AU MALI Vers un bras de fer CNSP/CEDEAO ?

Comme il fallait s’y attendre, la CEDEAO aura pris le contre-pied des résolutions prises par le CNSP dans le cadre des concertations nationales. L’organisation sous-régionale exige la nomination rapide d’un président et d’un Premier ministre par intérim civil. Mais au-delà, la volonté de la CEDEAO est surtout autre. Elle voudrait tout simplement évincé le CNSP du jeu politique malien à court terme.

Assez rapidement, l’on pourrait penser que le Comité n’aura d’autre choix que de se plier aux exigences de la CEDEAO afin d’épargner à la population les affres d’un embargo qui exacerbera la conjoncture ambiante. Pour rappel, la CEDEAO rejette aussi le fait que le vice-président puisse prendre la place du président de la Transition en cas d’empêchement de celui-ci. Elle verrait dans ce détail et dans d’autres, des tentatives de mainmise de la junte sur le pouvoir. Et dans l’intransigeance du président Ghanéen et de ses homologues, le but c’est d’évincer toute immixtion du militaire dans le jeu politique en place. Il est aussi de faire du cas malien un exemple de dissuasion envers toutes velléités de prise de pouvoir par la place au niveau sous-régionale.

De son côté, le CNSP avait, semble-t-il, une autre idée. Assimi Goité et ses compagnons n’auraient pas mis fin au régime d’IBK pour ensuite se débarrasser du pouvoir aussitôt. Ils entendraient bien faire le plus possible pour préparer le terrain au prochain président de la République. D’où certainement le fait que selon la charte adoptée, le Comité resterait toujours au centre du jeu politique pendant la période de la transition. Et avant, il sera celui qui aura mis en place toute l’architecture à cet effet.

Le point de discorde réel entre CEDEAO et CNSP est limpide. Les chefs d’Etat membres de l’organisation entendent tout simplement que les militaires putschistes s’écartent le plus tôt possible de la scène, et ce, en dissolvant purement leur Comité, après avoir nommé les personnalités civiles pour diriger la transition. Le point de vue du CNSP est tout autre. Ses dirigeants voudraient veiller au bon déroulement de la transition, et voudrait se poser comme la main punitive qui s’abattrait sur toute tentative de pollution du processus à des fins obscures. Pour eux, leur dissolution ne sera envisageable qu’après le parachèvement du processus.

Le CNSP persistera-t-il dans ses premières résolutions ou tentera de concilier sa vision à celle de la CEDEAO ? Les prochaines heures nous édifieront, et beaucoup espèrent sur la prochaine visite de Good Luck Jonathan pour avoir un début de solution.

Toutefois, il est assez probable que le Mali traverse encore des moments troubles, surtout si chaque camp campe sur ses positions.

Ahmed M. Thiam