Relever le défi sécuritaire… ou sauter !
A qui le tour ?! Serait-on tenté de dire après que le pays des hommes intègres soit tombé, lui aussi, dans l’escarcelle des militaires putschistes. Car, près de cinq mois auparavant, le président guinéen Alpha Condé, fut destitué par le colonel Mamadi Doumbouya et ses hommes. Et en aout 2021, le président malien Feu IBK, présenta sa démission une fois que le Colonel Assimi Goita et ses acolytes prirent le pouvoir après de longues semaines de manifestations populaires hostiles au pouvoir. Il semblerait bien que dans pas mal de pays de la zone, et au-delà du Sahel, aient érigé les putschs en véritables institutions ; une sorte d’impeachment qui ferait sauter le président en place en cas de trop plein de frasques et de victimes sur le plan sécuritaire.
La démocratie avec des institutions fortes et une population fortement attachée aux valeurs de la République n’est visiblement pas pour aujourd’hui au Sahel. C’est plutôt l’ère des hommes forts en treillis qui soient revenus à l’ordre du jour. Qui l’aurait cru encore en 2022 ?
Au Burkina Faso tout comme au Mali, c’est surtout la crise sécuritaire qui aura eu raison des présidents en place. Les frasques et scandales de gouvernance déplorés surtout au Mali ont aussi largement contribué à discréditer le pouvoir en place. Les populations en avaient assez de ces attaques quasi hebdomadaires sur les forces armées en place et sur les civils. Des cibles qui mourraient beaucoup trop facilement au point de tomber à un moment donné dans la banalisation lors d’annonce d’une attaque et le nombre de victimes. Les colères et les frustrations accumulées des années durant ont alimenté la locomotive d’un coup d’Etat toujours fortement présente dans l’imaginaire collective. Résultat, la chute de Feu IBK et de Roch Marc Christian Kaboré ne fut pas une surprise tant la réalité du terrain aura été implacable.
En Guinée également, la surprise ne fut pas de mise. Malheureusement, le pays a de tout temps été le théâtre de pratiques foncièrement anti démocratiques et de mal gouvernance. L’espoir suscité avec l’élection d’Alpha Condé en 2010 puis une seconde fois cinq ans plus tard, s’est brutalement brisé lorsqu’il viola la sacralité de la Constitution. Et ce, dans le principal but de se représenter pour un troisième mandat. Dès lors son aura de « Mandela guinéen » a pris un sacré coup, lui qui déjà auparavant ne faisait pas l’unanimité au sein de sa propre population. Sa chute en septembre dernier fut saluée par une grande majorité de guinéens. Même son propre parti politique n’a exprimé le moindre regret. La conclusion à la fin des courses a toujours été la même, le putsch est une conséquence de la mauvaise gouvernance en place et de la faiblesse des institutions politiques.
Burkina Faso, pays des hommes meurtris
Le Mali est sans doute le pays qui comprend le mieux la délicate position du Burkina Faso. Les années passent sans que la situation sur le terrain ne s’améliore. En même temps, l’on annonce que d’importantes sommes sont injectées dans l’appareil sécuritaire, mais en vain. Depuis 2015, le Faso déplore plus de 2000 morts civils comme militaires et plus de 1,5 millions de personnes ont fui leurs régions. Depuis de longs mois, une bonne partie de l’armée ne cessait de contester la stratégie en place en exhortant le gouvernement a vite rectifié le tir. Vraisemblablement, le grain de sable de trop qui enraya la machine de Roch Kaboré fut l’attaque du 14 novembre 2021 contre le poste de gendarmerie d’Inata. Le bilan comme d’habitude est lourd, 57 morts dont 54 gendarmes dans cette zone frontalière proche du Mali. Deux semaines auparavant, l’état-major avaient déjà alerté le gouvernement arguant que la nourriture marquante. Tellement désolant !
Ceci étant, si le coup d’Etat est une conséquence de la faillite du régime en place, est-il pour autant une solution à la mauvaise gouvernance ? Le lieutenant-colonel Paul Henri Sandaogo Damiba, le Colonel Mamady Doumbouya et le Colonel Assimi Goita ont-ils un bon plan pour leurs pays respectifs ? L’on le saura assez bientôt.
Ahmed M. Thiam
Source: l’alternance