SOMBRE PRESPECTIVE ET LIMITE DES ACTIONS DE LA CEDEAO DANS LA  CONSTRUCTION D’UNE COMMUNAUTÉ ÉCONOMIQUE SOUS-RÉGIONALE. 

Boubacar Touré, juriste, Montréal-Canada

L’intervention de la CEDEAO dans le règlement du récent conflit  géopolitique au Mali et l’imposition sur le Mali de sanctions économiques  et financières interpelle tous les panafricanistes africains à travers le  monde. Au moment où les pays de l’Union Européenne se sont mobilisés  dans un élan de solidarité pour appuyer l’aventure de la France contre le  Mali, c’est au même moment que des chefs d’États de la CEDEAO se  mobilisent par solidarité non pas pour défendre le Mali, mais pour  contribuer à asphyxier un pays frère membre fondateur de la fameuse  CEDEAO.

Il est important de rappeler que ce qui se joue actuellement  au Mali dans lequel les chefs d’États africains de la CEDEAO sont piégés,  n’est rien d’autre que la configuration d’une nouvelle guerre-froide à  travers des repositionnements géopolitiques et géostratégiques. Ce dessein machiavélique a eu un écho favorable et retentissant auprès de  certains pseudo-politiciens maliens qui ont également choisi d’être  solidaires dans la voie macabre de la trahison contre leur propre pays qui  leur a tout donné. Ces pitoyables politiciens rêvent de voir la transition  échouer dans le scénario du chaos. Nous tenons à remercier  publiquement un français (ami du peuple malien) qui nous a téléphoné  pour exprimer son soutien au combat du peuple malien en donnant une  nouvelle définition de la CEDEAO qu’il qualifie de « Communauté Des  Égarés de l’Afrique de l’Ouest ».

Malgré ce douloureux épisode d’un  front commun contre le Mali, une prophétie est permise. Le Mali est  devenu le détonateur de l’éveil d’une conscience panafricaniste où se joue  actuellement le destin et l’avenir d’une Afrique libre et indépendante.  Nous comprenons maintenant la gravité de l’instrumentalisation de la  CEDEAO qui ne décide pas dans l’intérêt des peuples africains, parce  qu’elle exécute les directives et la volonté de ceux qui financent ses  activités à partir de l’extérieur de l’Afrique. Le Mali doit exercer les  attributs de sa souveraineté pour se retirer de cette organisation qui est  utilisée à d’autres fins contraires aux intérêts du peuple africain.

Concernant l’imposition des sanctions financières, le gouvernement doit  en toute urgence décider de se prémunir des conseils du professeur  Nicolas Agbohou et d’appliquer la méthode utilisée par le président  Laurent Gbagbo pour atténuer l’effet des sanctions financières durant la  crise Ivoirienne. Nous ne croyons pas que l’incapacité de la CEDEAO  d’arriver à un compromis avec les nouvelles autorités maliennes est liée  au délai de la durée de la transition proposée par la deuxième assise de refondation soit 6 mois à 5 ans. La première assise avait entériné un délai de 18 mois, prévu dans la Charte dont l’application est compromise par  l’insécurité terroriste grandissante, l’exode des populations et le risque  lié aux conséquences d’organiser des élections non crédibles et non  démocratiques. Nous avons beaucoup de réserve sur les questions de délai  de transition ou de la durée de mandat qui soulèvent le principe  d’interprétation de la modification constitutionnelle. Dans le cas en  espèce, la Constitution malienne de 1992 définit la durée et le nombre de  mandat qu’un chef d’État élu doit faire, stipulé à l’article 30.

Cette  disposition à son tour soulève le principe de la règle d’application de la  procédure de modification du délai de transition et la durée du mandat  qui ne sont pas prévus ni par l’acte fondamental ni par la Charte. Ce  pouvoir revenait-il à une assise de refondation de décider, sans avoir  procédé au préalable à la tenue d’un référendum constitutionnel ? Ce  débat nous intéresse dans d’autres situations C’est le cas du Togo, où la  monarchie militaire règne depuis plusieurs années, mais la CEDEAO est  confortable avec ce fait accompli. Tout comme elle a été complaisante  avec la modification constitutionnelle sur le principe de trois mandats  successifs par les présidents Alassane Dramane Ouattara et Alpha  Condé. Nous reconnaissons cependant que la durée d’un mandat ne  garantit pas la performance d’un gouvernement en matière de bonne  gestion du pays. Le Comité Militaire de Libération Nationale (CMLN) à  sa tête le Lieutenant Moussa Traoré, avait promis au peuple malien un  court mandat qu’il n’a jamais respecté et qui s’est transformé à 22 ans  de pouvoir dictatorial. Un autre régime militaire celui de Amadou  Toumani Touré (ATT) avait promis un court mandat de transition  d’environ 18 mois qu’il a respecté.

Naturellement les contextes sont  différents par rapport à la situation actuelle que le Mali traverse. Tout  dépend aussi du bon sens, du leadership incarné et de l’honnêteté des  dirigeants. Ce conflit entre la CEDEAO et les autorités de la transition  malienne consacre l’échec de l’organisation sous-régionale dans la  construction d’une véritable communauté économique africaine fondée  sur la coopération et la solidarité. Cette confrontation a suscité au Mali  un élan de sursaut national et de patriotisme. Ensuite elle a entraîné  partout à travers l’Afrique, un capital de sympathie qui ressemble à un mouvement populaire de soutien des panafricanistes, en un mot : une  révolution qui découle de l’émergence d’une nouvelle conscience sociale  des peuples africains opprimés.

La CEDEAO menace d’avoir une force  en attente, dans quel but ? si elle prend le risque d’envahir le Mali comme  elle avait tenté de le faire en Gambie, une telle décision sera suicidaire et hasardeuse. Les populations africaines au (Mali, Niger, Burkina, Sénégal,  Guinée, Côte-d’Ivoire, Ghana, Nigéria, Togo, Guinée-Bissau, Gambie),  ont les mêmes aspirations et les mêmes revendications, tels que : un État  de droit, le droit à la sécurité, à la justice, à la liberté, à l’égalité et au  bien-être socio-économique, des besoins élémentaires et des droits  fondamentaux que la CEDEAO n’arrive pas à garantir dans l’espace où  se trouvent les pays membres. Mais les chefs d’États de l’organisation  sont prompts à sévir contre des populations africaines, quand c’est pour  protéger les intérêts de ses pairs ou à servir la politique du néo colonialisme. Paradoxalement faut-il le rappeler, la CEDEAO, invoque  dans ses textes les principes de gouvernance, de démocratie et de respect  constitutionnel, il s’agit d’une métaphore qui ne s’applique pas à certains  membres du « syndicat des chefs d’États égarés » pour paraphraser  certains observateurs qui critiquent également, les conditions d’élections  controversées et chaotiques, (pour certains d’entre eux) en dehors des  normes de la régularité et de l’ordre constitutionnel.

Si on avait prévu  dans les textes de création de la CEDEAO, un mécanisme d’imputabilité  sur la probité des membres et l’obligation de résultats concrets sur la  bonne gouvernance, certains chefs d’États n’auraient pas eu l’autorité  morale suffisante pour continuer à siéger au sein de l’organisme encore  moins avoir la qualité de continuer à représenter leurs populations ou de  parler au nom de celles-ci. La représentativité et le leadership de la  CEDEAO doivent être revus pour redorer l’image de cette noble  institution caractérisée par une « errance et un manque de sincérité »  dans son fonctionnement, ses initiatives et sa prise de décision. Dans la  crise malienne, les chefs d’États ont choisi de régler les conséquences du  problème sans s’attaquer aux causes qui résultent de la mauvaise  gouvernance. Nous pouvons attirer l’attention sur le bilan mitigé de la  CEDEAO et démontrer les différents échecs de son rôle d’intervention  dans la gestion de quelques conflits en Afrique où l’efficacité de sa  stratégie reposait sur la menace d’une sanction économique ou militaire.  L’organisation est souvent restée inaudible au désespoir des populations,  car elle se préoccupe uniquement de sauver un régime auquel la  CEDEAO est sympathique malgré les violations flagrantes de l’ordre  constitutionnel par ce pouvoir. Selon d’autres observateurs, « les  pratiques de l’organisation semblent indiquer une instrumentalisation »  qui a révélé les dessous obscurs dans le changement de nom du CFA à  ECO. L’organisme semble se dévier de sa raison d’être qui ne se justifie  que lorsqu’elle accepte d’écouter et de représenter valablement les  populations africaines contre les dérives des dirigeants corrompus ou les ingérences extérieures dans les affaires africaines. Des dictateurs qui  n’hésitent pas à réprimer dans le sang leurs concitoyens pour se  maintenir au pouvoir comme ce fut le cas avec IBK. Ce sont toutes ces  dérives qui justifient les coups d’État successifs au Mali. Paradoxalement,

la CEDEAO a utilisé dans sa médiation un argument fallacieux, comme  celui du maintien au pouvoir de Ibrahim Boubacar Keita . Une exigence  qui relève d’un simple mépris envers le peuple malien, donnant ainsi la  perception que leur solution se résume en « perte et profit » pour tracer  ce qu’elle appelle la « ligne rouge ». On peut qualifier une telle rhétorique  comme un appui favorable à un régime qui a perpétré des crimes contre  23 citoyens innocents avec plus d’une centaine de blessés. Et ce, dans le  seul but de maintenir quelqu’un qui doit être traduit devant la justice  parce qu’il a failli à sa responsabilité constitutionnelle de protéger ses  propres citoyens. Quelle est la crédibilité de cette organisation qui prône  le respect des droits de l’homme dans ses textes fondateurs? Dans la crise  politique qui secoue le Mali, Plusieurs africains sont convaincus que la  CEDEAO n’a pas le monopole de l’initiative de la médiation ni des  solutions préfabriquées de l’extérieur, qu’elle propose comme celle de  recourir aux élections dans un contexte d’insécurité, en plus du mythe  des paramilitaires-Russes et la psychose qui a gagné des esprits mal  intentionnés qui sont devenus frileux à cause du nouveau partenariat  géopolitique entre la Russie et le Mali. Commençons par jeter un regard  sur cette organisation sous-régionale.

2- La Communauté économique des États de l’Afrique de l’Ouest  (CEDEAO) La CEDEAO a été créée le 28 mai 1975 à Lagos. Les États  membres sont liés par un accord multilatéral dénommé Traité, signé à  Cotonou le 24 juillet 1993. C’est une organisation qui regroupe 15 États  après le départ de la Mauritanie. A l’origine de sa création, «les  responsables de la CEDEAO étaient conscients de la nécessité  d’encourager, de stimuler et d’accélérer le développement économique et  social des États membres en vue d’améliorer le niveau de vie des peuples.  Par conséquent, «ils ont pris en compte la Charte africaine des droits de  l’homme et des peuples et la déclaration des principes politiques de la  CEDEAO, adoptée à Abuja le 6 juillet 1991. Les chefs d’États et de  gouvernements ont également reconnu la nécessité de relever ensemble  les défis politiques, économiques et socioculturels actuels et futurs et de  mettre en commun les ressources de leurs peuples dans le respect de leurs  diversités en vue d’une expansion rapide et optimale de la capacité de  production de la région ». L’organisation est guidée par des principes fondamentaux dans tous ses rapports avec les pays membres, citoyens et  d’autres organismes externes. Ces principes sont consacrés par le Traité  de la communauté. Parmi les objectifs poursuivis, il y’a ces dispositions  suivantes qui n’ont pas connu de progrès significatifs : 3 – Promotion et  consolidation d’un système démocratique de gouvernement dans chaque  État membre tel que prévu par la déclaration de principes politiques  adoptée le 6 juillet 1991 à Abuja, – Maintien de la paix, de la sécurité et  de la stabilité régionale, coopération active entre pays voisins et  promotion et le renforcement des relations de bon voisinage, – Règlement  pacifique des différends entre les États membres, coopération active  entre pays voisins et promotion d’un environnement pacifique comme  préalable au développement économique, – Respect, promotion et  protection des droits de l’Homme et des peuples conformément aux  dispositions de la Charte africaine des droits de l’Homme et des peuples,

2.1- Définition de traité : origine étymologique, issue du latin ‘’tractatus’’  du participe passé de ‘’tractere’’ traiter (un sujet), développer oralement  ou par écrit, négocier. Un traité est une convention écrite et signée  solennellement entre deux ou plusieurs États.

2.2- Traité international : On appelle « traité international » un accord  conclu entre plusieurs États ou entités ayant une personnalité morale en  droit international. Il est l’expression de volontés concordantes des  différentes parties en vue de produire des effets juridiques régis par le  droit international et contient des obligations que les États acceptent  expressément et volontairement de respecter. En principe un traité  international peut comporter n’importe quelle clause du fait que les États  sont souverains. Cependant le droit de certains pays impose que les  traités internationaux respectent les dispositions de la Constitution. Dans  la hiérarchie des normes juridiques les traités se situent entre la  Constitution et les lois. Le Mali a ratifié ce traité qui n’a pas de  suprématie sur le droit positif malien à cause du principe de convergence.  Que dit la Constitution malien.

2.3- Constitution du Mali du 25 février 1992 : En vertu de l’article 116,  les traités ou accords régulièrement ratifiés ou approuvés ont, dès leur  publication, une autorité supérieure à celle des lois, sous réserve pour  chaque traité ou accord de son application par l’autre partie.

2.3.1- Démission forcée ou volontaire du chef de l’État membre de  l’espace CEDEAO. Nonobstant le motif ou faute qui peut être invoquée,  les discussions qui sont survenues entre la CEDEAO et le M5-RFP sur la  destitution d’un chef d’État en exercice est régi par deux textes différents  qui ne résultent pas du principe de la hiérarchie des normes, car le  protocole de la CEDEAO prévoit le principe de « convergence ou  d’harmonisation » des dispositions pour éviter un conflit de superposition  des normes juridiques, même si l’art. 116 de la constitution malienne va  dans ce sens, c’est-à-dire «une autorité supérieure à celle des lois  maliennes».

2.3.2- Protocole de la CEDEAO A/SP1/12/01 sur la démocratie et la bonne  gouvernance, (additionnel) au protocole relatif au mécanisme de  prévention, de gestion, de règlement des conflits, de maintien de la paix  et de la sécurité, il est stipulé ci-après :

Chapitre 1, section 1 : Les principes de convergence des textes : b)- Toute  accession au pouvoir doit se faire à travers des élections libres, honnêtes,  et transparentes. c)- Tout changement anticonstitutionnel est interdit de  même que tout mode non démocratique d’accession ou de maintien au  pouvoir. Ces principes se retrouvent dans la Constitution malienne de  1992 aux articles 24 et 26

2.3.3- Article 24, stipule que tout citoyen, y compris le chef de l’État, toute  personne habitant le territoire malien a le devoir de respecter en toutes  circonstances la Constitution

2.3.4-Article 26, stipule que la souveraineté nationale appartient au  peuple tout entier qui l’exerce par ses représentants ou par voie de  référendum. Aucune fraction du peuple ni aucun individu ne peut s’en  attribuer l’exercice.

NOTE : La crise politique malienne, révèle comme trame de fond, les  multiples actes de violation et de perversion de l’ordre constitutionnel  garantit par l’article 24 (d). Le président IBK avait prêté serment pour  garantir et protéger l’unité nationale, mais il n’a pas su prévenir la  menace qui pesait sur la cohésion sociale afin d’éviter la crise  intercommunautaire entre Donzos et Peulhs qui a fait plusieurs victimes.

Proposition de stratégie du gouvernement de transition :

« Dans la recherche de voies et moyens pour atténuer les sanctions  financières contre le Mali, nous exhortons les autorités de la transition de  tenir compte de certaines analyses du professeur Nicolas Agbohou, mais  aussi des décisions courageuses que le président Laurent Gbagbo avait  prises durant la crise politique Ivoirienne, dont nous publions ci-après un  aperçu. Le président ivoirien avait réagi vigoureusement à la fermeture en  cascade des banques internationales dans son pays, pour asphyxier son  économie. Rappelons que les banques internationales fermaient les unes  après les autres en Côte d’Ivoire, dont notamment la plus importante d’entre  elles, la française SGBCI, filiale de la Société générale. Ensuite, la BICICI et  Citibank avaient ouvert le bal, suivies depuis par plusieurs autres. Une  conséquence de la guerre économique et financière que se livraient les  présidents ivoiriens proclamés Alassane Ouattara et Laurent Gbagbo. Ce  dernier a décidé de réagir en prenant le contrôle de plusieurs établissements  bancaires internationaux ayant suspendu leurs activités. Aux grands maux,  les grands remèdes. A l’issue du Conseil des ministres, le président Laurent  Gbagbo a décidé de nationaliser les filiales ivoiriennes des banques françaises  SGBI et BICICI, anglaise Standard Chatered Bank, et américaine Citibank,  au motif qu’elles n’ont pas respecté le préavis de trois mois nécessaires avant  toute fermeture. Dans le communiqué officiel de son gouvernement, il est  stipulé que l’Etat, « prenant ses responsabilités vis-à-vis de son peuple et des  opérateurs économiques (…) a pris un décret afin que l’Etat de Côte d’Ivoire  prenne le contrôle par une prise de participation totale et complète dans le  capital de ces banques » Le président Gbagbo exerçait ainsi les attributs de  la souveraineté du pays. La direction générale de SGBCI comme les  précédentes , avait invoqué des raisons sécuritaires pour justifier de la  suspension temporaire de ses activités. « Nous sommes confrontés d’une part  à l’impossibilité de faire fonctionner quasi normalement les échanges de  compensation entre banques et d’autre part, à l’impossibilité à court terme  d’assurer l’approvisionnement de nos caisses en monnaies fiduciaires »,  avait-t-elle déclaré dans un communiqué. Des motifs auxquels la BICICI et  Citibank avaient ajouté, l’incapacité d’assurer la sécurité de leurs employés. C’est dans ce contexte qu’il y’a eu les fermetures de banques en cascade dont  notamment Access Bank et la Bank of Africa (BOA) qui ont suspendu leurs  activités, comme la Bourse régionale des valeurs mobilières ( BRVM) . Cette  situation avait plongé les Ivoiriens dans la psychose. Les épargnants se sont  rués dans les établissements pour retirer des liquidités. Les files d’attente  devant les guichets et aux portes d’entrée des banques ont pris des dimensions alarmantes, surtout au quartier Plateau d’Abidjan en  particulier.

Les autorités maliennes pourraient s’inspirer de la stratégie du président  Laurent Gbagbo qui reposait sur une tentative de déjouer la tactique de  l’étouffement. Examinons le rôle et la duplicité de la CEDEAO impliquée  dans cette malheureuse expérience : Dès le début de la crise postélectorale  opposant les deux présidents proclamés après le second tour du 28 novembre,  la communauté internationale et la CEDEAO (Communauté économique  des Etats d’Afrique de l’Ouest) en particulier, favorables à Alassane  Ouattara, ont choisi la stratégie de l’étouffement économique pour  contraindre le président sortant Laurent Gbagbo à céder le pouvoir à son  rival. Le 26 janvier, la Banque centrale des Etats de l’Afrique de l’Ouest  (BCEAO), commune aux 8 pays de l’Union économique et monétaire ouest africaine (Uemoa), a ordonné la fermeture de sa direction et agences  nationales en Côte d’Ivoire après que, la veille, Laurent Gbagbo eut annoncé  par décret leur réquisition. Une fermeture qui a peu à peu paralysé le système  bancaire ivoirien.

Acculé, privé de liquidités et de la signature des comptes d’Etat, à la  recherche d’un moyen de payer les fonctionnaires et les militaires, de  financer sa politique et de rassurer ses concitoyens, Laurent Gbagbo a pensé  trouver la parade en nationalisant les filiales des banques internationales qui  avaient cessé leurs activités. « L’objectif fondamental du Président de la  République (…) est d’assurer la continuité de l’ouverture de ces banques afin  de préserver les emplois et d’assurer l’accès des citoyens et des opérateurs  économiques à leurs avoirs étant entendu que ces avoirs ne sont pas la  propriété de ces banques », indique le communiqué publié à l’issue du  Conseil des ministres, qui promet que « chaque citoyen et chaque opérateur  économique pourra avoir accès à ses comptes bancaires dans les plus brefs  délais ». Dans ce duel, la crise ivoirienne a franchi un nouveau sommet. Nous  recommandons aux autorités de la transition d’agir vite et d’assumer leur  responsabilité conformément aux attributs de la souveraineté »

CONCLUSION : La CEDEAO ne résistera pas à la fracture et à l’implosion,  car les africains ont perdu confiance à l’organisation sous-régionale qui est  allée trop loin dans sa décision. Dans les différentes crises impliquant le  Libéria, la Côte-d’Ivoire, la Guinée Bissau, la Gambie et maintenant le Mali,  la CEDEAO a toujours fait prévaloir dans sa médiation, l’utilisation de sanctions ciblées et la menace militaire qui constituent un des outils  principaux de son arsenal dans la recherche de solutions. La préméditation  du recours aux mécanismes de l’UEMOA pour renforcer les sanctions  économiques contre le Mali visent à créer la paralysie l’économie  malienne pour susciter un mécontentement populaire avec l’objectif de  déclencher une répression des forces de sécurité. Le gouvernement ne  tombera pas dans ce scénario classique qui lui est tendu. Nous sommes  entrés dans un contexte sensible dans la gestion de cette crise et la  population a besoin d’être informée et rassurée régulièrement. C’est  pourquoi, nous recommandons au gouvernement de désigner deux porte paroles officiels dont l’un sera chargé des activités du gouvernement et  l’autre chargé des opérations militaires. Concevoir un programme de  communication, assorti de l’organisation d’une conférence de presse  conjointe et hebdomadaire. Pour contrecarrer les velléités de propagande  des médias-mensonges dont l’objectif est d’instrumentaliser des  scénarios de violations des droits de l’homme sur le théâtre des opérations  militaires contre le terrorisme. A cet effet, nous recommandons de  présenter tous les djihadistes et terroristes capturés et de rendre leurs  dépositions publiques sur leurs soutiens logistiques. Pour revenir à  l’organisation sous-régionale, tous les africains déplorent l’approche de la  CEDEAO qui va à l’encontre de la recherche de la paix. et la stabilité. La  Cour de justice de la CEDEAO qui est l’organe judiciaire, chargée de veiller  à l’interprétation et à l’application des lois, des protocoles et des conventions  de la communauté est interpellée. Certaines dispositions des textes de la  CEDEAO relatifs au maintien du chef de l’État en exercice, la paix et la  sécurité, le respect des droits de l’homme, la démocratie et la bonne  gouvernance, doivent faire l’objet d’une clarification de la Cour de justice de  cette organisation. De plus les textes de la CEDEAO consacrent le principe  de convergence entre ses principes et ceux de la Charte africaine. Il s’agit à  notre avis, d’une conformité qui donne l’ouverture à un recours judiciaire  contre la décision de la CEDEAO et contre le président IBK devant la Cour  africaine des droits de l’homme et des peuples. Sous le régime de ce dernier,  la mauvaise gouvernance s’est caractérisée par plusieurs malversations  financières et la corruption, mais également par une crise démocratique et  institutionnelle. En dehors de jouer le rôle de pompier la CEDEAO doit  consolider et renforcer le mécanisme de prévention, un troisième outil qui  consacre une démarche structurante et respectueuse des intérêts du peuple  africain. L’organisation doit veiller à s’investir dans l’anticipation et la  proactivité dans le cadre de la prévention des conflits en intervenant en  amont avant que les problèmes surgissent. La CEDEAO doit instaurer des principes d’imputabilité et de responsabilité des chefs d’États qui doivent  justifier certaines dérives contraires à leurs engagements au sein de  l’organisation. C’est au regard de cette perspective que la CEDEAO doit  rebâtir sa crédibilité pour l’avenir. Le peuple malien et les autorités de la  transition ont décidé de s’affranchir de la politique néocolonialiste pour se  libérer définitivement. Notre combat s’inscrit dans un enjeu géopolitique et  le prix du sacrifice à payer sera très élevé, si les maliens ne contribuent pas à  l’effort de ce sacrifice. Un ami du peuple malien qui soutient notre révolution suggère aux maliens qui ont des salaires d’accepter non pas une réduction  statutaire de leur rémunération, mais d’autoriser que la moitié de leur salaire  soit affectée (aux besoins et dépenses récurrentes) pour atténuer les  conséquences des sanctions. En contrepartie, le gouvernement adoptera des  mesures d’accompagnement comme la gratuité des coûts d’eau et  d’électricité ou du carburant. Mettre en place un mécanisme de contrôle des  prix relatifs à l’inflation et son impact sur les coûts de la vie, afin d’ éviter la cupidité et la spéculation sur certains produits. Nous invitons le peuple  malien à faire preuve d’union sacrée, de sacrifice et de solidarité dans les  circonstances, à soutenir le combat de libération. Nous maliens de l’extérieur  exprimons notre soutien à ce combat patriotique et tenons à rassurer nos  frères et sœurs de demeurer calmes, sereins et de ne pas céder à la panique.  Nous remercions tous les mouvements panafricanistes de leur soutien au  combat du peuple malien, car c’est également leur combat et ils doivent  maintenir la pression sur leurs propres chefs d’États égarés de la CEDEAO.

 (Préparé par : Boubacar Touré, juriste, Montréal, Québec, Canada) 

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