Suite à l’entrée des éléments de la Plateforme à Kidal, le 2 février dernier, dans une atmosphère très confuse, des pourparlers ont été vite engagés entre elle et la Coordination des Mouvements de l’Azawad (CMA). Résultat: les deux parties ont rendu public un communiqué conjoint, signé pour la Plateforme par Hanoune Ould Ali et pour la CMA par Alghabass Ag Intallah. Il a été paraphé dans le cadre de l’Accord d’Anefis que les deux parties avaient négocié entre elles pour une libre circulation des personnes et de leurs biens.
Parmi ceux qui ont pris part aux discussions, figure en première ligne le Général Elhad Ag Gamou, un officier bon teint de l’armée malienne. Cette présence nous a vraiment intrigués. Comment se peut-il qu’un officier de l’armée, de surcroit un Général, se retrouve au sein d’une milice appelée Gatia, membre de la Plateforme, composée de plusieurs mouvements d’auto-défense?
Gamou a-t-il déserté les rangs de l’armée malienne pour se retrouver au sein d’une colonne irrégulière, réputée soutenue par Bamako? En clair, a-t-il démissionné de l’armée? Nos investigations auprès du ministère de la Défense et auprès de ses proches ne nous ont pas donné de réponse. Partout c’est la même rengaine: «nous ne pouvons rien te dire».
C’est vraiment troublant! C’est aussi la preuve que la milice Gatia est bel et bien soutenue par le gouvernement. Il semble qu’en plus de Gamou, il y ait au sein de cette milice des hommes de rang de l’armée malienne, des Imgads et alliés, proches du Général Gamou. Quelle confusion! Quelle grosse erreur!
On peut comprendre que le gouvernement Modibo Keita apporte son soutien à la milice, de façon intelligente, pour contribuer à la résolution de la crise. Mais le faire de façon si flagrante nous parait peu réfléchi, dans la mesure où l’Etat a toujours nié un quelconque soutien aux milices.
Le cas du Général Gamou est bien édifiant. Les quatre-vingt véhicules et les armes que lui et ses hommes détiennent sont en partie à l’Etat. Sans oublier d’éventuels soutiens financiers. Par cette stratégie l’Etat joue avec le feu, parce que l’Accord d’Anefis a été scellé sans une implication directe de Bamako. Les pourparlers de Kidal ont également eu lieu en son absence.
La conséquence est la gestion de la ville de Kidal par les deux parties. Cette duplicité affaiblit l’Etat et rapproche les deux frères ennemis d’hier, qui pourraient être demain complices pour se retourner contre Bamako et nous éloigner de la paix tant recherchée.
En tout cas, ce qui se passe à Kidal est pour l’instant incompréhensible, troublant et nécessite des explications de la part du pouvoir. Sinon, cela fait désordre. Tout est sens dessus dessous.
Dans ce contexte, où allons-nous? Vers la paix ou vers une reprise des hostilités? A suivre.
Chahana Takiou