La problématique de la carte de séjour ne préoccupe pas que les migrants au Maroc. Pour nos étudiants au Royaume de M6, l’obtention d’un titre de séjour est loin d’être du coton, c’est un parcours… de l’étudiant.
L’étranger désireux de séjourner sur le territoire marocain est tenu de demander à l’administration la délivrance d’un titre de séjour : une carte de résidence ou une carte d’immatriculation qu’il doit détenir ou être en mesure de présenter à l’administration dans un délai de 48 h.
La carte d’immatriculation est remplacée provisoirement par le récépissé de demande de délivrance ou de renouvellement de la carte. Cette demande est faite auprès des services de la « sûreté nationale » ou de la « gendarmerie royale » les plus proches du lieu de résidence de l’intéressé, tout en payant les frais fixés à 100 dirhams pour chaque année de sa validité, et ce, conformément à l’article 252 du code général des impôts.
Si les étrangers crient tous les jours leurs ras-le-bol à propos du difficile d’accès aux cartes de séjour, dans le milieu estudiantin, la situation est de plus en plus préoccupante. Le problème de la carte de séjour continue à se poser avec acuité chez les étudiants africains en général et les Maliens en particulier.
Un problème qui s’ajoute à la longue liste des calvaires auxquels sont exposés les étudiants maliens vivant au Maroc. Ce qui nous pousse à dépasser les émotions et à essayer de comprendre le problème.
Un tour à l’Université de Casablanca et de Fès permet de découvrir cette réalité auprès des nombreux étudiants étrangers. Cheick Diallo, étudiant en master à Fès, n’apprécie pas le traitement qu’on afflige aux étudiants étrangers à la sureté nationale.
« Chaque année, on introduit une nouvelle demande. D’abord on nous renvoie chercher une lettre d’excuse à l’ambassade du Mali à Rabat à plus 180 km soit trois à quatre heures de voyage. Tu amènes ta lettre d’excuse et on te jette à la figure tes dossiers sous prétexte que les dossiers sont mal classés ».
Fatalistes, certains font presque une croix là-dessus, quitte à se mettre dans une posture d’illégalité. Ils pourraient en effet être inquiétés par les autorités à tout moment, y compris lors d’un contrôle de routine, sous prétexte qu’ils n’ont pas de titre de séjour valide.
A cette situation instable s’ajoutent les pénalités dont ils doivent s’acquitter en cas de retard auprès du commissariat. A partir du moment où le dépôt du dossier se fait hors délai, et ce quel qu’en soit le motif, les étudiants tombent sous le coup de ces sanctions.
Les pénalités s’exercent comme suit : 20 dirhams par semaine de retard et 300 dirhams pour les frais de renouvellement hors délais. C’est ce montant-là qui effraie le plus les étudiants et certains se contenteront de la carte de séjour provisoire toute l’année.
En effet, entre le moment où ils entrent au Maroc et celui où ils effectuent la demande de renouvellement, les frais (installation, scolarité, etc.) peuvent s’accumuler et par conséquent, les mois peuvent s’écouler. « Il y en a qui préfèrent attendre la fin de l’année scolaire pour payer », faute de moyens financiers, assure Atou Traoré. Et les pénalités s’accumulent, avec le retard.
« Précarité juridique », « manque de communication »
Attente, puis cumul des pénalités, un cercle vicieux qui recommence – chaque année ou presque – et qui est difficile à briser pour les étudiants. Surtout pour ceux qui n’ont pas de soutien financier autre que leurs bourses.
Il est de plus en difficile pour les étudiants de régulariser leur situation, donc ils tombent dans la précarité, constate Adama Diakité, un étudiant en master à l’Université de Fès. « Environ 70 % des personnes qui viennent nous voir ont un problème d’accès au titre de séjour », poursuit le jeune homme.
Dans ces locaux, où « on n’est pas là pour dénoncer, mais pour informer », les étudiants peuvent bénéficier d’une assistance juridique gratuite, en cas de problèmes liés au renouvellement du titre de séjour ou encore se faire accompagner au moment du dépôt. Le jeune homme terminaliste regrette « la précarité juridique » et surtout « le manque de communication ».
Quand les voies de l’administration sont impénétrables, restent les moyens illégaux. Ainsi, certains policiers demanderaient des pots-de-vin (sommes d’argent, téléphones portables, etc.) pour faciliter l’obtention de la carte.
D’autres migrants qui ne sont mêmes étudiants en ont fait leurs boulots. Ils proposent ainsi des faux diplômes, des fausses cartes de séjour aux étudiants en échange de quelques centaines de dirhams.
Face à ces difficultés, les réseaux de passeurs cibleraient de plus en plus des étudiants lassés et désœuvrés qui n’hésitent pas à tenter la traversée vers l’Europe. « On a constaté une hausse du phénomène », déplore Assan Kéita.
Triste par ces maux qui compliquent la vie des étudiants étrangers au Maroc, Adama Diakité ne désespère pas pour autant : « Le Maroc offre beaucoup d’opportunités au niveau académique ».
Hawa Sy