​RENCONTRE ADEMA-RPM: La fusion est-elle réellement envisageable ?

L’Alliance pour la démocratie au Mali/Parti africain pour la solidarité et la justice (ADEMA-PASJ) et le Rassemblement pour le Mali (RPM) ont eu une importante rencontre le 20 novembre 2023 dans «La Ruche» (siège de l’alliance à Bamako-coura) autour de leurs présidents respectifs, Abdel Karim Konaté dit «Empé» et Dr Bokary Tréta. Au cœur des échanges, il a surtout été question de l’élaboration d’un projet politique commun. L’heure de la fusion a-t-elle finalement sonnée dans le cœur des «Abeilles et des Tisserands» ? La rencontre du 20 novembre a-t-elle accouché d’une souris ?  Rien n’est moins sûr. Que peut-on espérer devant les égos démesurés des uns et des autres dans ces deux partis?

 Échanger sur les questions liées à leurs relations bilatérales, à la genèse et à la gestion de la crise qu’a traversé le RPM, à la situation sociopolitique et sécuritaire du pays, à l’actualité internationale… Tel était l’objectif de la rencontre qui a vu l’Adéma recevoir le RPM à son siège le dimanche 20 novembre 2023. Au-delà des nombreuses questions débattues (voie encadré), ce qui a sans doute retenu l’attention des observateurs c’est le fait que les 2 partis aient «convenu de mettre en place une commission de travail pour poursuivre la réflexion sur l’élaboration d’un projet politique commun» ! 

L’heure de la fusion souhaitée et très attendue a-t-elle finalement sonnée dans le cœur des «Adémistes et des Tisserands» ? C’est le moindre que l’on puisse souhaiter à ces deux chapelles et surtout à la classe politique dont l’effritement est aujourd’hui l’un des principaux handicaps à l’épanouissement de la démocratie malienne. Même si un processus démocratique se nourrit de la diversité des idées et des opinions, il devient très fragile quand il n’est pas adossé à de grands ensembles. Et surtout dans le cas malien, ils sont nombreux les partis qui n’ont pas un fondement idéologique, donc ne naissent pas forcément sur la base de conviction politique avérée. Le plus souvent, il s’agit d’exister dans le landernau politique et savoir monnayer ses alliances pour avoir sa part du gâteau. Le RPM et l’Adéma-Pasj ont aujourd’hui l’opportunité de montrer la voie à suivre aux autres.

Et ils peuvent y parvenir facilement si, dans les deux états-majors, ont fait preuve de clairvoyance, de vision et surtout si chacun se débarrasse des rancunes politiques passées (le RPM a été créé par feu Ibrahim Boubacar Kéita en juin 2001 parce que sans doute frustré de voir que feu Soumaïla Cissé lui a été préféré comme dauphin d’Alpha Oumar Konaré et aussi comme candidat de l’Adéma à la présidentielle de 2002 finalement remportée par feu Amadou Toumani Touré dit ATT. Visiblement, ils ont tous les deux étés roulés dans la farine et Soumy va s’affranchir de la Ruche quelques mois plus tard en fondant l’Union pour la République et la Démocratie/URD en juin 2003) et fait fi des égos et des ambitions personnelles. Et le fait d’appartenir tous les deux  à l’internationale socialiste (qui leur impose des efforts communs pour défendre des valeurs d’égalité, de liberté, de solidarité, de justice, de paix…) est un atout non négligeable pour se retrouver aujourd’hui dans une seule et unique chapelle politique et influencer réellement la gouvernance de notre pays.

«Après des décennies de parti unique, le Mali est passé au multipartisme intégral avec la création de 58 partis et groupements politiques. Une telle situation a conduit à l’érosion du paysage politique et à une faible représentation politique, qui se reflète dans la prolifération des partis et dans la faible participation électorale aux élections», avait déjà alerté M. Souleymane T. Koné (Les partis politiques et la démocratie au Mali/1998). Selon lui, à «la pléthore des partis politiques s’ajoutent malheureusement l’extrême instabilité des groupes politiques et la dispersion des énergies, ainsi que les divisions internes. Renforcer les partis politiques est une nécessité impérative. Il faut en effet un système de partis hautement représentatif dans lequel les formations entretiennent des liens étroits avec les différents groupes sociaux». 

Le rapprochement puis la fusion Adéma-RPM va énormément contribuer à cela. Et il serait même souhaitable que l’URD, le Miria… soient consultés pour les convaincre d’adhérer à un éventuel projet de fusion. Qui peut réellement tenir tête dans l’arène politique malienne à une force unique composée de l’Adéma, du RPM, de l’URD ? Leurs leaders vont-ils oser franchir le rubicond ? Nous ne tarderons pas à le savoir. Mais, toujours est-il que, comme l’a si pertinemment souligné Souleymane T. Koné, il est aujourd’hui «crucial de s’affranchir du schéma politique des mouvements indépendantistes, c’est-à-dire d’introduire une dimension démocratique afin de renforcer les aspects nationaux et sociaux qui les créent» !

Moussa Bolly

Soutien à la Transition, à l’Armée et à la Palestine

A l’issue de la rencontre du 20 novembre 2023, l’Adéma et le Rpm ont pris des décisions importantes et se sont engagés à œuvrer ensemble pour contribuer au renforcement de la sécurité et de la gouvernance ; à assurer la réussite de la transition en cours en vue d’un «retour apaisé et sécurisé» à l’ordre constitutionnel à travers «un cadre politique plus dynamique»… Tout en réaffirmant leur attachement à la «sauvegarde de l’intégrité territoriale, à l’unité nationale et la souveraineté​», les deux partis ont naturellement salué les FAMa pour leur bravoure, leur détermination et leur professionnalisme dans «la conduite des opérations de recouvrement  et de sauvegarde  de l’intégrité du territoire​».

Les «Abeilles» et les «Tisserands» ont également encouragé les autorités à poursuivre les opérations de sécurisation et stabilisation de l’ensemble du territoire national. Les autorités de la Transition ont été invitées par les deux chapelles politiques à «redéployer l’administration dans toutes les zones libérées ; à réhabiliter les infrastructures de base et à créer un environnement propice au retour et à la réinstallation des populations réfugiées et déplacées». L’Adéma et le Rpm ont aussi réaffirmé leur «solidarité au peuple palestinien dans son attachement à sa terre : la Palestine»… Ils soutiennent aussi «la solution à deux Etats, la Palestine et Israël, vivant côte à côte dans la paix et la sécurité». Une position qui est aussi celle défendue par le Mali !

M.B