RELECTURE DE LA CHARTE DES PARTIS

Les acteurs politiques pourront-ils pour une fois taire leurs divergences
pour sauvegarder l’essentiel ?

Le processus de la réforme de la charte des partis politiques est
désormais lancé dans notre pays. Si les partis issus du mouvement
démocratique ont opté pour des propositions communes, certaines
formations se sont déjà jetées dans les bras du pouvoir public en lui en
assurant un soutien inconditionnel (???) dans sa démarche. Et pourtant
compte tenu de l’importance de cette réforme pour la démocratie
malienne et de ses enjeux pour la stabilité politique du pays, il est
souhaitable que les acteurs politiques, pour une fois, taisent leurs
divergences (loin d’être idéologiques) pour tenir le même langage face
au gouvernement.

«Selon les informations qui nous parviennent, nous avons l’impression que les
autorités en place veulent dépouiller les partis politiques des acquis de la
démocratie. Et malheureusement, en affichant déjà une divergence
d’approche, nous allons leur faciliter la tâche» ! Telle est la crainte
exprimée en off par un leader politique sur l’actualité du pays, notamment les
facteurs actuels qui peuvent bloquer un retour rapide à l’ordre constitutionnel.
On se rappelle que lors de sa première rencontre avec la classe politique, le
Premier ministre Abdoulaye Maïga avait abordé la question comme pour
préparer ses interlocuteurs à avaler une pilule amère. Selon nos informations,
c’est une réforme qui ne manquera pas en effet de faire grincer les dents car,
en plus de la réduction du nombre des chapelles politiques, il va falloir
désormais satisfaire des conditions drastiques pour créer un parti politique.
Pour de nombreux observateurs et citoyens, cette relecture est aujourd’hui
«un mal nécessaire». Cette réforme est aujourd’hui pour beaucoup un
préalable à l’organisation des élections pour un retour à l’ordre constitutionnel.
Ainsi, le ministre délégué auprès du Premier ministre, chargé des Réformes
politiques et du soutien au processus électoral a récemment invité par courrier
les partis à lui faire parvenir au plus tard le 14 mars 2025 leurs propositions et
suggestions dans le cadre de la relecture de la loi N°05-047 du 18 août 2025
portant charte des partis politiques. Une correspondance qui a eu le mérite de
sortir les uns et les autres de leur torpeur.
C’est ainsi que, à l’issue de la réunion tenue le 3 février 2025, l’instance de
décision du Forum des partis et mouvements politiques a invité les différentes
formations politiques de la plateforme à soumettre leurs propositions et
suggestions lors de la prochaine réunion du comité d’experts. Il s’ensuivra
naturellement l’harmonisation des positions et l’élaboration d’une proposition
commune à l’issue de la conférence des présidents prévue à la fin de ce mois
de février.

Entre quête de consensus et clash

On se rappelle aussi que le 1er février 2025, 74 autres partis s’étaient
également réunis à l’initiative de Me Mountaga Tall, président du CNID Faso
Yiriwa Ton. Ils ont décidé de mener une analyse approfondie de la charte des
partis politiques afin de formuler des propositions communes pour sa
relecture. Ces deux démarches assureraient une certaine synergie d’action
pour laquelle nos politiciens auraient opté si les Forces patriotiques pour la
refondation du Mali (FPR-MALIKO) n’avaient pas décidé de mettre les pieds
dans le plat en publiant le 3 février un communiqué relatif à cette même
relecture de la charte des partis politiques.
Elles (Forces patriotiques) rappellent que celle-ci (relecture) est une
«recommandation importante» des Assises nationales de la refondation
(ANR). Les FPR-Maliko a ainsi tenu à attirer l’attention du gouvernement de la
transition sur certains points importants des ANR en ce qui concerne les partis
politiques. Il s’agit notamment de la suppression du financement public des
partis politiques ; la réduction de leur nombre ; la moralisation de la pratique
politique ; la maîtrise des sources de financement des partis politiques.
Pour cette coalition, ces recommandations sont «des lignes qui ne doivent pas
faire l’objet de discussions ni de débat» au cours du processus de relecture.
Elle a invité les partis politiques membres du regroupement à prendre en
compte les recommandations des ANR afin d’éviter de faire de cette relecture
un fonds de commerce politique pour redorer le blason des politiciens périmés
voulant se faire un indispensable éternel de la vie politique de notre pays.
Ce clash a surpris plus d’un observateur, d’autant plus qu’on est encore au
stade des propositions, donc pas dans le vif du sujet. C’est une réaction que
de nombreux acteurs politiques minimisent. «Que représentent réellement ces
soi-disant forces patriotiques sur l’échiquier politique malien ? Presque rien.
Elles ne doivent leur existence qu’à l’opportunisme de leurs fondateurs qui
retournent leurs vestes au gré du vent, ou du moins de leurs intérêts
personnels», commente un leader politique du mouvement démocratique.
N’empêche que cette réaction fait craindre une certaine cacophonie des
acteurs politiques qui risque d’éclipser les enjeux de cette importante réforme
politique. Compte tenu de son importance et de ses enjeux pour la stabilité
politique du pays, il est souhaitable que les acteurs politiques, pour une fois,
taisent leurs divergences (loin d’être idéologiques) pour accorder leurs violons
afin que la nouvelle charte puisse être un facteur réel de consolidation de la
démocratie malienne acquise dans le sang des martyrs !
Hamady Tamba

diasporaction.fr