En effet de 9 à 17 heures, soit près de huit heures, il était pratiquement impossible de rentrer dans la ville garnison de Kati ou d’en sortir. Des femmes et des enfants de militaires ayant bénéficié d’un fort renfort d’autres personnes, très en colère, ont coupé toutes les voies qui mènent à cette cité distante de quinze kilomètres de la capitale. Cette manifestation fait suite à la grande marche d’avant-hier (voir notre publication du 1er février) que ces mêmes femmes ont organisée et qui aura nécessité l’intervention à la fois du Chef d’Etat Major des Armées, le général Gabriel Poudiougou et celle du Ministre de la Défense et des Anciens Combattants, M. Natié Pléa pour y trouver une issue heureuse. Il faut croire que l’implication de ces deux autorités n’aura pas suffi à calmer les esprits, au vu de ce qu’il était donné de constater. A la question de savoir le pourquoi d’une deuxième journée de manifestation, Madame Diabaté, une dame très écoutée et respectée de ses consœurs nous répond: « Tout le Mali sait ce que nous voulons ».
A vue d’œil, très affectées, la dame et toutes celles qui l’accompagnaient donnaient l’impression de personnes pour lesquelles le ciel venait de s’écrouler tant était grand leur désarroi. Toutes étaient dans l’attitude de personnes qui n’arrivaient pas à s’expliquer la perte d’un être cher. Faut-il rappeler que les derniers affrontements dans la crise du nord, ces jours, avaient fait état d’un nombre important de soldats tués, fautes de moyens suffisants pour assurer la défense de leur position, de leur pays et la sauvegarde de leur vie.
Les larmes aux yeux, la gorge nouée, une frêle jeune fille, à peine sortie de l’enfance, criait comme pour se faire entendre de tout le pays : « Nous ne supportons plus d’assister les bras croisés à l’assassinat de nos pères et de nos frères, mal armés, au nord du Mali ». Au « check point », barricade de fortune dressée quelque part sur le tronçon qui relie Kati à Bamako par le sud, pour empêcher tout passage, tout le monde était de son avis.
De 9 à 17 heures, la tension était perceptible dans les environs Sananfara. La foule très en colère a saccagé le domicile de l’ancienne ministre de l’artisanat et du tourisme Zakyatou Wallet Halatyne, la polyclinique médicale « Allama » et la pharmacie du Camp. Selon certaines indications, ce complexe sanitaire appartiendrait à un certain El Mehidi.
Qu’il s’agisse de ce qui s’est passé avant hier ou les femmes des camps avaient marché sur le palais de Koulouba, siège du pouvoir central, pour tenter de se faire entendre ou qu’il s’agisse de cette dernière manifestation, tout à notre sens traduit un malaise certain au sein de la population malienne. Malaise qui s’amplifie au rythme des rumeurs et des nouvelles qui traversent le pays du nord au sud et que vient conforter le mutisme des autorités en direction du grand public. Les différents canaux d’information de l’Etat sont devenus tout à coup inopérants Après ce qui s’est passé à Aguelhok et qu’il faut désormais considérer comme un crime de guerre, la population malienne, au non du droit à l’information, demande à être édifiée. Qu’est-ce qui se passe en vrai au nord du Mali ? Qui sont en réalité ceux qui s’attaquent à la République : des rebelles, des bandits des salafistes, des combattants venus d’ailleurs, en mal de guerre ? De quels moyens l’armée du Mali dispose-t-elle, sont-ils suffisants, efficaces ? Autant de questions et surtout de réponses à apporter à tous les Maliens. Le peuple du Mali, les soldats de la Nation, la preuve est faite, n’ont jamais failli et ne failliront jamais à la défense de la mère patrie. Ils sauront retrouver dans l’unité et la confiance le chemin de la paix.
Assane Koné
Le Républicain Mali 02/02/2012