Les grandes sociétés étrangères et multinationales sont en cause au Mali, à l’instar de Randgold, une grande société minière fermée pour non paiement d’impôts. « Voilà une société minière qui fait, bon an mal an, plus de 800 milliards de chiffre d’affaires dans notre pays et refuse de payer le maigre pécule qu’elle doit à notre pays au titre de la TVA ! », écrit notre confrère Info Matin. Mais comment nos services fiscaux ont-ils pu s’accommoder d’un tel laxisme ? Le ministre de l’Economie et des Finances n’était-il pas au courant de cet incivisme caractérisé de la société minière Randgold, qui, s’il est avéré ne daterait certainement pas d’une matinée pour avoir atteint la faramineuse de 47 milliards ? Une équipe du quotidien Le Républicain s’est rendu à Faladié, au siège de Randgold pour ne trouver aucun interlocuteur de la société sur place. Le portail du siège était certes ouvert, donnant accès à la cour du siège, mais « aucune présence étrangère au service n’est autorisée », nous dit une petite équipe de gardiens plutôt nerveux. Nous voulons entrer dans la cour, pour rencontrer un travailleur de la boîte ou voir que les bureaux sont réellement sous scellé. Mais « non, s’il vous plait, vous ne pouvez pas, le personnel peut entrer, mais nous n’avons pas l’autorisation pour vous laisser passer». Même pas juste pour faire la photo des bureaux sous scellé, que personne n’a jamais vu, malgré l’abondance des articles sur cette fermeture. L’Etat malien n’est-il pas victime de son laxisme devant un mauvais payeur ? Essaie-t-on de cacher quelques complicités internes pour noyer le poisson ? Le ministre de l’Economie et des Finances doit s’expliquer. Si les faits sont établis, le Directeur général de Randgold Mali, Mark Bristow, celui qui apparait dans les discours comme le plus africaniste de tous les blancs opérant au Mali, doit changer le fusil d’épaule.
Pour mettre la nation dans ses droits, recouvrer ce qui est dû au Trésor public de notre pays, « le ministre de l’Économie et des finances, le Dr Boubou Cissé, a décidé d’engager contre la société minière, les voies de recouvrement forcé : saisie des comptes bancaires et fermeture du siège pour non-paiement d’impôts », selon notre confrère.
Ainsi, le ministère des finances, après plusieurs sommations infructueuses, a décidé de fermer les bureaux de la société minière Randgold pour non-paiement d’impôts et de saisir tous ses comptes bancaires. Objectif : se faire payer les 46,8 milliards de FCFA que Randgold doit à l’Etat malien, poursuit Info Matin. Raison : l’entreprise qui exploite les mines d’or de Loulo, Gounkoto et Morila doit à notre pays près de 47 milliards de francs CFA (80 millions de dollars d’impôts impayés.
Selon Mohamed Lamine Samaké, un conseiller du ministère des finances, interrogé par Reuters (version anglaise), les comptes bancaires de Rangold ont été saisis et l’État pourrait aller plus loin si, dans les 10 jours, Randgold ne s’exécutait pas.
Que dit Randgold ?
Randgold, qui n’a pas souhaité répondre à Reuters sur le sujet, contesterait les chiffres avancés par le ministère des finances. Dans son bilan d’activités 2015, publié sur son site internet, Randgold explique que « le groupe avait reçu des redressements pour divers impôts de l’État du Mali totalisant $280 millions (2014 : $313 millions). Après avoir consulté des experts, le groupe considère que les redressements n’ont aucune justification et aucun fondement et défend vigoureusement sa position, y compris en saisissant les voies légales de recours possibles pour ces litiges au Mali. En conséquence, aucune provision n’a été pourvue au titre de ces réclamations. Loulo, Gounkoto et Morila sont soumises à des conventions minières ayant force d’obligation garantissant la stabilité fiscale, qui régissent les impôts applicables aux entreprises et prévoyant un arbitrage international en cas de litige ne pouvant être résolu dans le pays. La direction continue de dialoguer avec les autorités maliennes au plus haut niveau pour résoudre ce problème. En 2014, Loulo a présenté auprès du Centre international pour le règlement des différends relatifs aux investissements une demande d’arbitrage contre l’État du Mali concernant certains des redressements fiscaux litigieux. Le processus d’arbitrage est en cours et des audiences ont résultat de ce processus est prévu se conclure dans le premier semestre de 2016 ».
Puisque le premier semestre 2016 est derrière nous. Où en sommes-nous ?
Devant le Tribunal arbitral
Selon Info Matin, Randgold a bel et bien usé de recours et astreint l’État du Mali devant le Tribunal arbitral. Elle a saisi le Tribunal arbitral de Paris sur trois contestations : IBIC (impôts sur les bénéfices industriels et commerciaux), TVA (taxes sur la valeur ajoutée) et divers impôts et taxes de services. Mais contrairement à ce qui est toujours sur son site, le « processus d’arbitrage » est terminé, depuis bientôt 4 mois, indique le quotidien.
Sur le premier point (IBIC), le tribunal arbitral de Paris a donné raison à Randgold et condamné l’Etat du Mali à payer à la société minière 19 milliards de FCFA que notre pays malgré la crise et les besoins exponentiels auxquels il est confronté s’est fait un devoir (honneur oblige) de payer intégralement à Randgold.
Sur les deux autres points, le Tribunal arbitral de Paris a débouté Randgold et condamné à payer à notre pays principalement 46,8 milliards, dont 42 au seul titre de Somilo.
Après plusieurs tentatives de recouvrement à l’amiable, face à la mauvaise foi de Randgold qui use de dilatoire, de fuite en avant, voire de chantage, l’État (qui a honoré tous ses engagements y compris le paiement de sa condamnation pécuniaire) est obligé et en bon droit d’user et de recourir contre la multinationale, à travers les voies d’exécution forcée : saisie des comptes bancaires et fermeture de l’établissement pour non-paiement d’impôts, poursuit le confrère.
Mark Bristow, nos sous !
Si les faits sont établis, le Directeur général de Randgold Mali, Mark Bristow, celui qui apparait dans les discours comme le plus africaniste de tous les blancs, doit changer le fusil d’épaule. Pour une multinationale comme Rangold, qui possède trois mines au Mali (Morila, Yalea, Gounkoto) une en Côte d’Ivoire (Tongon), une au Sénégal (Massawa) et une en RDC (Kibali), qui a fait en 2015 un chiffre d’affaires de 820 milliards FCFA pour un bénéfice net de 125 milliards FCFA, ce n’est pas très élogieux de brandir de faux prétextes pour refuser de payer ce qu’on doit à des pays pauvres pour l’exploitation de leurs ressources.
En effet, avancer que la fermeture du siège à Bamako mettrait en chômage des milliers de travailleurs dans les mines ressemble bien à une pirouette. Car selon nos informations, les trois mines continuent toujours de fonctionner et Randgold n’a surement pas intérêt à les voir fermer. Et pour cause ? Au 31 Mars 2016, Rangold disposait de 118 milliards FCFA de trésorerie. La mine de Morila lui aurait rapporté près de 1 175 milliards de FCFA depuis octobre 2000, selon notre confrère.
B. Daou