C’est ainsi que lui-même s’est mis à la disposition des agents, lesquels l’ont suivi jusqu’à Fana où des éléments de la Sécurité d’Etat sont venus à leur rencontre. Il sera interné sans nouvelles de sa famille dans ce lieu avant d’être transféré à Kati. Il fallait donc attendre le communiqué du 28 mai 2012 du procureur de la République près le tribunal de 1ère instance de la commune III du District de Bamako, Sombé Théra, annonçant l’ouverture d’une information judiciaire conte des officiers de l’armée notamment le colonel Abdoulaye Cissé. Selon le même communiqué, lui et les autres sont accusés d’ atteinte à la sûreté intérieure de l’Etat par l’emploi illégal de la force armée, associations de malfaiteurs, assassinats, coups et blessures volontaires, vol, détentions illégale d’armes de guerre et complicités.
En ce qui concerne le colonel Cissé, le juge d’instruction n’aura aucune peine à classer son dossier sans suite puisqu’il n’était pas à Bamako le jour « J ».Il n’a donc blessé personne encore moins tué quelqu’un ou militer dans une association de malfaiteurs. Tous ses camarades de promotion, qui le connaissent s’interrogent : Qui a donné l’ordre de l’arrêter ? Eux tous savent que l’un des plus braves d’entre eux, qui a fait les grandes écoles de guerre, de stratégie et géopolitique ne peut pas tenter un putsch et le manquer.
Ce sont ses camarades d’armes de l’EMIA et même de grins, qui dirigent aujourd’hui l’armée : le chef d’Etat major général des armées, Dahirou Dembelé, le chef d’Etat major de l’armée de terre, Ibrahim Fané (major de la promotion), le chef d’Etat major de la garde nationale, Daouda Sogoba, le directeur général de la gendarmerie, Djamou Kéïta. Ils sont très liés avec le colonel Cissé. Le samedi 28 avril, tous été aux côtés de ce dernier pour la célébration du mariage de sa jeune sœur. Et quarante huit heures après, il y a eu les évènements et sur ordre d’on ne sait qui, on demande son arrestation.
Plus tard, les langues se sont diluées et l’on a su que c’est bien le capitaine Sanogo qui a personnellement instruit son arrestation. Pour des raisons strictement personnelles, pour ne pas dire un simple règlement de compte. Parce que le Colonel Abdoulaye Cissé connu sous le nom de « Blo » avait refusé dans son camp la création du CNRDRE. Les éléments de ce comité se cachaient pour se réunir à Sikasso. Blo, lui prônait la discipline et le respect du règlement militaire notamment de la hiérarchie. Sans compter qu’il existe des vieux comptes avec le colonel Cissé que Sanogo a profité pour solder avec son ancien patron, qui s’était opposé à son passage de sous-officier en officier. N’eût été les nombreuses interventions, qui ont fait céder le colonel, Sanogo serait toujours sous-officier.
Dans un Etat de droit, le règlement de compte est une pratique indigne, peu recommandable. C’est pourquoi, le juge d’instruction, encore une fois de plus, n’aura aucune difficulté pour classer ce dossier sans suite. Encore que la seule chose qu’on lui reproche avec preuve matérielle est une communication qu’il a eue cinq jours avant les évènements avec le colonel Abidine Guindo, étiqueté comme celui qui a commandité le contre-putsch. Cet appel, il l’a effectué au sein de l’Etat major général et devant témoins dont l’actuel ministre de la défense, le colonel – major, Yamoussa Camara. C’était pour demander à Abidine Guindo de libérer un officier que les éléments de son camp avaient pris en otage. Ce qui a été fait grâce à son intervention. Voilà l’alibi tout trouvé pour dire qu’il serait en intelligence avec Abidine Guindo pour perpétrer un contre- putsch.
Le capitaine Sanogo et ses hommes avaient peur du colonel Cissé. Ils n’étaient pas tranquilles parce que connaissant bien les qualités de l’homme, ils se disaient qu’à tout moment, il pourrait jouer contre eux. Ils ont donc paniqué en profitant de l’aventure d’Abidine Guindo. Hors, en droit, la peur n’est pas un argument qui convainc un juge.
Vivement donc que l’interrogatoire au fond débute afin que le juge d’instruction réhabilite le colonel Cissé, que les populations du nord réclament sur le front. Cet officier émérite, spécialiste de la lutte contre le terrorisme, a beaucoup contribué à la résolution de la rébellion des années 90, sous les ordres de Kalifa Kéïta, général de son état aujourd’hui. Ce dernier qui dirigeait le PC opérationnel de Gao l’avait même positionné. Mais, le coup d’Etat, le plus imbécile de l’histoire africaine a gâté les choses.
Brave, téméraire, volontariste, le colonel Cissé s’était même proposé après le putsch, pour monter au front. Il voulait aller sur Tombouctou et Didier Dacko sur Gao. Deux attaques simultanées sur les deux villes. Malheureusement, les nouvelles autorités se sont opposées à cette initiative. Et la question du nord du Mali, qui a justifié le putsch, semble être oublié par le capitaine Sanogo.
Chahana Takiou
22 Septembre