Quand l’ambassadeur du Mali ‘’vole ’’ ses employés.

 

des frais de recouvrement forcé ou à défaut, par voie judiciaire avec une majoration de 25% du montant de la créance conformément à la lettre de notification du prêt que vous avez signé » Incompréhension, stupéfaction, incertitude… Les trois agents Ibrahima Katilé (régisseur adjoint), Mme Mariam Tangara (secrétaire) et Salah Dicko (informaticien) n’en revenaient pas. D’autant plus que tous les mois depuis le 28 juillet 2011 leurs salaires sont délestés de 373 euros (254 000 FCFA), sans justificatifs, pour le remboursement des crédits contractés auprès de la BMS S.A. aveu de culpabilité En effet, après avoir assuré le versement des premières mensualités à la BMS SA, l’ambassadeur qui retient les prélèvements à la source sur les salaires aurait gardé les sommes par devers lui, soit l’équivalent de 7 000 euros (4, 5 millions de francs CFA) par agents, malgré les divers relances et avertissements de l’institution financière. En déclassant leurs crédits, la banque réclame
aux agents concernés le remboursement immédiat de la somme de 25 951 677 FCFA, à défaut la transmission de leurs dossiers aux autorités judicaires.

Abasourdis par cette situation, les agents consulaires ont demandé à voir l’ambassadeur pour des explications.
La rencontre qui a eu lieu le 19 juillet 2013, fut tout sauf cordiale. Boubacar Sidiki Touré qui n’a presque laissé personne parler a tout assumé non sans accuser ses services comptables de n’avoir pas fait le travail.

Pour lui, l’argent qui n’a pas été versé à la BMS SA se trouve bel et bien à l’Ambassade, mais dans un compte.
Il a promis dès le lendemain de faire un chèque à la banque pour régler définitivement cette affaire qui concerne aussi d’autres agents au niveau de l’Ambassade. Notamment Baya Sylla (chauffeur) et Mme Fatim Diawara (ex-agent
consulaire actuellement à l’Unesco). Les sommes détournées seraient de 47 000 euros. Le chef de la diplomatie
malienne à Paris ne fera rien malgré sa promesse ferme.

La situation est restée bloquée. Le 30 août dernier, les agents consulaires ont été obligés de lui rappeler ses
propos dans une correspondance dont la teneur est sans équivoque. « Nous venons par la présente lettre, demander la restitution des sommes correspondantes aux échéances retenues sur nos salaires, mais qui n’ont pas été versées à la BMSSA… Suite à notre rencontre du vendredi 19 juillet 2013 à 11h00, heure française, vous nous avez informé de la disponibilité dans vos comptes du montant des échéances en question. Et la responsabilité incomberait à vos services, qui n’ont pas assuré les versements réguliers des sommes retenues pour honorer les contrats de crédit immobilier auprès de la BMS SA », écrivent-ils.
Selon nos informations, la situation n’est pas aussi simple qu’il y parait. L’ambassadeur serait à couteaux tirés
avec son comptable Ibrahima Tandia sur la gestion du compte qui est censé abriter les sommes détournées.

L’agent comptable ne comprends pas pourquoi des sommes destinées à la BMS SA dans le cadre de la gestion des crédits privés se sont retrouvés dans les comptes de l’Etat malien. Et pour cette raison il refuse d’apposer sa signature sur tout chèque qui servirait à sortir de l’argent des caisses de l’Etat pour des motifs inavoués.

imbroglio financier

Pour comprendre l’imbroglio financier dans lequel ces agents sont empêtrés, il faut remonter à l’année 2010. Dans la ferveur de la cession des logements sociaux au Mali, les agents consulaires avaient démarché l’ambassadeur Boubacar
Sidiki Touré pour en bénéficier. Profitant de l’occasion ce dernier leur a expliqué que les critères d’attribution des logements sociaux sont beaucoup plus contraignants et que par contre il peut leur amener des promoteurs immobiliers à des conditions plus avantageuses. C’est ainsi que sans appel d’offres ou autre forme de concurrence des contrats individuels furent signés le 11 octobre 2010 entre la Sopromac-Immobilière- SA et une trentaine d’agents de l’Ambassade et du Consulat. Selon les termes de l’accord, la Sopromac-Immobilière SA s’engage à construire des logements de type F4 à Yirimadio sur des superficies allant de 250 à 300m2 dans un délai de six mois. Les bénéficiaires contractent des prêts immobiliers d’un montant minimum de 17,4 millions de FCFA (26 527 euros) sur dix ans auprès de la BMS SA qui est le partenaire financier. Cependant, ils doivent rembourser plus de 29 millions de FCFA (44 754 euros) dont plus de 10 millions d’intérêts pour la
Banque Malienne de Solidarité.

Ce montage financier ne tardera pas à être dénoncé par certains agents.

Selon une correspondance de la BMS SA, les travaux ont commence le 13 avril 2011 et la livraison des logements
étaient prévue en septembre de la même année. Premier couac : en octobre 2012 soit seize mois après la date supposée de finition des travaux les clés n’étaient toujours pas remises aux agents. Pis, la Sopromac-Immobilière SA réclame aux bénéficiaires des logements le paiementd’un surplus de 1 360 971 FCFA sous prétexte d’une augmentation de la surface des toilettes qui passe de 2,5 à 3m2. Des fissures et des malfaçons sont observées partout dans les bâtiments par ceux qui les visitent, les bénéficiaires ont le sentiment d’être grugés.

Pendant ce temps, les prélèvements sont effectués à la source sur les salaires des agents qui ont demandé en vain des justificatifs à l’ambassadeur. Excédés par cette situation, huit agents du Consulat dont Ibrahima Katilé, Mme Sy Kadidia Haidara (secrétaire particulière du consul), Abdoulaye Traoré (chauffeur), Mme Mariam Tangara, Sidy Fofana (huissier), Mamadou Diarra (informaticien), Amadou Soumaoro (guichetier)et Salah Dicko introduisent une requête au tribunal de Kati pour l’annulation de leurs contrats. Après avoir été débouté par le tribunal de Kati (verdict du 14 juin 2013), les requérants ont interjeté appel. Mais cette première action judiciaire a permis aux agents consulaires d’obtenir un compromis avec la Sopromac-Immobilière SA et la BMS SA.

Il a été décidé de vendre les maisons et de rembourser ceux qui contestent leurs contrats. Malgré cela, les prélèvements continuentencore surleurs salaires au niveau de l’Ambassade à l’exception des trois agents qui ont eu leurs sous détournés. Mais qui paiera leur argent volé qui n’est jamais arrivé dans les comptes de la BMS SA ?

R. Autra, Paris France

LA VOIX DU MALI 2013-09-28 17:37:03