Le projet d’irrigation d’Alatona est constitué de deux grands volets : la route Niono-Goma Coura et l’aménagement du périmètre irrigué d’Alatona. Destiné pour un système intégré de développement, le projet d’irrigation comporte plusieurs composantes qui se déclinent en activités. Il s’agit d’activités routières, d’irrigation, foncière, communautaire, agricole et financière. Du 16 au 18 mars 2011, une mission du MCA-Mali s’est rendue sur le terrain et a constaté qu’au-delà de la poursuite des grands travaux, les résultats d’exploitation de la première campagne à l’actif des populations réinstallées dans la zone donnent de l’espoir. Le projet d’irrigation d’Alatona est un ambitieux plan de développement exécuté par le Programme du Millenium Challenge Account-Mali (MCA). Cette mise en œuvre se fait grâce à une convention de financement du gouvernement américain à travers le Millenium Challenge Corporation (MCC) pour un coût global de 234,6 millions de Dollars Us, soit 122,3 milliards de Fcfa. Cette convention vise à réduire la pauvreté par la croissance économique en augmentant la production et la productivité agricole des petites et moyennes entreprises agricoles.
Financé sur cinq ans (Septembre 2007 à Septembre 2012), le projet vise à aménager une superficie brute de 16 000 ha de terres (périmètre hydro-agricole) à Alatona, ce qui représente selon le Directeur dudit Projet, Boubacar Mamadou Ndiaye, une augmentation d’environ 20 % des superficies actuelles aménagées de la zone Office du Niger. Il comporte également la réhabilitation/construction d’une route nationale (RN33) reliant Niono à Goma Coura, sur 81 km, dans la zone de l’Office du Niger. L’objectif assigné au projet d’irrigation d’Alatona est de prendre en compte l’accroissement de la production et de la productivité à travers l’amélioration du régime foncier, la modernisation des systèmes de production irriguée, l’atténuation des incertitudes d’une agriculture de subsistance et par conséquent, l’augmentation des revenus des paysans et la réduction du coût des transports. « Le projet d’irrigation d’Alatona est aussi l’introduction de nouvelles pratiques dans les domaines de l’agriculture, de la gestion des crédits et de l’eau, ainsi que des reformes politiques et organisationnelles destinées à réaliser le potentiel de l’Office du Niger comme moteur de la croissance économique. Une initiative qui permet au Mali d’asseoir son ambition de puissance agricole dans la sous région », a expliqué le Directeur des activités foncières du MCA, Ousmane Traoré qui dirige le Bureau des Cadastres de Niono, en charge des dossiers de titres fonciers que comporte le MCA.
Situé à quelque 170 km de la capitale régionale Ségou, en plein cœur de l’Office du Niger, le projet d’Alatona est bâti sur le système hydraulique de Kouroumari desservi à partir du Canal du Sahel.
Le projet nécessite la construction d’un pont franchissement et d’une bretelle de 2 km, reliant le centre du secteur de Dogofry au périmètre aménagé d’Alatona, et dont les travaux qui ont été visités évoluent normalement. La réalisation de diverses actions sociales comme les pistes intérieures, des mesures environnementales, la réinstallation involontaire/compensation et la sensibilisation sur le Vih/Sida sont des activités prévues.
La visite a commencé par les installations du dragage (B03) au niveau du canal de Sarkala, dont les travaux ont démarré en février 2010 et doivent finir en février 2012. Les travaux ici visent l’enlèvement du merlon central du canal adducteur amont sur 9km. Un peu plus loin, en aval du Point ‘’A’’ le projet d’irrigation nécessite un élargissement du canal du Sahel sur 23 km. Ce n’est pas tout explique Boubacar Mamadou Ndiaye, Directeur du Projet d’irrigation d’Alatona, qui cite la réhabilitation des ouvrages régulateurs des points ‘’A’’ et ‘’B’’, le rehaussement des berges du Fala de Molodo sur environ 18 km, la réhabilitation/construction du canal adducteur de Alatona sur 8, 5Km.
S’ajoute la construction du canal distributeur d’Alatona sur 23 km, du réseau d’irrigation secondaire et tertiaire aussi bien que le réseau de drainage correspondant du périmètre d’Alatona. Un autre aspect important du projet, explique Boubacar Mamadou Ndiaye, concerne l’appui à la gestion de l’eau à l’Office du Niger par la mise en place d’un système de télémétrie (mesure des débits et plans d’eau à distance) permettant une gestion mieux contrôlée de l’eau.
« La réalisation de ces travaux permettront de renforcer et d’augmenter la capacité du réseau hydraulique principal de l’Office du Niger de 180 m3/s à 286 m3/s et rendra possible d’autres projets d’aménagement hydro agricole dans cette zone nourricière du pays.
Les Pap d’Alatona La mise en œuvre du projet d’irrigation d’Alatona a affecté 33 villages et hameaux relevant des communes rurales de Diabaly et de Dogofry. On les appelle les populations affectées par le Projet d’Alatona (Pap). Le MCA-Mali a élaboré un plan d’action de réinstallation de populations affectées par le projet. Une partie de ces populations a déjà emménagé sur les sites de réinstallation, dont les villages de Beldenadji et de Wellengara qui ont été visités par la mission du MCA-Mali, lors de cette mission de trois jours. Les populations ont bénéficié des infrastructures sociales pour l’habitat, des points d’eau potable, des écoles, des marchés publics, des magasins de stockages de produits agricoles, de l’électricité, des plateformes multifonctionnelles, de l’amélioration des conditions sanitaires. La mission a visité un Cscom réhabilité à Dogofry et un autre nouvellement construit à Diabaly.
Pendant la première année de production agricole, campagne 2010/2011, un équipement complet de démarrage est offert gratuitement aux Pap, composé d’une charrue, d’une paire de bœufs, d’une charrette, d’une herse, des semences de riz, d’échalote, de l’engrais, des sacs vides pour les premières récoltes de ces spéculations. « L’objectif étant le développement intégré de la zone du projet, il s’agit d’apporter une contribution concrète à ces populations en vue d’améliorer leurs conditions de vie et de créer des emplois saisonniers et permanents durables », a souligné le Spécialiste en réinstallation des populations affectées par le projet d’Alatona, Mahamadou Ahmadou Maïga.
Le village peul de Wellengara est sans doute un témoignage, la preuve que le développement durable en milieu rural est possible. La banque de céréales du village bondée de sacs de riz de la meilleure qualité attestée par la bourse des céréales, l’école qui reçoit tous les enfants du village, l’eau potable et l’énergie solaire sont des indices qui ne trompent pas. Nous avons été édifiés en chantant, avec ces enfants, l’hymne national autour du drapeau national. Le chef de village Bedari Coulibaly ne pouvait que dire sa fierté d’un homme qui refait la vie à l’instar de toute sa communauté peul. La disparition du couvert végétal par les travaux d’aménagement a conduit à la prise en compte dans le projet d’une campagne de reboisement compensatoire au niveau des sites de réinstallations villageois.
Nouvelle vie pour les communautés
Le Projet d’irrigation d’Alatona apporte des innovations dans la gestion du foncier à l’Office du Niger car il y est prévu désormais la création des titres fonciers destinés aux populations affectées par le projet (Pap). Le Directeur des activités foncières d’Alatona, Ousmane Traoré, amplifie, le mieux qu’il peut, cette originalité du projet grâce à une volonté personnelle du président de la République. « Plus de 22 000 ha ont été désaffectés de l’Office du Niger pour les affecter à la présidence de la République, précisément au Président ». Il n’y a donc pas de doute à ce niveau, c’est le Président Amadou Toumani Touré qui a voulu cette innovation : faire des paysans les propriétaires de leur champ, les parcelles qu’ils cultivent, contrairement à la pratique habituelle à l’Office du Niger.
Pour cette campagne 2010, les parcelles ont été attribuées à 200 concessions des personnes affectées par le projet. Outre la création de titres, les travaux du Bureau des Cadastres de Niono, dirigé par Ousmane Traoré comprennent l’éducation aux droits fonciers à travers laquelle les producteurs sont formés à la compréhension de la propriété foncière privée, les droits et responsabilités, ainsi que les avantages liés à la propriété foncière.
Outre l’amélioration du système de cadrage des parcelles, la nouvelle donne nécessite la création de nouveaux organes comme une commission spéciale chargée de la distribution des terres avec des titres fonciers, et aussi une autorité foncière pour le recouvrement et la gestion des revenus fonciers, le paiement des titres échelonnés sur 20 ans.
Selon Ousmane Traoré qui est revenu sur les innovations au cours d’une conférence de presse que la mission du MCA-Mali a donnée à la base de vie de Diabaly, « chaque concession de personnes affectées par le projet bénéficiera de 5 ha dont 2 ha à titre gratuit, en compensation des droits coutumiers que le propriétaire de la concession détenait sur les terres qu’il occupait ; et 3 ha à payer sur une durée de 20 ans ». En outre, les femmes de chaque concession Pap auront une parcelle de 500 m2 pour le maraîchage. Elles peuvent également se regrouper au sein d’associations villageoises pour bénéficier de titres fonciers sur des parcelles maraîchères au nom de leur organisation.
B Daou
Le Républicain 21/03/2011