Processus de paix au Mali: La CMA rejette la charte pour la paix

Hier mardi 20 juin 2017, Baba Akhib Haidara, le président de la Commission d’organisation pour la rédaction de la Charte pour la paix a remis, solennellement, la charte de la paix à Ibrahim Boubacar Kéita, le président de la République Ibrahim Boubacar Kéita. A peine réceptionné par le président de la République, le document a été rejeté par la Coordination des Mouvements de l’Azawad(CMA). Selon la Coordination des ex mouvements séparatistes, le document final qui leur est « parvenu est malheureusement le même projet de charte qui a été exposé pendant les missions de concertations sans aucune prise en compte des recommandations issues de ces missions.»

La Charte pour la paix, l’unité et la réconciliation au Mali, l’objectif de la Conférence d’entente nationale tenue du 27 mars au 2 avril à Bamako, a été officiellement remise hier mardi à Ibrahim Boubacar Kéïta, le président de la République du Mali. Au moment de recevoir le document, IBK s’est réjoui en ces termes : « Le train de la paix avance, il avance avec assurance, et confiance en dépit des difficultés inhérentes à tous processus du même genre, la charte pour la paix, l’unité et la réconciliation nationale me réconforte dans ma foi en la paix, je suis heureux de vous le dire, elle est pour nous une option stratégique à laquelle il ne saurait y’avoir aucune alternative et pour laquelle nous sommes prêts à consentir toutes les concessions, par ce que c’est elle seule qui permet de garantir la pérennité, la stabilité , la cohésion et la capacité de notre nation à restaurer sa grandeur , son dynamisme et son apport qualitatif au Monde , oui le Mali vient de loin , le Mali a existé brillamment et le Mali existera brillamment, grâce à l’apport de fils et de filles comme ceux auxquels nous devons aujourd’hui ce document.» A peine quelques heures après ces mots de réjouissance du président IBK, la Charte sera rejetée, à travers un communiqué, par la Coordination des Mouvements de l’Azawad(CMA). « La CMA rejette la présente charte qui ne saurait nullement l’engager dans son format actuel ». Selon la CMA, le document final qui leur est « parvenu est malheureusement le même projet de charte qui a été exposé pendant les missions de concertations sans aucune prise en compte des recommandations issues de ces missions. « La CMA constate malheureusement que malgré les sacrifices et les concessions consentis par elle, il y a un déni radical et systématique de la part de l’Etat de la problématique de l´Azawad telle que formulée par les populations durant tout le processus. Cette prise de position gouvernementale est loin de concilier les parties et par conséquent n´a aucune chance d´aboutir á une entente encore moins á la paix et l´unité nationale », indique, dans son communiqué, la Coordination des ex rebelles.

L’impasse

En plus de cette nouvelle cassure dans le processus de paix au Mali, le retour de l’administration malienne avant le 20 juin n’a pu s’effectuer malgré les assurances données, en début de mois, par le président du Comité de Suivi de l’Accord (CSA), les autorités maliennes et les responsables de la Coordination des Mouvements de l’Azawad (CMA). En effet, le 6 juin passé, à l’issue des travaux de la 18e session du Comité de suivi de l’accord de paix issu du processus d’Alger, Ahmed Boutache, le président dudit comité, annonçait le retour des Forces armées maliennes (FAMa) avant le 20 juin à Kidal. Un jour après, le 7 juin, Ibrahim Ould Sidatti, le représentant de la CMA au sein du CSA, confirmait les propos du diplomate algérien : «Nous avons un chronogramme, une ambition, nous sommes en train de travailler avec le gouvernement pour amener les autorités intérimaires aussi bien que le gouverneur et toutes les institutions étatiques à Kidal. On s’est fixé le 20 juin… » Et à la surprise générale, la CMA informait, le 12 juin passé, qu’elle n’était nullement engagée par le Chronogramme du retour de l’administration à Kidal avant le 20 juin 2017. « Ce document est loin de refléter le résultat des pourparlers convenus entre la CMA et les différents acteurs impliqués dans l’établissement du programme du retour de l’administration à Kidal », expliquait Ilad Ag Mohamed, le porte- parole de la CMA.

Deux ans après que les ex rebelles de la CMA aient accepté de signer l’accord pour la paix et la réconciliation au Mali avec le gouvernement malien, le processus de paix est dans l’impasse. Malgré l’installation officielle des autorités intérimaires, Kidal est toujours interdit aux autorités maliennes. Le gouverneur de la région de Kidal est installé à Gao. Les réfugiés et les déplacés ne sont pas encore de retour. Le MOC (Mécanisme Opérationnel de coordination) et le DDR (Démobilisation, Désarmement et Réinsertion) ne sont pas encore tout à fait opérationnels. Ces deux mesures de l’accord sont d’ailleurs aujourd’hui devenues source de problèmes à Gao où des éléments du MOC sèment la terreur. Ils s’en prennent aux populations civiles et volent des véhicules du MOC. Les conflits meurtriers entre les groupes armés continuent. Pire, les attaques terroristes et les conflits intercommunautaires deviennent récurrentes.

Madiassa Kaba Diakité