Depuis plusieurs semaines, Me Tall, désormais ex-conseil de Babani Sissoko, avait saisi le tribunal de la commune II pour lui demander de designer des experts graphologues pour dire si, oui ou non, des signatures contestées par Babani dans l’affaire qui l’oppose à Me Tall sont les siennes. Le jugement de cette affaire doit être rendu le 31 octobre. Au lieu d’attendre celui-ci, le député de Dabia a rapidement saisi un autre tribunal, celui de la commune VI, pour accusé Me Tall d’escroquerie et d’imitations de signatures. Avant d’exposer l’affaire sur la place publique. Notre enquête.
Selon nos investigations, l’affaire remonte en 2004. Cette année là, Babani Sissoko cherchait un partenaire-actionnaire pour l’hôtel Mariétou Palace. Au même moment, il était visé par un mandat d’arrêt international et pourchassé par une meute de créanciers. Certains d’entre eux pratiquaient des saisies sur ses biens.
Son principal créancier, Boubacar Djigué, avait demandé l’assistance de la force publique afin de l’expulser de sa maison, à l’hippodrome. En vain.
Député à l’Assemblée nationale, Babani Sissoko est donc allé voir le 1er vice -président d’alors, Me Mountaga Tall, pour lui prodiguer des conseils. Après des échanges et moult propositions, l’ex – milliardaire décide de vendre l’hôtel Mariétou Palace pour payer ses nombreux créanciers. Ceux-ci ne faisaient du tout plus confiance en Babani et exigeait que Me Tall s’engage personnellement à les désintéresser dès la vente de l’hôtel pour laquelle il conseillait Babani.
Faisons l’économie des péripéties de la vente de l’hôtel, acheté par Kadhafi. Ce dernier a déboursé trois milliards de nos francs pour l’acquisition de l’immeuble, situé au bord du fleuve Niger, à la Rive gauche du Pont des Martyrs.
L’élu de Dabiya (village natale de Babani Sissoko) avait déjà autorisé le paiement à Me Tall, par le notaire chargé de la vente, de la somme de 700 millions de nos francs, représentant les honoraires et les montants à payer aux différents créanciers.
Tous ont été payés le jour même où le notaire a mis le pactole à la disposition de Me Tall. Excepté Boubacar Djigué. Celui-ci, par le biais de son avocat, a refusé par écrit le montant de 257 millions de FCFA qui lui était dû et qu’il avait auparavant accepté. Il réclamait désormais un milliard de FCFA. Il se trouve que Me Tall n’a pas reçu un tel montant pour le lui remettre. Les 257 millions de FCFA sont donc restés entre les mains de Me Tall en attendant un dénouement.
Sachant que cette somme est entre les mains de l’élu de Ségou, Babani Sissoko, toujours propriétaire des fonds, faisait des ponctions. Mais Tall prenait le soin de lui faire signer une décharge. Souvent, il envoyait son fils Fily Sissoko pour retirer des sous. La même décharge était exigée par Me Tall.
Seulement voilà : aujourd’hui, traqué de nouveau par Boubacar Djigué, qui veut l’expulser de sa maison, Babani Sissoko se décharge sur Me Tall et conteste ses propres signatures. Son fils fait la même chose. Les deux accusent Tall d’imitation de signature. Un acte gravissime pour un avocat, député, doublé d’homme politique de renommée internationale. C’est la toute première fois que Me Tall, homme publique depuis 20 ans, est confronté à une telle accusation.
Chose inadmissible pour celui qui entend diriger demain ou après demain le Mali. C’est pourquoi, il a vite fait de saisir le tribunal de la C II afin qu’il désigne des experts graphologues pour vérifier si les signatures sont celles de Babani, oui ou non.
Voilà le premier volet de l’affaire Me Tall contre Babani Sissoko.
Le deuxième porte sur des ventes de terrain. En effet, acte notarié à l’appui, le président du CNID affirme que Babani lui a vendu six lots au bord du fleuve Niger et qu’il n’en est jamais entré en possession. Mieux, selon lui, menacé de prison par un créancier, Babani est venu le supplier, en pleurs, de lui restituer 2 terrains à 40 millions de FCFA pour lesquels il avait trouvé des acquéreurs pour 80 millions. Il devrait ainsi pouvoir désintéresser ses créanciers à hauteur de 40 millions et reverser le reliquat à Me Tall. Le pire est que Babani a revendu chacun des terrains à 3 voire 4 personnes différentes.
Me Tall a donc demandé également au tribunal de la CII la désignation d’un expert pour dire, au vu des actes notariés, si Babani lui a vendu 6 terrains et s’il a pu entrer en possession de ces derniers. De même, l’expert désigné par le tribunal devra faire ressortir la valeur actualisée des terrains et les différentes ventes effectuées par Babani sur chaque lot.
Enfin, le dernier volet de cette affaire est relatif aux honoraires que Babani a payés à Me Tall. Ce dernier a juste demandé au même tribunal de provoquer l’arbitrage du bâtonnier de l’Ordre des avocats, lequel dira si les «honoraires sont justes, insuffisants ou exagérés».
Voilà toute l’affaire en trois volets. Au regard de ces éléments et sans anticiper sur le jugement du tribunal, dans 15 jours, il apparait clairement que s’il y’a un escroc dans cette affaire, c’est bien Babani Sissoko. Son passé peu récent et ses nombreux créanciers prouvent, à suffisance, que Babani Sissoko n’est pas un homme crédible. C’est un escroc international, qui se retourne aujourd’hui contre ceux qui l’ont aidé à mieux organiser sa vie et à éviter la prison.
Chahana Takiou
La Redaction 22 septembre 18/10/2012