L’annonce à la mi-avril de la date des prochaines échéances électorales aura été vécue par beaucoup de Maliens comme un grand ouf de soulagement.
Les premiers tours de la présidentielle et des législatives auront lieu le 27 février 2022, et d’éventuels seconds tours respectivement les 13 et 20 mars.
Celles-ci seront précédées par un référendum constitutionnel prévu le 31 octobre 2021.
Cela voudrait dire qu’à terme, le Mali retrouvera la normalité institutionnelle et que les militaires putschistes devront rentrer dans les rangs.
Mais justement, c’est ce dernier point qui inquiète plus d’un.
Après avoir tutoyer les sommets de l’Etat, pourront-ils et surtout voudront-ils se fondre dans la moule de la grande muette sans faire aucun bruit ?
Seront-ils vraiment dénués de tout pouvoir politique ?
Le Mali aura, semble-t-il, adopté le réflexe malsain des coups d’Etat à répétition comme tentative de résoudre les nombreux problèmes qui l’assaillent.
Certes, il est une vérité implacable qu’en général, un putsch n’est jamais anodin et qu’il survient après l’échec du régime politique en place surtout sous nos tropiques, mais il est une autre vérité toute aussi vraie.
C’est qu’un putsch aussi légitime soit-il ne peut être la solution miracle à tous les maux, surtout s’il n’est suivi d’aucun plan de sortie de crise et d’une vision claire et précise de l’architecture prochaine des rouages du pouvoir.
Oui, tout à fait ! L’après putsch ou encore l’après révolution est plus importante que l’évincement du régime en place.
Ce réflexe que nombre de Maliens semblent avoir assimilé, celui de réclamer le départ immédiat et sans délai du président en place est à peine un coup d’Etat déguisé.
Certes ce scénario ne s’est produit qu’une seule fois à la faveur des soulèvements du M5 RFP et alliés, mais il est survenu après le putsch du 22 mars 2012, donc seulement à neuf ans d’intervalles.
Ce qui est point glorieux pour un pays qui se veut démocratique surtout lorsqu’on sait qu’il y eu deux autres coups d’Etats, l’un qualifié de civil et légitime, l’autre de militaire et d’oppressif.
Cependant, il faudrait éviter que le fauteuil présidentiel au Mali soit comparable à un siège éjectable.
Que Koulouba ne soit pas à la merci du premier grand soulèvement populaire ou d’une simple mutinerie.
Les Maliens devront comprendre que, peut-être, le véritable combat se situe pendant les échéances électorales, dans les urnes et les bureaux de vote, et non forcément dans la rue.
D’ores et déjà, les prochaines autorités politiques devront gérer les cas des anciens putschistes.
Que faudra-t-il faire d’eux, de la bande à Assimi Goita mais aussi de celle de Haya Sanogo ?
Autant de questions pour l’heure sans réponse. Mais, il faudra éviter d’enfanter un autre putsch à l’avenir.
A chaque interruption brutale de pouvoir, tout est remis à zéro, surtout les maigres progrès réalisés.
C’est aussi le lieu pour la classe politique de se montrer plus responsable, et d’éviter l’effet placebo en matière de politique.
Car le mal-être du pays va bien au-delà d’une seule personne, fut-il le président de la République.
C’est tout le système qu’il faut revoir, et toute une mentalité à changer.
Ahmed M. Thiam