Politique : LE RÈGNE DES APPRENTIS SORCIERS

Le pays est « mélangé » et la confusion est telle qu’on en est à se demander si les hommes politiques maliens sont à la hauteur. Difficultés dans la mise en œuvre de l’Accord pour la paix. Actes terroristes sanglants. Contestation par l’opposition d’une élection présidentielle pourtant validée par la Cour Constitutionnelle et reconnue par la Communauté internationale. Mouvements sociaux intempestifs plus proches de l’anarchie et de la défiance que de l’exercice d’un droit. Et quoi encore ?
IL FAUT ÉVITER LA CONFUSION ENTRE GOUVERNEMENT ET ETAT
L’Etat est constitué de trois entités : un territoire, une population et un pouvoir politique. Le pouvoir politique lui-même se compose de l’Exécutif, du Législatif et du Judiciaire. Le gouvernement n’est qu’une composante du Pouvoir Exécutif dont le détenteur exclusif reste le président de la république. Malheureusement, c’est le gouvernement qui est visible sur le terrain dans la gestion de la crise multidimensionnelle que le pays traverse, alors qu’il ne peut à lui seul y mettre fin, sauf à perpétuer le mythe de Sisyphe et prolonger la souffrance des populations. La mission du gouvernement dans un pays en crise est de prendre des initiatives fécondes. C’est pourquoi, le nôtre doit sortir de son tête-à-tête stérile avec l’opposition d’une part et avec les groupes armés d’autre part pour donner, dans le cadre de la recherche d’une solution pérenne, plus d’espace et de rôle à la société civile qui doit nécessairement s’approprier l’Accord afin d’en faciliter la mise en œuvre. En outre, l’onction des représentants du peuple (Députés) est un moyen de légitimation dont il ne faut pas faire l’économie. Enfin, dans le vote des résolutions sur le Mali, le Conseil de Sécurité ne doit pas oublier que certaines mesures relèvent certes du gouvernement mais que d’autres, et notamment les plus importantes, font appel au peuple souverain du Mali. Ne pas en tenir compte, c’est compromettre le processus de paix. Pendant ce temps, que fait l’opposition politique ? Elle ressasse  la même rengaine, abuse des marches en faisant semblant d’oublier que la page de l’élection présidentielle est tournée et que les Maliens vaquent désormais à d’autres occupations. Est-ce le signe d’un manque d’imagination, d’un profond désarroi ou des deux ? Les circonstances du vote de la loi organique prorogeant le mandat des Députés viennent de mettre au grand jour l’isolement du chef de file de l’opposition.
EN PANNE D’IDÉES, L’OPPOSITION S’ÉGARE DANS DES MARCHES
Existe-t-il une opposition politique au Mali ? Peut-être dans la forme mais pas au sens républicain du terme car, les notions de majorité et d’opposition sont devenues à géométrie variable, chaque homme politique pouvant se retrouver dans l’un ou l’autre camp en fonction des contingences du moment. Pour s’en convaincre, la plupart des ministres sortis du gouvernement ainsi que des fonctionnaires ayant perdu leur place se sont découvert du jour au lendemain un destin de présidentiable. Le peuple qui n’est pas dupe les a sanctionnés sans état d’âme mais comme la honte ne tue plus au Mali, ils ont survécu. Certains continuent même de blablater. En fait, tout n’est pas sombre dans cette affaire car la jeunesse consciente est en train d’apprendre à leurs dépens ce qu’est le sens de l’honneur et de la dignité. Le gouvernement doit dialoguer avec l’opposition, mais comment discuter avec quelqu’un qui inscrit son action en dehors du cadre républicain ? Chercher à avoir raison à tout prix n’est pas un signe d’intelligence politique. Bien que IBK ait gagné l’élection en 2013, c’est Soumaïla Cissé qui, en allant le féliciter à son domicile avait touché le cœur de nombreux Maliens. Et qu’a- t-il fait de ce capital de sympathie ? Il l’a tout simplement vendangé au lieu de prendre date avec son peuple comme IBK avait su le faire en 2002. Compte tenu des circonstances, il aurait pu initier avec d’autres cadres en 2013 une sorte de « Plan Marshall » pour sauver le Mali. Et il n’a pas été mieux inspiré en 2018. Les cadres de son parti doivent vivre un véritable drame. En effet, comment continuer à suivre un chef qui ne sait ni reconnaître les opportunités, ni en tirer profit et qui, sur le plan politique cumule à la fois les insuffisances de l’aveugle et du paralytique?
Le bon politique sait vendre son rêve à son peuple qui lui donne les moyens de le réaliser grâce aux élections. C’est pourquoi, devenir président de la république ne conduit pas nécessairement au paradis. On peut être utile à  tous les postes. Quel gâchis pour lui-même et pour son pays, qu’un haut cadre de la trempe de Soumaïla Cissé ne le comprenne pas !
Mahamadou Camara