Depuis plus de sept ans, le Mali traverse une crise multidimensionnelle, touchant tous les secteurs de la vie socioéconomique, voire politique du pays.
L’une des conséquences de cette crise a été sans nul doute la dégradation des réseaux routiers entrainant pour la première fois au Mali des émeutes des jeunes sur plusieurs axes réclamant une meilleure amélioration des conditions de vie et de travail.
Et pourtant, chaque année l’Etat consacre officiellement plusieurs milliards de francs CFA pour l’entretien des réseaux routiers sur toute l’étendue du territoire national, soit 25 395 Km dont 5 775 km de routes revêtues et 19 620 km de routes en terre.
L’argent officiellement débloqué est-il utilisé à bon escient ?
La transition ne pourrait-elle pas mener des réformes idoines pour un partenariat public- privé afin de bien gérer ce secteur vital pour notre économie, comme c’est le cas dans la plupart des pays voisins ?
Le Ministre Makan Fily Dabo, jouissant d’une bonne réputation et d’une longue expérience dans le département est interpellé pour donner à ce secteur toute la vigueur et toute la rigueur nécessaires pour que la route soit un vecteur de développement.
La route, en plus d’être un moyen de désenclavement est aussi un véritable vecteur de développement.
C’est pourquoi, les Etats consacrent une bonne partie de leurs budgets à la construction des routes et à leur entretien.
Le Mali qui s’est doté d’un important patrimoine routier de l’indépendance à nos jours, est à la traine dans l’entretien de ce patrimoine et pourtant il consacre beaucoup d’efforts financiers, avec l’aide des partenaires bilatéraux et multilatéraux, du moins officiellement.
Au Mali, pour cette année 2021, le budget de l’entretien routier s’élève à plus de 120 milliards de francs CFA.
Une somme conséquente, pour ne pas dire suffisante, si elle est réellement utilisée dans l’entretien des routes.
Selon nos informations, cette somme faramineuse sert, selon les régimes, à la construction des nouvelles routes ou autres infrastructures, reléguant l’entretien routier au second plan.
Pour rappel, depuis le 02 novembre 1993, une série de réformes institutionnelles visant à améliorer les performances de l’entretien routier ont été faites, lesquelles ont abouti à la création de l’autorité routière, AR en 2000 pour pérenniser le financement, la restructuration de la Direction Nationale des Travaux Publics en Direction Nationale des Routes, DNR et la création du service des données Routières, SDR en 2002 pour la planification, la programmation et la supervision.
Il y a eu également la création de l’Agence d’Exécution des Travaux d’Entretien Routier, AGEROUTE en 2004.
Cette restructuration cadre parfaitement avec la Directive Numéro 11 /2009/CM/UEMOA du 25 septembre 2009 portant sur l’harmonisation des stratégies d’entretien routier dans les Etats membres de l’organisation sous régionale.
Cette restructuration prône une organisation de l’entretien routier selon le principe de la séparation des rôles et des responsabilités des volets : financement, planification et programmation et enfin la mise en œuvre.
Comme pour dire que le Mali, à l’instar des pays de l’UEMOA, a des bons outils, sauf que ceux-ci ne servent pas à grand-chose, car avec l’alternance au pouvoir chaque régime vient avec ses programmes et sa vision.
Ils utilisent les fonds alloués à l’entretien routier pour construire des nouvelles infrastructures routières, ou pour d’autres travaux. De 2002 à nos jours tous les régimes qui se sont succédé ont mal géré les fonds dédiés à l’entretien routier, suscitant souvent des réactions violentes de la part des usagers qui constatent avec amertume une dégradation constante de leur environnement en général et des infrastructures routières de leur aire géographique.
L’espoir est-il permis de voir les choses changées positivement ?
Après le coup d’Etat du 18 Août 2020, le Mali traverse sa troisième transition.
Cette période étant celle des grandes réformes, il est attendu du département de transport et des infrastructures et tous les départements transversaux s’occupant de l’entretien routier des véritables réformes pour un plein épanouissement du secteur.
En effet, dans le gouvernement de Moctar Ouane, le département des transports et des infrastructures a à sa tête un ministre qui, en plus de sa longévité au département, connait le secteur de transport et des travaux publics.
Donc il est attendu de lui des réformes idoines permettant au secteur de l’entretien routier de respirer de l’oxygène.
Makan Fily Dabo, puisque c’est de lui qu’il s’agit, jouissant d’une bonne réputation d’homme de rigueur et d’expérience doit s’impliquer pour faire de ce secteur la vitrine du Mali, au grand bonheur des usagers de la route. Pour ce faire, il doit impliquer fortement le secteur privé.
Un bon partenariat Public- Privé impliquant les entrepreneurs privés dans la gestion du secteur évitera certains désagréments et permettra à l’Etat de renflouer ses caisses.
La question que beaucoup se posent est celle de savoir Pourquoi ne pas céder la gestion des Péages et des pesages aux entreprises privées pour que les recettes puissent aller au-delà du paiement des salaires des agents travaillant dans les différents postes ?
En tout cas pour éviter le quiproquo qui oppose actuellement les transporteurs à l’Etat, au sujet du prix au péage fixé par le Conseil d’Administration, le gouvernement doit se désengager de la gestion de ce secteur pour ne dépendre que des impôts, taxes et autres redevances payés par les entreprises acquéreuses, qui seraient obligées de respecter les clauses des contrats qu’elles auraient signé avec l’Etat.
Le Ministre des Transports et des infrastructures, Makan Fily Dabo a les coudés franches pour donner à ce secteur un nouveau souffle.
Et la période transitoire est la mieux indiquée pour ce genre de réforme.
En somme, sachant bien l’importance de la route dans le développement d’un pays, le Mali qui est mauvais élève dans la sous-région, doit mettre un accent particulier sur l’entretien routier dans le pays, car des routes bien entretenues permettront d’assurer la pérennité du trafic, c’est-à-dire permettre des conditions de circulation acceptables en toutes saisons.
Alors vivement des réformes adéquates pour des routes praticables en tous temps.
Youssouf Sissoko