En principe, c’est ce jeudi 5 février que le projet de loi instituant des mesures de promotion du genre dans l’accès aux fonctions nominatives et électives sera examiné par les élus de la nation à l’Assemblée nationale. Apparemment, à en juger par l’atmosphère au sein des groupes parlementaires, ce projet de texte est loin d’être la bienvenue à l’Hémicycle. Certains honorables craignent, à tort ou à raison, que ce texte ne les prive d’un second mandat. En effet, ce texte, qui sera présenté devant l’Assemblée nationale aujourd’hui, comprend trois précieux articles qui permettent pas à l’ensemble des députés de la 5e législature de revenir à Bagadadji. Son article 1 stipule que: «à l’occasion des nominations dans les Institutions de la République ou dans les différentes catégories de services publics au Mali, par décret, arrêté ou décision, la proportion de personnes de l’un ou de l’autre sexe ne doit pas être inférieure à 30%».
L’article 2 va plus loin: «à l’occasion de l’élection des députés à l’Assemblée Nationale, des membres du Haut conseil des collectivités ou des Conseillers des collectivités territoriales, aucune liste d’au moins trois personnes, présentée par un parti politique, groupement de partis politiques ou regroupement de candidats indépendants n’est recevable si elle présente plus de 60% de femmes ou d’hommes». Voilà tout le problème des députés maliens dont la plupart sont obnubilés par un second mandat. A titre d’exemple, prenons une circonscription électorale comme la commune IV qui dispose de deux sièges à l’Assemblée nationale. Au cours de cette mandature, elle est représentée par deux hommes députés à l’Hémicycle, tous élus sous les couleurs du RPM.
La question qui se pose, c’est de savoir parmi ces deux hommes qui va céder son siège à une femme. C’est tout l’enjeu des chaudes discussions au sein des différents groupes parlementaires à l’Assemblée nationale par rapport à l’adoption de ce texte. Face à la situation, certains proposent que son application soit différée après les prochaines élections législatives pour leur permettre de bénéficier d’un second mandat. D’autres, au contraire, sont favorables à ce que ce projet de loi puisse être adopté. Car, pour eux, c’est une promesse de campagne du Président de la République qui doit obligatoirement être exécutée.
Au-delà de ce combat politico-politicien, ce texte va faire peur également au puissant lobby des religieux, très peu enclins à accepter la gouvernance des femmes. Ce qui va amener les élus de la nation à réfléchir, mille fois, avant de voter ce texte.
C’est donc peu de dire que la tâche s’annonce périlleuse pour Mme Sangaré Oumou Bah, la ministre de la Femme, de l’Enfant et de la Famille, qui doit défendre ce texte devant l’Assemblée nationale. Mais femme à poigne qu’elle est, elle saura convaincre les députés pour voter ce texte. Elle pourrait notamment compter sur le soutien sans faille du Groupe parlementaire RPM qui dispose de la majorité absolue à Place de la République, à Bagadadji et sur l’appui d’ONU-Femmes et des ONG féminines. Elle avait déjà briefé les élus de la nation, au cours d’un atelier de sensibilisation et d’information, le jeudi 18 septembre dernier.
Cet atelier visait à informer les députés de l’esprit de la loi, de sa pertinence et de son champ d’application, en vue de réduire les zones d’ombres. Il visait à prendre en compte les aspirations des associations et ONGs féminines qui mènent le combat de la parité homme – femme dans l’accès aux emplois publics et aux postes électifs. En attendant d’atteindre cette parité, ce projet de loi représente incontestablement une avancée notoire.
Youssouf Diallo
Source: Le 22 Septembre 2015-02-05 19:24:02