PILOTAGE DE LA TRANSITION : Le temps joue contre Choguel !

La prolongation de la transition est-elle actée dans la tête du Premier ministre Choguel Kokala Maïga ? Rien n’est moins sûr.

Dans tous les cas, le super héros de la contestation du régime d’Ibrahim Boubacar Kéita passe plus de temps dans des rencontres et des voyages souvent inutiles qu’à réellement aborder les défis de la Transition.

 

La sécurité, les réformes politiques et institutionnelles et l’apaisement de la tension sociale ! Voilà les principales priorités déclamées par Dr Choguel Kokala Maïga lors d’une audience accordée à des organisations comme l’Association des Municipalités du Mali (AMM).

Il s’agit incontestablement de vraies préoccupations des Maliens.

L’insécurité a dépassé les proportions imaginables dans notre pays.

Il est vrai que, aujourd’hui dans le monde, on n’est en sécurité nulle part.

Un dicton qui exhorte à relativiser la notion de sécurité.

Mais, dans le cas du Mali, c’est une véritable descente aux enfers pour les populations du centre du pays (on est visiblement plus en sécurité au nord du Mali que dans les régions de San et Ségou).

C’est la dégénérescence en matière de sécurité.

Malgré la présence et la détermination des Forces de défense et de sécurité (FDS), les groupes armés continuent de terroriser les populations en faisant de nombreux morts et des déplacés.

Ainsi, selon les autorités communales, plus de 1 170 ménages déplacés ont été enregistrés à Diabaly (cercle de Niono) ces dernières semaines en raison de l’insécurité généralisée dans la zone de l’Office du Niger.

Une situation en dégénérescence qui fait que le cercle de Niono vit dans une grande insécurité depuis près de deux ans.

«Tueries, enlèvements de personnes, vols de bétail, braquages… sont devenus le quotidien des paisibles populations.

Des groupes armés, auteurs de ces crimes, empêchent même les paysans de certaines localités comme Farabougou d’accéder à leurs champs», décrivait la semaine dernière un confrère de L’Essor.

Et la psychose s’est installée au sud où les présumés jihadistes mènent une vraie guerre psychologique en circulant en grand nombre dans les campagnes aux abords des champs et des villages.

Une présence suffisante pour dissuader de nombreux paysans à s’occuper de leurs champs dans la sérénité.

 

Péril sur la production agricole

A défaut de pouvoir endiguer le fléau au nord et surtout au centre, les autorités de la transition devaient tout faire pour que le sud ne bascule pas aussi dans l’insécurité généralisée.

La conséquence directe d’un tel déclin de l’Etat Républicain étant alors la famine généralisée dans le pays.

Et le gouvernement de Bamako ne peut continuer énormément à organiser des campagnes de distribution gratuite aux populations empêchées de se livrer à leurs activités agricoles par des obscurantistes.

Même s’il en a la volonté, il n’en aura pas les moyens à moyen terme. Autant alors s’attaquer aux racines du mal : sécuriser le pays quel que soit le prix à payer !

Quant aux réformes politiques et institutionnelles qui doivent aboutir à la refondation et à bâtir le Mali Kura (Mali nouveau), elles semblent de plus rn plus hypothétiques.

Le Premier ministre semble faire de l’organisation des Assises nationales de la Refondation (ANR) une condition sine qua de ce processus.

Mais, objectivement, nous ne voyons d’autres enjeux à ces assises qu’acter la prolongation de la transition et conduire le pays vers de

nouvelles aventures aux conséquences périlleuses pour un pays fragilisé et fragmenté par plus d’une décennie de crise multidimensionnelle.

Sinon elles n’ont aucune autre utilité après les Concertations nationales (10-11-12 septembre 2020) boudées par certaines composantes du M5-RFP de Choguel, mais animées à l’époque par les forces vives de la nation.

Elles ont abouti à la Charte et à la Feuille de route de la Transition qui confèrent aujourd’hui une légitimité au Colonel Assimi Goïta, à Dr Choguel Kokala Maïga et à son gouvernement ainsi qu’au CNT.

Prolonger la transition et du coup son bail à la Primature est sans doute son ambition cachée derrière lesdites assises.

D’où sa volonté de vouloir coûte que coûte conférer un caractère obligatoire aux résolutions des ANR.

Peu lui importe que cela soit «une démarche contraire aux règles démocratiques et républicaines» ainsi qu’une «violation flagrante de la constitution du Mali du 25 février 1992».

 

Les bouchers et les opérateurs économiques défient le gouvernement en fixant le prix des denrées à leur guise

L’apaisement du Front social n’est qu’un vœu pieu pour le moment.

Même si l’UNTM et ses composantes ont déposé les armes parce que leurs responsables ont eu ceux qu’ils souhaitaient, et le CSTM (Confédération syndicale des travailleurs du Mali) et des syndicats ont levé leur mot d’ordre de grève, c’est loin  d’être le cas de nombreuses autres organisations syndicales, surtout de la Synergie des syndicats signataires du 15 octobre 2016.

Même si elle a échoué à prendre en otage les examens de fin d’année, elle est toujours accrochée à une application stricte de l’article 39 de la Loi N° 2018-007 du 16 janvier 2018.

Ce qui ne présage pas d’une rentrée scolaire apaisée en octobre prochain.

Sans compter que la cherté de la vie ne manquera pas d’exhorter d’autres syndicats à hausser le ton dans les jours à venir.

Malgré la signature par exemple d’un protocole d’accord entre les bouchers et le gouvernement, le prix de la viande est passé de 2 200 à 3000 F Cfa le kilogramme. Quant au riz importé, il est passé de 350 à 400 F Cfa le kilogramme.

A cela s’ajoute la cherté du sucre qui est passé de 500 à 550 F Cfa le kilogramme.

Le sac de 100 kilogrammes de maïs est vendu sur le marché au minimum à 23 000 F Cfa…

Une flambée des prix qui ne semble pas préoccuper en dehors des réactions démagogiques opportunistes.

A quoi travaille donc Choguel Kokalla Maïga ? Est-ce que le Premier ministre consacre réellement le temps qu’il faut à la résolution  des priorités définies par lui-même lors de ses différentes audiences avec les forces vives de la nation ? Est-il réellement conscient qu’il est un chef de gouvernement de transition, donc avec un bail très limité à la Primature ? Dans tous les cas, le temps joue contre Choguel.

Face à tant d’urgences et au délai très court, il devait par exemple laisser les déplacements de l’intérieur aux ministres des tutelles qui ont une obligation de lui rendre compte. Ses déplacements ne résolvent en rien les préoccupations des Maliens.

Tout comme ces voyages de propagande populiste, les ANR ne seront que des assises de trop nous empêchant d’aller à l’essentiel dans le temps imparti à cette transition.

Comme l’ont si bien décrit les partis et regroupements politiques du Cadre d’échange pour une transition réussie au Mali, dans leur Mémorandum, «les ANR ne seront qu’une répétition du Dialogue National Inclusif (DNI) auquel le peuple malien a déjà participé en donnant ses recommandations dans tous les domaines et secteurs de la vie de la nation». Et surtout que selon le PAG, les Assises nationales de la refondation étaient prévues entre juin et août 2021.

«Cette programmation est à l’évidence impossible à honorer.

Ni le format, ni les termes de références ne sont connus et nous nous interrogeons sur les mobiles de l’obsession à les organiser», rappelle le Mémorandum.

Au gouvernement de la Transition de procéder à cette mise en œuvre et d’économiser plus de deux milliards de F.CFA prévus pour ces assises. Choguel doit comprendre qu’il est temps d’aller enfin à l’essentiel pour la réussite de sa mission de rectification de la transition.

Il ne doit pas surtout oublier que le M5-RFP n’a pas le monopole de la mobilisation pour faire déguerpir ceux qui oublient pourquoi ils ont été élus, les raisons pour lesquelles on leur a fait confiance !

Naby