Très tôt jeudi dernier (24 février 2022), comme planifié par les Etats-Unis et leurs partenaires européens, la Russie est passée à l’offensive contre l’Ukraine. Elle a lancé une violente attaque simultanée sur 74 sites repartis sur toute l’étendue du territoire ukrainien. Et contrairement à ce qu’avait espéré le régime en place, les Ukrainiens sont abandonnés à eux-mêmes face à la puissance militaire russe.
Objectivement, on ne peut pas applaudir la Russie pour cette escalade militaire. Ne serait-ce que pour ses conséquences (humanitaires, socioéconomiques, culturelles, sportives…) dramatiques pour le peuple envahi. Mais, on ne saurait non plus rejeter l’entière responsabilité sur le seul Vladimir Poutine d’autan plus qu’il a réagi à une attaque déguisée de ses rivaux occidentaux qui veulent créer les conditions de sa déstabilisation sous le nez.
Les puissances impérialistes partagent aussi cette lourde responsabilité devant l’histoire. Et cela d’autant plus que, ces dernières semaines, le président Joe Biden n’a cessé de marteler sa conviction que la Russie allait attaquer l’Ukraine. Et en connaissance de cause puisqu’il était aussi conscient de toutes leurs manigances pour utiliser l’Ukraine comme bouc émissaire de l’accomplissement de leurs sombres desseins. Cela en sachant bien qu’on ne peut pas longtemps remuer un foulard rouge devant un taureau dans l’arène sans s’exposer à des coups de cornes. Et comme l’a dit Edgar Morin, «ils ont incité l’Ukraine à la fermeté tout en sachant qu’ils l’abandonneraient militairement en cas de guerre». Et cela en jouant sur la naïveté d’un «Tchouné» (novice) politique qui a cru que ses amis Occidentaux seront au premier rang sur la ligne de front pour tenir tête à la Russie.
«Nous sommes seuls à défendre notre pays», a déclaré vendredi dernier (25 février 2022) le président ukrainien, Volodymyr Zelensky, qui serait monté au front aux côtés de ses hommes. Excellent comédien dont la popularité lui a valu d’être élu avec plus de 70 % des voix, il ne demeure pas moins un novice en politique qui a été «facilement embarqué par l’Occident dans son adversité contre la Russie». En effet, il est évident que Zelenski a dû obtenir les meilleurs gages de l’Occident avant de «s’aventurer dans un bras de fer avec son voisin 30 fois plus vaste en superficie et indéfiniment plus puissant militairement». Malheureusement, il mesure sans doute la pleine mesure de cette erreur de jugement. Aucun de ceux qui l’ont poussé à la faute n’est aujourd’hui prêt à le soutenir.
Même les sanctions annoncées en grande pompe dans les médias de propagande cachent mal l’impuissance des Occidentaux d’agir contre la Russie. Et le soutien militaire tourne beaucoup plus à se débarrasser des équipements obsolètes ou à tester de nouveaux équipements. Sinon un adage bien de chez nous avertit qu’il ne faut pas attendre le jour de la chasse pour préparer son chien. Ainsi, il ne fallait pas laisser la Russie attaquer l’Ukraine, détruire sa stratégie de défense pour ensuite lui promettre des équipements militaires (Europe) ou 350 millions de dollars d’aides militaires des Américains.
Quelle est cette puissance occidentale qui accepterait des têtes nucléaires à moins de 800 km de sa capitale ?
«Je pense qu’aucune grande puissance accepterait des têtes nucléaires installées à moins de 800 km de sa capitale. Le dialogue aurait dû être privilégié. C’est certain et cela passait par la neutralité de l’Ukraine en renonçant à être membre de l’Organisation du traité de l’Atlantique nord (OTAN). C’était à mon avis la solution la plus rationnelle», analyse Fousseyni Camara, un intellectuel malien de la diaspora en France.
Pour lui, «ce jeune acteur de second rôle qui est à la tête de l’Ukraine n’a pas compris que la Russie s’est dotée de moyens colossaux pour ne pas se laisser surprendre un jour par les USA et leurs ventriloques occidentaux». C’est pour toutes ces raisons que l’Ukraine est bien seule, au pire moment de son histoire.
Comme de nombreux observateurs, nous sommes convaincus que le désir d’annexer le Donbass n’explique pas à lui seul la violence avec laquelle la Russie a attaqué l’Ukraine jeudi dernier (24 février 2022). «La violence de l’attaque s’explique par l’intime conviction de Poutine, à tord ou à raison, que l’Ukraine est devenue une menace pour la sécurité de son pays : une bombe occidentale sous le pied de la Russie», explique un analyste politique.
Difficile alors d’en vouloir à Poutine pour son refus de tolérer à ses frontières une menace directe sur l’existence même de la Russie en tant qu’Etat et en tant que puissance. D’ailleurs pourquoi accepterait-elle ce que les Etats-Unis ont refusé en 1962 avec la crise des missiles de Cuba ? Il s’agit d’une suite d’événements survenus du 14 au 28 octobre 1962 qui ont opposé les USA à l’ex Union des Républiques socialistes soviétiques (URSS). Et cela à cause des missiles nucléaires soviétiques pointés sur les Etats-Unis à partir de l’Île de Cuba. Le dénouement de cette crise avait permis au monde de faire l’économie d’un conflit militaire entre les deux puissances qui aurait pu mener à un affrontement nucléaire et à une 3e Guerre mondiale. Mais, en réponse au rapprochement de Cuba de l’Union soviétique, le président John F. Kennedy a étendu les sanctions en élargissant le champ des restrictions commerciales.
Quand Biden fait déjà regretter Trump
En 1998, le président Bill Clinton a déclaré que Cuba n’était plus une menace pour les États-Unis et a assouplit l’embargo. Ce qui fait que, depuis 2001, les sociétés américaines peuvent vendre certains produits agroalimentaires et des médicaments à Cuba. Malheureusement, Joe Biden veut visiblement tout remettre en cause avec ses récentes sanctions ciblées contre des responsables de la police cubaine. «Il y en aura d’autres, à moins d’un changement radical à Cuba, ce que je n’attends pas», a-t-il menacé il y a quelques semaines. Et au même moment, il encourageait l’Ukraine à braver la puissante Russie en la poussant à adhérer à l’OTAN pour narguer Poutine. Une attitude va-t-en guerre qui amène déjà des pacifistes à regretté son prédécesseur à la Maison Blanche, Donald Trump.
En tout cas, Poutine a été très clair dans sa déclaration de guerre et sincèrement un vrai patriote c’est celui qui fait de l’intégrité de son territoire la priorité des priorités. «Toute analyse qui ne va pas dans ce sens voudrait dire que cette personne n’a rien compris à la psychologie de Poutine», pense M. Camara. Et comme l’a défendu l’ancien Premier ministre français Dominique de Villepin, jeudi dernier dans un débat sur le plateau de France 2, l’Occident devrait se prendre par deux fois pour ne pas «exposer l’Ukraine et sa population dans un face à face perdu d’avance».
Et surtout que Poutine avait clairement averti en 2005 sur les conséquences d’une telle adhésion. «L’Ukraine pourrait avoir des problèmes, je le dis franchement», avait-il averti à l’époque alors que le projet d’élargissement de l’Otan à ce pays émergeait. Un plan diabolique auquel Washington et ses alliés n’ont jamais renoncé exposant aujourd’hui les Ukrainiens à la colère de Moscou déterminé à se faire respecter dans cette région et dans le monde !
Moussa Bolly