Paraphe de l’accord d’Alger : les dessous d’un échec

 

Menace directe de sanctions contre les rebelles armés, c’est une première depuis le début des pourparlers. Avant tout cela, la division commençait à s’installer au sein de la Cma, car chaque entité ayant compris que les choses ne seront plus faciles. C’est ainsi que le Hcua, qui est dans la logique de la signature, a préparé le terrain  sans le Mnla. Mohamed Ag Intalla était arrivé à Bamako dans le cadre de la rentrée parlementaire, pour faire aboutir leurs doléances, tandis que son frère Alghabass et Cheikh Haoussa étaient au même moment en tournée dans l’Adrar des Ifoghas pour faire adhérer les populations et les combattants à leur cause. Ils ont été à Aguelhok où se trouvent des combattants du Hcua.

«Ils vont rafler la mise en billets de banque… Ce sont des traîtres ; ils ne pensent qu’à eux-mêmes, pas aux autres», nous a confié un responsable du Mnla, basé en France, pour qui, le Mnla ne signera jamais le document en l’état.

Le Hcua a son plan B, car il travaille avec l’Etat malien pour obtenir la cessation des poursuites contre Iyad, l’application de la charia à Kidal et le retour de l’armée à Kidal sans les éléments du général Gamou. Des propositions que Bamako ne souhaite pas examiner, car l’accord est clair sur ces questions. La vraie carte du Hcua est simple : si ça ne va pas, il cherchera à chasser le Mnla de toute la région de Kidal afin que l’accord puisse être une réalité.

Malgré ces contradictions au sein de la Cma, les différents mouvements de cette Coordination, selon ses responsables, ont envoyé des émissaires à Alger pour discuter avec la médiation. Parce qu’il ne s’agit pas de parapher, mais d’essayer de trouver une ouverture en vue de la prise en compte des nouvelles exigences de la Cma. La médiation, sous l’égide de l’Algérie, a été claire : pas d’ouverture encore moins de négociations car l’accord n’a besoin que du paraphe. Mais malgré tout, l’Algérie leur avait accordé une seconde date : le samedi 18 avril 2015 afin que la Cma puisse parapher l’accord. À la veille de cette date, le vendredi 17 avril 2015, la Cma était toujours campée sur ses positions : la prise en compte de ses doléances avant qu’elle ne paraphe le document. Le Mali a dit non, tout comme la médiation internationale. Les discussions ont duré ce jour, mais l’Algérie n’a rien voulu céder.

«Le Mnla se fait menacer à Alger. Que ceux qui veulent parapher restent à Alger ! J’appelle tous les membres du Mnla – je dis Mnla parce que c’est au sein de ce mouvement que je milite – à quitter Alger dans le plus bref délai ! Ce n’est pas en menaçant nos cadres et leaders que la paix se fera ! Aucune pression ne fera lâcher prise à nos leaders ! Que ceux au sein du Mnla qui veulent parapher, rentrent illico à Bamako pour le faire ! Le peuple de l’Azawad s’est prononcé et son verdict est sans appel : pas de paraphe !», lance un responsable du Mnla.

En réalité, beaucoup de responsables de la Cma voulaient parapher l’accord, mais ils ont été menacés par les jeunes du Mnla qui étaient très nombreux. Selon nos sources, il y a même eu une prise de becs entre Moussa Ag Achartmane et le ministre algérien des Affaires étrangères. «L’Algérie essaye d’user de la manière la plus anti-démocratique, via son ministre des Affaires étrangères, Ramtane Lamamra, qui menace la Cma pour lui imposer l’accord d’Alger 2015», fulmine Khoumeidy Ag.  

Pour Lamamra, «désormais, les négociations sont finies et la paix se fera avec ceux qui la veulent et les autres seront…». Le samedi dernier 18 avril 2015, l’Algérie a fait un communiqué dans lequel elle déclare solennellement la fin des pourparlers et la date de signature de l’accord, même sans la Cma. Cette signature, selon ce communiqué algérien, devra se faire à Bamako, et non en terre étrangère, le 15 mai.

Les responsables de la Cma, notamment du Mnla et de ses alliés, se résigneront-ils à parapher l’accord d’Alger à cette date, soutenue par la communauté internationale ? Tout porte à le croire, au risque d’être frappés par de lourdes sanctions de la Cédéao, de l’UA, de l’UE et des Nations unies. Mais en attendant, la vigilance doit être de mise.

Kassim TRAORE

Source: Le Reporter