Organisé par Anima et Expertise France sur un financement de l’Union européenne et du Groupe AFD, le IIe Forum Meet Africa – consacré aux diasporas africaines – a rassemblé samedi 12 février près de 3 000 participants à Paris. Un rendez-vous important pour tous les jeunes entrepreneurs voulant participer au développement du Continent. Reportage.
« Notre mission est de vous accompagner davantage. Notre ambition, c’est quoi ? Vous accompagner pour vous permettre de créer des emplois, vous donner les moyens techniques et financiers pour pouvoir réussir vos projets là où vous êtes afin de créer de la valeur et de la richesse ». L’objectif et le message adressés aux diasporas africaines sont on ne peut plus clairs.
Tirant les conclusions du IIe Forum Meet Africa, qui s’est tenu samedi à Paris, au Palais des Congrès de la Porte Maillot, et qui a réuni sur toute la journée près de 3 000 participants, Papa Amadou SARR ne mâche pas ses mots et redonne un peu d’espoir à toute une jeunesse quelque peu désorientée par la crise actuelle. Il fixe le cap et entend relancer une dynamique.
Aujourd’hui Directeur exécutif du Groupe AFD (Agence Française de Développement) en charge des Partenariats et de la Communication, après avoir occupé d’importantes fonctions avec rang de ministre auprès du Président Macky Sall – dont il est un proche – à la tête de la DER (Délégation à l’Entrepreneuriat Rapide) pour les jeunes et les femmes, Papa Amadou Sarr n’oublie pas d’où il vient.
« Je fus moi-même membre durant de longues années de la diaspora sénégalaise, en France comme aux États-Unis, et c’est pourquoi je reste à votre écoute », lance-t-il aux centaines de jeunes entrepreneurs ou visiteurs venus participer à cette journée d’échanges, de panels et de réseautage.
L’Afrique – c’est une banalité de le répéter – est le continent où tout se passera demain. Sa force de frappe, c’est son extraordinaire jeunesse connectée, innovante et qui fourmille de projets. Les membres des différentes diasporas africaines présentes en France sont nombreux à vouloir retourner « aux pays » pour faire profiter leurs compatriotes de leur bonne formation acquise bien souvent à l’étranger. Mais encore faut-il qu’ils soient accompagnés dès aujourd’hui et que cette politique réponde à une véritable « stratégie » sur le long terme pour porter des fruits sur le Continent.
Au terme d’une journée très riche en rencontres, débats, pitches devant l’Arbre à palabre, rendez-vous B2B et contacts échangés, Papa Amadou Sarr remercie d’abord tous les participants, toutes ses équipes du Groupe AFD et ses partenaires comme Proparco et Expertise France sur le pont depuis de longues semaines pour préparer l’événement, dont AfricaPresse.Paris est partenaire Média.
Il en profite également pour rappeler et saluer « la volonté du Président Emmanuel Macron de faire de la diaspora un tampon entre l’Afrique et la France ». Aujourd’hui, lance-t-il à l’adresse de son auditoire, « la nouvelle politique générationnelle de la République française repose sur vous, sur vos territoires dans lesquels vous travaillez au nom et pour la France, ainsi que pour les pays dans lesquels vous intervenez ».
« Pour les startups, il faut du cash ! »
« Beaucoup d’entre vous, poursuit-il, me le disent à travers les réseaux sociaux ou le bouche à oreille : il faut plus d’investissements, plus de prêts, plus de tickets de mission pour nos startups et nos entreprises et leur permettre ainsi de prospérer à Tunis, aux Comores, à Dakar, Abidjan ou Accra… »
En but à bien des incompréhensions en Afrique subsaharienne, où une partie de la jeunesse est instrumentalisée contre tout ce qu’elle représente comme au Mali et au Burkina Faso, la France tente d’ouvrir de nouvelles pistes de coopération économique avec d’autres pays en s’appuyant notamment sur les diasporas qui peuvent être à l’évidence d’excellents relais pour les affaires. « La diaspora peut être un catalyseur et un vecteur d’efficacité », se plaît-il à rappeler.
Fille de l’ancien Président tchadien, Fatima Goukouni Weddeye, la toute jeune ministre des Transports et de la Sécurité routière du gouvernement d’union nationale formée en octobre dernier par Saleh Kelzabo, qui fut longtemps le premier opposant au régime d’Idriss Déby, a d’ailleurs fait le déplacement pour donner une nouvelle image du Tchad qui recherche des investisseurs pour des secteurs clés comme les infrastructures ou l’agrobusiness.
Papa Amadou SARR, dont on entend dire parfois qu’il est l’officieux numéro deux de l’AFD, et qui, de plus, a l’oreille du Président de la République, en profite pour annoncer un prochain déplacement du chef de l’État dans la région des Grands Lacs, dès la fin de ce mois : Congo, Angola et Gabon, où se tiendra les 1er et 2 mars le « One Forest Summit » consacré à la sauvegarde de la planète et de l’un de ses principaux poumons verts, l’immense forêt du Bassin du Congo. « Je pense, ajoute-t-il qu’il y aura des propositions concrètes qui verront alors le jour pour encourager les diasporas à accompagner le développement économique et social de l’Afrique ».
Il rappelle au passage le message délivré par le Président Macron au Sommet Afrique-France de Montpellier, en novembre 2021, visant à mieux prendre en considération les diasporas installées en France « pour soutenir sa vision renouvelée de la relation entre l’Afrique et la France ». Une nouvelle politique « faisant la part belle à l’entrepreneuriat, à la jeunesse que vous êtes, à la culture et au sport » car « la diaspora constitue une force motrice pour la France, une force sur laquelle elle s’appuie trop peu jusqu’à présent… »
« Choose Africa a pu accompagner plus de 26.000 entrepreneurs pour 3,5 milliards, mais Choose Africa 2 a l’ambition de faire peut-être le double », annonce-t-il pour conclure, en invitant les jeunes de la diaspora à redoubler d’efforts : « Pour tout cela, il faut du cash ! Préparez vos projets. Il faut qu’ils soient bons et irréprochables, il faut qu’il aient de l’impact et de la vision pour que nous puissions vous accompagner ».
La Nigériane anglophone Hafsat Abiola
donne l’exemple en parlant en français
Car les talents sont là et les bonnes volonté ne manquent pas. Ils étaient d’ailleurs nombreux ce week-end au Forum Meet Africa à présenter en séance plénière ou sur les nombreux stands visités leurs savoir-faire ou innovations originales. Comme ce jeune entrepreneur sénégalais Rui Mendes Da Silva (originaire de Mantes la Jolie et président de l’association « Impose ton rêve ») dont la société Kennet Automobile envisage de produire à Dakar une automobile propre et électrique. Un premier prototype vient d’ailleurs de sortir.
Président d’International Boost et représentant en France de GITEX, Christian Pineau convie, quant à lui,les entrepreneurs présents à candidater avec des projets sérieux pour être invités tous frais payés au GITEX Africa, le premier grand Salon de la Tech en Afrique qui se déroulera du 31 mai au 2 juin prochain à Marrakech, au Maroc.
Et Tarak Cherif, président d’Anima et président fondateur de la Confédération des Entreprises citoyennes de Tunisie, vante à juste titre les mérites et l’attractivité de la Tunisie, pour le tourisme comme pour les affaires dans bien des secteurs de pointe. Et appelle les diasporas à « se mobiliser pour faire bouger les lignes » et prendre leur destin en main, tant il est vrai que nous vivons une époque où tout est possible.
Présidente de Women in Africa, la Nigériane anglophone Hafsat Abiola, donne quant à elle un bel exemple à tous en faisant à l’effort de parler en français pour donner à « ses sœurs de la diaspora » les clés de la réussite dans l’entrepreneuriat féminin, tant il est vrai qu’en Afrique les femmes jouent un rôle irremplaçable dans l’économie et le développement des pays. Toujours très émouvant, son témoignage sur son histoire personnelle et l’assassinat de ses parents en 1996 et 1998 sera longuement applaudi.
« C’est grâce à leur sacrifice que le Nigeria est aujourd’hui une démocratie et que le pays peut élire ce mois-ci son président », observe-t-elle, en essayant de transmettre son perpétuel dynamisme à tout le Forum en réaffirmant haut et fort que l’Afrique peut gagner et se transformer « grâce à l’engagement des femmes ». Quel bel exemple de courage et de ténacité !
Par Bruno FANUCCHI pour AfricaPresse.Paris (APP