NOUVELLES MESURES CONTRE LE COVID-19 Le gouvernement décide, les Bamakois disposent

Le conseil des ministres extraordinaire du vendredi 18 décembre 2020 a décidé de réajuster le Plan de riposte Covid-19 du gouvernement par l’adoption de nouvelles mesures a fin d’éviter au pays «une éventuelle catastrophe». Au nombre de ces mesures, il y a «l’état d’urgence décrété sur tout le territoire malien pour 10 jours à compter du 18 décembre 2020». Des décisions jugées opportunes par les citoyens, mais qui sont malheureusement loin d’être appliquées par les Bamakois qui brillent entre inconsciente et irresponsabilité. Une application qui n’est pourtant pas sans enjeu pour l’équipe de Moctar Ouane car, en plus d’enrayer la propagation d’un virus aujourd’hui en mutation périlleuse, c’est une belle opportunité de restaurer l’autorité de l’Etat.

L’état d’urgence a été instauré au Mali pour dix jours (à compter du 19 décembre 2020 à zéro heure) pour tenter de freiner la seconde vague du COVID-19, a annoncé vendredi dernier (18 décembre 2020) le gouvernement à l’issue d’un conseil des ministres extraordinaire consacré au retour en force de la pandémie depuis plus d’un mois.
En plus de l’Etat d’urgence, les autorités maliennes ont aussi annoncé la suspension des festivals et activités culturelles pour 2 semaines, la fermeture des rues marchandes et lieux de loisirs (restaurants, bars, discothèques) à compter du 19 décembre à minuit jusqu’au 4 janvier 2021, la fermeture de tous les établissements privés et publics d’enseignement primaire et secondaire jusqu’au 04 Janvier 2021, la limitation des rassemblements à 50 personnes au plus lors des cérémonies sociales (mariage, baptême, funérailles…) ; le renforcement des contrôles aux frontières ; l’élaboration et la mise en œuvre d’un Plan national de vaccination…

Les marchés seront pulvérisés tous les jours à 18h00 et a déclaré avoir adopté des sanctions en cas de l’inobservation du port du masque en public. L’Etat malien a également «interdit à tous cortèges, défilés, rassemblements et manifestations sur la voie publique». Ces nouvelles mesures découlent de la volonté du gouvernement «d’ajuster sa riposte pour éviter la catastrophe» au pays.

«L’observation rigoureuse des mesures annoncées ce vendredi nous aidera à contenir sa propagation. Ensemble, Maliennes et Maliens, œuvrons à leur application correcte avec responsabilité et civisme», a prêché le Premier ministre Moctar Ouane. Malheureusement, les dites mesures sont violées au vu et au su de toutes les autorités du pays. C’est l’amer constat que nous avons fait sur la rive gauche du Niger à Bamako (communes II, III et IV) le week-end dernier.

Le gouvernement prêche dans le désert de l’inconscience et de l’irresponsabilité

Dimanche dernier (20 décembre 2020) par exemple, Bamako a vibré à la cadence des «mariages mondiaux» avec leurs lots de cortèges. Sous les bâches attachées dans les rues (toujours barrées sans autorisation municipale comme toujours), des gens sont entassés sans aucune précaution pour se protéger. Et comme s’ils narguaient les policiers de la circulation routière, des cortèges se sont retrouvés par exemple dans les espaces jouxtant la Cité administrative à quelques mètres seulement des forces de l’ordre. En commune II, III et IV, rares sont les restaurants, bars et autres espaces de loisirs qui sont fermés comme le Club Africa Espace (Bamako-coura) et Sheraton… qui s’illustrent dans le bon sens.

Et jusqu’au dimanche soir, la «Rue marchande» était ouverte à l’ACI 2020 même si les clients ne s’y précipitaient pas. Dans de nombreux espaces publics, comme les mosquées, et des lieux sociaux regroupements, ceux qui portent les masques sont regardés sont toujours regardés comme des extraterrestres. La situation est pourtant plus catastrophique que ne l’avoue le gouvernement qui brille par son silence face à la violation des mesures décrétées.
Ce laxisme dans l’application des mesures, pourtant jugées idoines par une grande partie de l’opinion, n’est pas rassurant car il nous renvoie à ce que nous avons vécu et dénoncé sous l’ancien régime : le manque d’autorité de nos décideurs ! On ne peut pas espérer relever ce pays, bâtir un «Malikura» (un nouveau Mali) si l’autorité de l’État est bafouée sans conséquences pour les mauvais citoyens.

Aujourd’hui, nous avons dépassé le stade de la sensibilisation, donc de la dissuasion à cause de l’incivisme qui se nourrit de l’impunité, du populisme et de la démagogie politiciennes. Et surtout que l’incivisme est devenu une seconde nature chez le Malien.

Ainsi, nous savons tous que tant que ceux qui violent délibérément les mesures imposées à tous ne sont pas verbalisés, sanctionnés, la majorité de nos citoyens va continuer à ignorer cette menace et on foncera la tête baissée vers cette catastrophe tant crainte par nos autorités. Sans compter que réprimer les contrevenants est une question d’équité et de justice vis-à-vis par exemple de la petite minorité de commerçants, d’opérateurs culturels, d’hôteliers et de restaurateurs qui respectent la décision de l’Etat.

«C’est dommage que respecter la loi soit une exception au Mali et un handicap par rapport à l’incivisme général. Malgré une situation financière catastrophique, nous avons décidé de nous plier à la volonté du gouvernement alors que les autres continuent leurs activités sans problème, sans aucune crainte d’être sanctionnés. Et comment veut-on construire un nouveau Mali alors que l’Etat est incapable d’imposer mêmes des mesures de salut public ?», nous interrogeait dimanche dernier un opérateur culturel qui a fermé son espace.

Constituer des brigades mixtes pour faire respecter l’autorité de l’Etat
Dans un bref délais, le gouvernement doit par exemple organiser des patrouilles mixtes (forces de sécurité et civils, notamment des organisations de jeunes) pour avertir et sanctionner. Malheureusement, l’un des drames de ce pays est qu’on pense toujours qu’il ne revient qu’au seul pouvoir central de sécuriser les populations alors que chacun d’entre nous a sa partition à jouer.

Comme l’a dit Mahamat Saleh Annadif (chef de la Minusma) à l’occasion du nouveau bloc de soins intensifs offerts au CHU de Point G, «les citoyens sont leurs propres et meilleurs médecins». Ce n’est pas aussi parce que le gouvernement est incapable de veiller à l’application stricte de ces décisions que nous devons passer outre.
La responsabilité de chacun d’entre nous est donc engagée pour prendre soins des autres. Faut-t-il croiser les bras et regarder si le gouvernement va oser prendre le taureau par les cornes ? Cela ne sera pas responsable de notre part. Face à une menace aussi sérieuse que du Covid-19, chacun est d’abord responsable de sa propre protection, de sa famille. Et nous avons aussi chacun le devoir se mettre à l’abri et de protéger les autres.

Il y a beaucoup de ses endroits où on peut renoncer à aller en attendant que la tempête passe. Et là où il faut aller pour accomplir son devoir sociale ou religieux, il faut prendre le maximum de précaution. Et surtout qu’il est clair que nous sommes nombreux à ne va vouloir jamais renoncer à faire le déplacement pour les cérémonies de baptêmes, de mariages ou de prêches en grande pompe. Mais, de grâce, prenez au moins les précautions nécessaires pour vous protéger.

Il est urgent que chacun s’assume pour freiner l’élan meurtrier du Covid-19. Et pour une fois, sortons de notre traditionnel fatalisme pour voir la réalité et adopter le meilleur comportement face à ce péril sanitaire !

Naby