Ces cinq corps de soldats, tous habillés en uniforme de bérets verts et tous attachés par des cordes ou des fils de fer et parmi lesquels figurent une femme, ont été retrouvés aux côtés des têtes de crocodiles. Ces corps ont été mis à jour, dans deux tombes communes clandestines, dans le village de Fanafiè sur la route de Bemasso, une localité située non loin du Drall, le marché à bétail de Kati. Des experts français et américains sont à pied d’œuvre pour déterminer l’identité réelle de ces victimes.
ll nous revient que c’est sur la base de dénonciations que le juge d’instruction, Yaya Karembé, a eu connaissance de l’existence desdites fosses communes. Lesquelles dénonciations ont, semble-t-il, été faites lors des témoignages de militaires arrêtés dans le cadre de la mutinerie du 30 septembre 2013. D’autres ont aussi été recueillies au cours de l’audition de certains membres influents de l’ex- junte actuellement en détention dans l’affaire des 21 bérets rouges tués et qui se sont mis à table pour tout déballer. S’y ajoutent les témoignages des riverains qui ont été surpris de la présence dans les bois de deux tombes. Ces derniers se sont mis également à parler au point que l’information est parvenue au juge Karembé.
C’est donc à travers toutes ces bases de données en sa possession que Yaya Karembé a conduit, le dimanche 23 février, en début de soirée une équipe à Fanafiè pour exhumer ces corps.
Selon nos sources, les cinq corps ont été enterrés dans deux tombes. La première contenant deux, le corps d’un homme et celui de l’unique femme du groupe. La seconde contenait trois cadavres de soldats formellement identifiés comme étant des bérets verts appartenant, de ce fait, au même corps que l’ex-chef de l’ex-junte, le Général Amadou Haya Sanogo contre qui du reste la mutinerie du 30 septembre 2013 était dirigée. Une chasse à l’homme et une féroce répression s’en étaient suivies, au cours de laquelle certains mutins avaient été froidement abattus et leurs corps enterrés dans des fosses clandestines.
Au jour d’aujourd’hui, nombre d’entre eux sont toujours portés disparus notamment le colonel Youssouf Traoré, décrit un moment comme le responsable des » opérations spéciales » de l’ex-junte, c’est-à-dire l’homme chargé de conduire l’exécution de ses basses besognes. Plusieurs informations le concernant avaient même circulé en son temps. Il a été dit, par exemple, qu’il a eu la tête tranchée, ce qui en dit long sur la haine que lui vouaient ses exécuteurs.
Quant aux rescapés du 30 septembre 2013, qui ont pu être arrêtés dans le cadre de l’opération Saniya lancée par le ministre de la défense, une trentaine d’entre eux ont été radiés en trois phases : décembre 2013, 4 février 2014 et 7 février 2014 par le ministre de la Défense pour » indiscipline et atteinte à la sureté de l’Etat « .
La découverte de ces deux tombes communes porte à quatre le nombre de sites macabres de ce genre après le charnier de Diago où 21 corps de bérets rouges ont été mis à jour et la fosse commune du cimetière d’Hamdallaye où les restes de trois hommes et d’une femme ont été découverts.
Dans les jours qui ont suivi la mutinerie, des corps de mutins avaient été trouvés à divers endroits de la ville garnison de Kati et sur la route de Ségou. Désormais, il ne fait plus de doute que toutes les dernières découvertes de fosses communes clandestines sont celles de mutins froidement assassinés lors des événements du 30 septembre 2013. Au cours desquels des soldats, sous-officiers et officiers avaient tenté de » régler son compte » au Général Amadou Haya Sanogo au motif qu’ils n’ont pas bénéficié de promotion. Contrairement à l’ex-chef de l’ex-CNRDRE qui avait été, lui-même, propulsé de capitaine à Général de corps d’armée par le président de la République par intérim, Dioncounda Traoré.
Mamadou FOFANA & Abdoulaye DIARRA
SOURCE: L’Indépendant du 25 fév 2014.