Sous le régime de Moussa Traoré, le litre de l’huile était livré à 350 F Cfa, sous Alpha Oumar Konaré, il était cédé à 650 F Cfa et il est vendu actuellement à 1100 F Cfa. Quand on nous donne le prix de popote, on ne sait pas quoi acheter au marché. Sous Moussa, le prix de Sotrama sur le trajet de Lafiabougou était de 55 F Cfa, sous Alpha c’était à 75 F Cfa et sous ATT, il est de 125 F Cfa, soit une augmentation de 50 F Cfa. Le sac de 100 Kg de céréales sous le règne de Moussa Traoré était vendu à 2500 F Cfa. Il a atteint aujourd’hui 20.000 F Cfa. Et pourtant les salaires de nos maris n’évoluent pas. Le chef du gouvernement est une femme. Et les préoccupations que je viens de dire sont des soucis pour toutes les femmes.
* Ismail Camara, magasinier
Depuis la chute de Moussa Traoré, nous nous attendions au bonheur. Mais ça été le contraire. Il y avait le service d’Hygiène, les affaires économiques. Tout ceci n’existe plus et la situation sociale est que les prix des denrées montent et ils ne chutent plus. Nous sommes conscients que le gouvernement complote avec les commerçants pour faire la spéculation des prix. C’est devenu une affaire de grain. Ce qui nous a le plus déçu, c’est la nomination d’une femme comme premier ministre. Je crois que tout ce gouvernement est une affaire de famille, de camaraderie. Le président doit se mettre en tête qu’il ne lui reste qu’une seule année. Depuis la chute de Moussa, la population n’a pas eu satisfaction, c’est le gouvernement qui est satisfait. La jeunesse doit être prise en compte comme elle s’est sacrifiée pour le président sur la route de Gao. Pour l’élection, 2012 doit se faire avec le Ravec [Ndlr : Recensement administratif à vocation d’Etat civil]. Ils nous ont fait faire le Ravec, pour ensuite dévier le chemin. C’est quand même treize milliards de F Cfa qui ont été investis dans le Ravec.
* Soumaila Traoré, Ouvrier
Je pense que ce gouvernement est inutile, inopportun. La vie est chère. Nous croyions qu’ATT allait nous donner un gouvernement qui nous sortira de l’ornière. Les Maliens n’attendaient pas une équipe de camaraderie. On pensait à l’installation d’une équipe qui peut organiser une bonne élection. Le général Kafougouna Koné n’a fait aucune élection transparente dans ce pays. Nous avons compris que cette équipe est installée pour faire venir Modibo Sidibé au pouvoir. Nous nous attendions à vingt ministères et non trente et deux départements. C’est un gouvernement pour lequel nous sommes déçus d’avance. Comme il est déjà constitué, la priorité doit être la sécurité alimentaire, la promotion de la jeunesse, l’école etc. Nous leur demandons de ne pas mettre le feu au Mali avant de partir. Les commerçants fixent les prix à leur choix. Je crois que la commission Daba Diawara a fait un travail sur les reformes institutionnelles dont les résultats ont été présentés au président de la République. Ces résultats doivent être respectés pour que la nouvelle équipe fasse des élections apaisées et transparentes. A défaut des réformes souhaités, qu’il forme une commission chargée de relire le fichier électoral pour éviter des fraudes.
* Cheick Hamala Kouyaté, artiste
Le gouvernement seul ne peut pas gérer tous les problèmes. Je leur dit seulement qu’il ne s’agit pas d’être ministre. Il faut surtout jouer sur ses connaissances et ses efforts pour servir à 100 % la nation. D’abord, il faut faire face aux défis de l’éducation, à la création d’emploi. L’agriculture est une priorité. L’équipe gouvernementale doit être exemplaire. Je suis content que le chef du gouvernement soit une femme. On verra de quoi est capable cette équipe. Je dis aux Maliens que c’est ensemble qu’on peut bâtir un Mali fort. Il nous faut tous avoir une volonté patriotique. Une femme premier ministre, il y a une inquiétude parce que c’est la première fois au Mali. Est-ce que les politiques vont la laisser faire ? Par rapport à la perspective de l’élection de 2012, je pense que le Mali est un pays de paix et de solidarité. Donc il ne doit pas y avoir de tension après l’élection. Le malien doit être fier de son pays. Pour consolider cela, nous devons lutter pour que le Mali soit un exemple de démocratie, de solidarité et d’Etat de droits de l’homme. Pas seulement dans les villes mais aussi dans les campagnes.
* Augustin Sidibé, chauffeur
Dans l’ensemble, la nouvelle équipe n’est pas mal. Nous comptons sur les ministres désignés. Quant au premier ministre, j’ai beaucoup d’affection pour elle, précisément pour l’organisation des élections de 2012. Si le gouvernement pouvait maîtriser les prix des denrées de première nécessité, ce sera une bonne chose.
* Arouna Adama Doumbia, étudiant à la Fmpos
C’est l’enseignement supérieur surtout qui m’intéresse. Je suis inquiet et agacé de la situation qui prévaut dans les différentes facultés de l’université. Nous sommes dans une situation d’impasse depuis deux ans. Des grèves d’enseignants se suivent et la Fast [Ndlr : faculté des sciences et techniques] a été obligé d’observer une année blanche. Les résultats de la Fmpos sont toujours attendus. Nous sommes quand même dans un pays démocratique. Le premier ministre sortant était au courant de tous ces problèmes, il n’a pas pu gérer la situation. Si un ministre n’est pas à la hauteur qu’il rende le tablier. On peut se réjouir que nous sommes dans un pays religieux, de tolérance, mais il faut que les élections se tiennent dans la transparence. Et nous pensons que Kafougouna ne pourra pas faire cette affaire. Il n’a jamais organisé une élection crédible.
* Lanseni Koné, maître coranique
Le fondement d’un pays, c’est sa capacité de nourrir sa population. Il faut surtout une sécurité alimentaire. Le logement est aussi un souci pour les pauvres. Un affamé ne voit pas la longueur d’une route quelle que soit la beauté de cette route. Il a besoin de son ventre. Il est aussi intéressant de se concerter, de dialoguer sur les grands problèmes du pays.
* Awa Soucko, commerçante
La vie est trop chère. Nous voulons que les denrées de première nécessité reviennent à un prix accessible à la population. Je prends l’exemple sur ma boutique, mes recettes ont fortement diminué parce qu’il n’y a pas d’achat. Les gens n’ont pas d’argent. Nous avons de nombreux exemples que des familles ne font pas les trois repas par jour. Certains mêmes n’ont qu’un seul repas quotidien.
* Aminata Sidibé, commerçante
La seule priorité que je vois pour le gouvernement c’est de gérer le phénomène de la vie chère. C’est ce qui me préoccupe. Rien d’autre.
* Ibrahima Koné, employé de commerce
ATT est un partisan de la démocratie. C’est un acteur. Il veut montrer au monde qu’il est démocrate en nommant une femme à la tête du gouvernement. Je veux que la première ministre qu’elle soit, elle aussi, démocrate, à l’écoute des gens, surtout par rapport aux produits de première nécessité. En ce moment avec la crise à travers le monde, le gouvernement doit se préoccuper des problèmes de nos compatriotes vivant dans les pays en crise, surtout en Côte d’Ivoire. On a des informations qu’il y a plus de 2000 personnes à l’ambassade du Mali en Côte d’Ivoire sans nourriture, ni eau. Le gouvernement doit savoir que c’est pour la population qu’il est là. Au ministère des affaires étrangères, le nouveau ministre doit faire face à la crise qui prévaut là-bas. Qu’on évite la ségrégation dans la gestion des affaires publiques et mettre les personnes à la place qu’il faut. Au Mali, les rapports de travail sont surtout dictés par les liens familiaux. Il y a des exemples de troubles partout autour de nous. Le premier ministre doit s’inspirer de ces problèmes pour qu’il n’y ait pas de truquage aux élections qui se préparent au Mali. Il est nécessaire d’étudier les différentes décisions à prendre pour éviter une révolution dans le pays. Je sais qu’ATT aime son pays et son successeur doit être plus patriote que lui. C’est ce conseil que je donne au premier ministre.
Propos recueillis par
Hadama B. Fofana et
Seydou Coulibaly
Le Républicain 08/04/2011