Elle a occupé les portefeuilles ministériels de la Coopération internationale ; de l’Agriculture et de l’environnement ; et enfin, du Développement rural. Toutefois, la nouvelle responsabilité qui est confiée aujourd’hui à Mme Cissé sera des plus herculéennes. En effet, ce n’est pas une entreprise légère que de gérer les sociétés modernes de plus en plus complexes et exigeantes. Qui plus est, le tout nouveau Premier ministre malien est une femme. Toujours prise pour une « bête de somme », pour reprendre l’expression de Simone de Beauvoir, la femme, surtout africaine, peine encore à se frayer une place dans la société. La phallocratie aidant, sa voix pèse souvent moins lourd qu’une plume.
En tout cas, d’ores et déjà, Mme Cissé trouve sur sa table, entre autres dossiers aussi sensibles que complexes, celui du nouveau Code des personnes et de la famille. Un Code qui libère la femme malienne de bien des pesanteurs socioculturelles et religieuses qui limitent considérablement sa liberté mais dont le vote et l’application rencontrent la désapprobation catégorique de certaines communautés religieuses du pays de Soundjata. Ce qui avait d’ailleurs contraint le président ATT à mettre ce Code en stand-by.
Que fera donc Mme le Premier ministre de cette loi dont le bien-fondé pour la femme n’est plus à démontrer mais dont l’applicabilité demeure problématique pour des raisons socioculturelles et religieuses ? Attendons de voir. En tout cas, en posant cet acte hautement historique, ATT voudrait terminer son dernier mandat en apothéose. Ainsi, convaincu que cette nomination engage sa personnalité et conscient de ce que la mission confiée au nouveau chef du gouvernement est titanesque, ATT fera sans doute des pieds et des mains pour lui offrir toutes les chances de réussir ce pari. A elle de les saisir pour relever les défis. Aussi, beaucoup de femmes africaines ont-elles le regard tourné vers le nouveau Premier ministre malien. Elle doit en principe se rendre compte que la victoire a plusieurs pères et la défaite orpheline. Aux Maliens aussi de la considérer comme un Premier ministre avant de la voir comme une femme.
En tout état de cause, ATT qui a déjà promis d’aller cultiver son jardin au terme de ce mandat (il y tient, sauf tremblement de terre), vient de damer encore le pion à ses pairs africains. Dans une Afrique où la femme a toutes les difficultés pour rentrer dans le cercle des décideurs politiques, le geste du président de la République du Mali est plus que louable. Il est à souhaiter que les autres lui emboîtent le pas.
Le Pays 06/04/2011