Nicolas Sarkozy a été mis en examen dans l’enquête sur le financement de sa campagne présidentielle de 2012, a annoncé mardi soir le parquet de Paris. Ceci risque de freiner ses ambitions pour les présidentielles de 2017.
L’ancien chef de l’Etat a été entendu toute la journée par le juge d’instruction. Ce dernier soupçonne que les comptes de campagne de l’ex-président français ont été truqués pour cacher une explosion du plafond légal des dépenses de 22,5 millions d’euros.
Convoqué « devant le magistrat instructeur premier saisi du dossier » (Serge Tournaire), le président des Républicains a été mis en examen pour « financement illégal de campagne électorale pour avoir, en qualité de candidat, dépassé le plafond légal de dépenses électorales », indique le communiqué du procureur de Paris.
Nicolas Sarkozy « a par ailleurs été placé sous le statut de témoin assisté des chefs d’usage de faux, escroquerie et abus de confiance », est-il également précisé. L’ancien président est déjà mis en examen depuis juillet 2014 pour corruption et trafic d’influence dans l’affaire dite des écoutes.
Peu après l’annonce de sa mise examen, l’avocat de l’ex-chef de l’Etat, Thierry Herzog, s’est présenté devant les journalistes. Il a expliqué qu’il allait déposer des recours et faire part de sa « satisfaction ».
« Aucun fait lié au dossier dit Bygmalion n’est reproché au président Sarkozy », a-t-il dit. « Le juge d’instruction a considéré que l’infraction formelle de dépassement du compte électoral qu’il avait signé était constituée et il n’a été mis en examen que de ce chef. C’est donc une satisfaction », a également déclaré Thierry Herzog.
Ce nouvel épisode judiciaire intervient au plus mauvais moment pour le président des Républicains, à la peine dans les sondages et contesté dans son camp. Nicolas Sarkozy, 61 ans, n’a toujours pas fait connaître ses intentions au sujet de son éventuelle participation à la primaire de la droite et du centre prévue en novembre.
Système de fausses factures
L’enquête Bygmalion, du nom de la société qui organisait les meetings de campagne de Nicolas Sarkozy, porte sur un système de fausses factures. Celui-ci aurait été mis en place pour cacher une explosion du plafond légal des dépenses pour la présidentielle.
Ces fausses factures auraient eu pour objet d’imputer au parti de droite UMP (rebaptisé récemment Les Républicains) quelque 18,5 millions d’euros de dépenses qui auraient dû rentrer dans le compte de campagne de Nicolas Sarkozy.
Plusieurs cadres de la société Bygmalion, son comptable, ainsi que certains ex-responsables de l’UMP, ont reconnu l’existence de cette fraude. Toutefois aucun protagoniste n’a mis en cause Nicolas Sarkozy pour l’avoir décidée ou en avoir eu connaissance.
Amnésie et relativisation
L’enquête montre cependant que l’ex-président a demandé et obtenu plus de meetings, vers la mi-mars 2012. Or, son directeur de campagne, Guillaume Lambert, a déclaré aux policiers qu’il l’avait informé d’une note de l’expert-comptable pointant un risque de dépassement du plafond et interdisant toute dépense supplémentaire.
Entendu par les enquêteurs en septembre 2015, Nicolas Sarkozy a assuré ne pas s’en souvenir et a relativisé le coût que pouvaient engendrer les événements ajoutés. « L’argument d’une campagne qui dérape est une farce », a-t-il affirmé. Il a renvoyé la responsabilité des fausses factures sur l’entreprise Bygmalion et l’UMP dirigée alors par Jean-François Copé.
Ce dernier a été placé sous le statut de témoin assisté, échappant à une mise en examen (inculpation). Mais depuis, l’enquête s’est élargie à des dépenses qui n’ont rien à voir avec la société de communication fondée par des proches de M. Copé.
Plusieurs inculpations
Les juges s’interrogent notamment sur une ligne « présidentielle » dans le budget 2012 du parti, indiquant 13,5 millions d’euros de dépenses engagées, alors que trois millions d’euros seulement ont été communiqués dans le compte de campagne.
Trains, salles de meetings, tracts, sondages: les enquêteurs ont remonté la trace de nouvelles factures oubliées, qui apparaissent dans les comptes de l’UMP mais pas dans le compte de campagne.
Les juges ont jusqu’à présent inculpé quatorze anciens responsables de l’UMP, de la campagne présidentielle ou de Bygmalion. L’enquête est ouverte pour faux, abus de confiance, escroquerie et financement illégal de campagne électorale.
(ats / 16.02.2016 22h39)