Avec Mara, la proximité d’un PM avec le peuple a changé de ton. Elle n’est ni chaleureuse, encore moins demandée, mais imposée. Moussa Mara est sur Facebook, son phone s’échange comme une carte de recharge. C’est bien et c’est son époque. Jeune, débordant d’énergie et plein d’enthousiasme, le tout porté par la conviction de disposer d’un destin national, preuve en cela, sa chance du berceau de naissance, le PM accorde de l’importance à ses nombreuses sollicitations et trouve du temps à se consacrer aux dossiers. Lesquels marqués de son emprunte doivent faire avancer le Mali. Il s’estime être le sauveur du Mali post-crise. Pourtant, nommé Premier ministre à la surprise générale, Moussa Mara est reconnu par des intrigues au service de son ego. Un ego qui ne sied pas au second degré.
Mara se conjugue toujours au premier. Secrétaire général de la jeunesse de la section Adéma de la Commune IV du District de Bamako, le jeune Mara s’étouffe dans l’animation de ce parti. Fraîchement sorti des études avec un «papier longueur» d’expert-comptable, Mara multiplie les initiatives de proximité. Il suscite et parraine les activités. Contribue aux activités génératrices de revenus pour les femmes. Les quartiers défavorisés de cette Commune découvrent alors un jeune Père Noël. À cette époque-là, Moussa Mara dispose d’une forte audience. Sa salle d’attente ne désemplit pas. La démarche aboutira à son terme à la mise en place de son parti, Yéléma- le Changement. Mara en est le patron et son ego a désormais un espace d’expression.
As de la communication, fondé du pouvoir des médias, Mara s’active dans l’animation de ceux-ci. Ses contributions sont visibles. La sortie de ses livres aliment les médias. De cette époque et pour toujours, ses actes sont savamment médiatisés. L’harmonie entre Moussa Mara et les médias au bénéfice des deux parties commence là. Pour rien, bon an mal an, Mara est dans les médias. Second espace pour son ego. Un ego qui ne peut s’effacer pour rien. Une philosophie qui aura pu coûter la place de député, puis celle du président de l’Assemblée nationale à son actuel patron, le président IBK aux élections législatives de 2002. La mobilisation de l’Espoir 2002, suivie d’un mouvement politique général aura sauvé IBK face à l’ambition démesurée d’un animal politique en dévernir, alors indépendant.
Mara se contentera de la Mairie de la Commune IV. Ce qui suffira à son bonheur pour le moment. Il est dans le jeu politique. Patron communal, il publie ses biens dans la presse. Place sa gestion communale sous le signe de l’assainissement et de la promotion locale. Pour ensuite changer la position de son bureau afin de ne pas voir la colline de tas d’ordures qui dérangent le repos des morts de la même Commune. L’ancien élu communal parle peu de cette colline. Expert-comptable et politicien bon teint, qui sait mieux que Mara que les échecs ne se comptent pas.
La crise éclate au Mali. Des jeunes militaires sont aux commandes. Mara est dans le respect de la junte. Mais, celle-ci n’est pas rassurée par ses intrigues. Elle mise alors sur IBK avec deal de le nommer comme PM. La campagne présidentielle commence. Mara est dans la mouvance du changement. Candidat avec 1,5% des suffrages exprimés au 1er tour, il est à la base d’une coalition de candidats battus pour soutenir IBK. Résultat : il est le seul parmi ceux-ci à être récompensé. Nommé, alors à un ministère taillé à son goût. Par son animation publique et de sa pratique des médias, il se révèle alors dans ce 1er gouvernement d’IBK, comme le seul ministre qui draine l’espoir. En tout cas, pour lui, l’espoir se concrétisera.
Il est nommé Premier ministre. Une nomination mise par lui-même au compte de ses supposés résultats à la tête de la mairie, à celle de son ancien ministère et surtout pour son engagement pour le Mali. Quel curieux couple au sommet de l’Etat malien qu’est celui d’IBK-Mara ! En effet, le premier, IBK, depuis son installation comme président de la République, est fortement apprécié par sa capacité à faire ce qu’il n’a pas dit, oubliant ainsi ce qu’il a dit. Quant au second, Moussa Mara, le PM, il est reconnu volontiers par ses intrigues au service de son ambition, convaincu, lui, de son destin national. Avec ces deux personnalités au sommet de l’Etat malien, la question n’est pas de croire à ce qu’ils promettent ou disent, mais plutôt de s’attendre à ce qu’ils sont capables de faire en bien ou en mal. Le premier, pour savourer son pouvoir et le second, pour donner du contenu à son ambition.
En tout cas, on observe volontiers que Mara s’évertue à montrer qu’il est le vrai PM que le Mali n’ait jamais connu. Moussa Mara est-il ce vrai PM au service du Mali pour le Mali ? Ou est-il PM Togognini qui œuvre au nom du Mali pour son ego pour donner un contenu à son agenda national ? Jugez-en vous-même par ces «Marayades». D’abord, ceux de sa nomination.
Au petit soir de sa nomination, le voici donc face à la presse, son monde, sans même rencontrer le président qui vient de lui accorder sa confiance. Le tout nouveau PM égrène les axes gouvernementaux. Ceux déjà proposés par son prédécesseur. Il s’empresse d’ajouter que la composition de son gouvernement est politique. Et ensuite, il exprime en avance son incapacité à faire face à la crise sécuritaire du Mali. Une crise reconnue par lui comme faisant partie de l’héritage du pays. Pour mieux se faire comprendre, Mara s’explique en bamanan. Le résultat est au-delà des attentes.
Au petit matin de cette sortie médiatique, on ne parle que de cela. Le PM alimente les discussions. Comme l’affirme l’autre, il n’était pas attendu là, mais il est là. Ajoutons alors qu’il fera tout pour montrer qu’il est là. Il s’affirmera et s’imposera. C’est du reste, l’avis de la grand-mère qui croit dur comme fer que son fiston Mara ne sera jamais la tête d’un coq dans une tasse de soupe pimentée. Ce premier «Marayade» est en tout cas d’un succès incroyable. Il fait le deuil du Premier ministre Ly. Et place Mara devant les projecteurs. Le Mali a désormais un PM avec qui on va devoir compter ! De Yèrèyirabougou (la Primature), les «Marayades» se suivent, mais ne se ressemblent pas. Mais, c’est du pareil au même. Tous convergent vers l’affirmation de Moussa Mara comme un vrai PM.
Comme tel, il compose la liste des membres de son gouvernement pour diriger celle proposée par la Présidence. Peu importe ! Mais, à peine, les ministres nommés, Mara organise un conseil de Cabinet. Regardez encore, si vous le voulez, les images de ce premier conseil. Elles offrent un visage triste, comme celui de Bamako un dimanche soir. Présents, certains de ces anciens ministres ne reconnaissaient plus leur nouveau patron. Pour les promus, ce conseil de cabinet aura gâché leur joie, celle de fêter en famille leur nomination. Encore là un conseil de cabinet au rythme des «Marayades» permettant à Mara de prouver qu’il est désormais le nouveau patron. Maximum de respect à son autorité. Sauf que bien de ministres savent qu’ils ne lui doivent pas leur nomination. Brèche ouverte pour une autorité qui aura du mal à s’affirmer.
Pourtant, les ministres font encore subir un autre calvaire à travers un séminaire gouvernemental, sanctionné par l’engagement, signé et daté de tous les ministres. Par lequel chacun, en ce qui le concerne, restera engagé auprès du président IBK et œuvrera pour la solidarité et la complémentarité gouvernementales. Relayé auprès du bas peuple, l’engagement s’explique par le fait que Mara aura fait signer les ministres afin qu’ils ne volent pas le Mali. PM Mara oublie de publier ses biens, met la crédibilité et la loyauté des ministres à l’appréciation du peuple. La démarche des «Marayades» affichera le mépris du PM face à l’opposition parlementaire qui n’aura droit qu’à une rencontre de 10mn pour une journée consacrée à la majorité parlementaire. Bien fait pour cette opposition, encouragée du reste par Mara pour son rôle dans le jeu démocratique.
Les patrons des institutions de la République, des leaders de la société civile. Tout y passe. Sauf pour le moment, les jeunes et les femmes. Pour les premiers, rendez-vous est pris sur Facebook. En ce qui concerne les femmes, pas d’urgence. Leurs préoccupations s’identifient à la crise sécuritaire. Elles ne peuvent avoir de solutions durant un mandat de cinq ans. Les féministes apprécieront ! Même, la cérémonie de présentation de sa DPG à l’Assemblée nationale aura obéi à la philosophie des «Marayades». Le document présenté assurera l’honneur du Mali, fera le bonheur du Malien. Pour cela, Mara s’est engagé devant les députés. Un engagement signé en bas du document. Une première au Mali. Le PM dans sa logique partagera sa feuille de route avec les médias. Le citoyen est pris à témoin. Mais, au-delà de ces «Marayades», au sens non exprimé, que peut faire Mara pour faire avancer le pays ?
Tenez, pour montrer sa connivence avec IBK, Mara ne jure que par le programme du président. Qui n’en dispose point. Ses partisans et sympathisants du parti Yéléma s’expriment par la mise en œuvre de son projet électoral. Lequel n’a convaincu que 1,5% de l’électorat malien. L’environnement de mise en œuvre de sa feuille de route n’est pas des plus faciles. Les interférences politiques prédomineront face à une impatience grandissante du peuple. Et la crise sécuritaire qu’il ne peut résoudre, persistera. Ce qui renforcera la timidité déjà persistante des partenaires au développement. Le territoire national ne saurait s’identifier à l’espace de la Commune IV du District de Bamako. Bien des collines d’ordures existent. Devrons-nous alors inscrire le PM Mara dans cette mouvance planétaire portée par le slogan suivant : tenez-vous engagements ! C’est tout le mal qu’on lui souhaite.
Békaye DEMBELE
Le Reporter 2014-05-13 23:33:26