En recevant la soixantaine de partis politiques venue le solliciter pour être leur candidat à
l’élection présidentielle du 29 juillet, le Président IBK s’est exprimé en paraboles, comme il
en a l’habitude et le secret. A l’endroit des formations politiques ou des personnalités qui
l’ont accompagné au cours de son premier quinquennat finissant et qui n’étaient dans la
salle ce samedi 5 mai 2018, il décocha une flèche assassine. « Beaucoup accourent quand le
plat est servi, mangent à satiété, et de peur d’avoir à participer à la vaisselle, bien
rassasiés, se retirent piteusement … », s’est-il indigné. L’indignation devait être à son
comble pour qu’IBK ne mesure toute la portée de cette phrase. Parabole pour parabole, l’on
ne peut que se demander dans quel pays se trouve-t- on, pour attendre des convives qu’ils
fassent la vaisselle après s’être bourré la panse, et quelle que soit la succulence de la soupe à
eux servie ? Au Mali, en tout cas, notre maya et notre jatigiya souffriraient atrocement d’un
tel « singulier sens » de l’hospitalité où l’on confond ses invités avec des plongeurs.
Sur un autre plan, IBK s’exprimant ainsi, avoue que pour lui, le pouvoir est un festin;
l’accompagner dans le gouvernement, ce n’est pas assumer sa part de fardeau, mais
prendre, sa portion de gâteau. Troublant aveu de la part de celui qui passe pour un homme
d’Etat avec une très haute idée de sa mission. Ainsi, ce qui importe pour un ministre, ce
n’est point sa contribution à la construction du pays, mais son indéfectible allégeance envers
celui qui lui a confié un portefeuille. Que l’on ne se méprenne pas ! La loyauté est ingrédient
indispensable à la collaboration entre un membre du gouvernement et ses patrons,
président de la République et premier ministre. Mais, cette valeur ne saurait l’emporter sur
la compétence et encore moins la probité ou sur le dévouement envers sa patrie et ses
institutions. Méconnaître cette évidence est une attitude qui amène à ravaler les ministres
de la République aux rangs de vassaux, de pique-assiettes ou simple zélateurs. Ce qui
conduit inévitablement à déprécier la République et les institutions qui en découlent.
Le dernier point sur lequel l’on peut s’interroger est la manière dont IBK conçoit les rapports
entre les partis de la majorité présidentielle et le Président de la République. La simple
bienséance voudrait que les formations et les personnalités politiques participant à la
gestion du pouvoir durant un mandat, soient solidaires des actions du gouvernement et
assument le bilan. Cependant, elles peuvent prendre leur liberté quand elles le veulent, en
quittant le gouvernement ou les institutions qu’elles occupent. En aucun cas, nul n’est obligé
d’accompagner le président sortant dans sa recherche d’un second mandant dès le premier
tour. Chaque nouvelle élection présidentielle est l’occasion de composer et recomposer une
nouvelle majorité présidentielle, sur la base de nouvelle offre politique. Donc, là encore, il
n’y a pas de quoi s’indigner lorsque ceux qui ont accompagné pendant un mandat décident
d’agir autrement. Chaque mandat étant une rebelote.
Modibo Diallo