Depuis l’adoption à l’Assemblée Nationale du projet de loi relative à la révision de la constitution de 1992, la scène politique malienne n’est-elle pas en passe de rentrer dans une zone de turbulences ? Il ne se passe plus de jour où partisans et adversaires du projet ne se donnent des coups par médias interposés. Des très chaudes empoignades sont en perspectives d’ici le 9 juillet 2017, date du referendum. Le ton de la contestation contre ce qu’il convient désormais d’appeler la Constitution IBK, a été donné par le Mouvement « Trop c’est Trop », qui a voulu battre le pavé le jeudi 8 juin pour demander le retrait du projet de constitution. Contre toute attente, c’est une horde d’agents de forces de l’ordre qui s’abat sur les manifestants noyés dans un nuage de fumée de gaz lacrymogène. Les leaders du mouvement, qui affirment avoir enregistré quatre blessés, dont deux graves, déclarent ne plus reculer devant ce qu’ils ont qualifié de projet de la compromission, de la soumission et de la fin de la démocratie chèrement acquise. Les jeunes de « trop c’est trop », rappellent opportunément des manifestants du Mouvement Démocratique de 1991 regroupés au sein de l’Association des jeunes pour la démocratie et le Progrès, AJDP, qui ont battu le pavé pour réclamer plus d’emplois, plus de liberté et l’instauration de la démocratie au Mali. Ils ont été qualifiés, à l’époque, des « Fous de la démocratie ». Cette marche qui a été dispersée par les forces de l’ordre, aura, du coup, amorça le compte à rebours de la fin du régime dictatorial du Général Moussa Traoré. Comparaison n’est pas raison. Cependant, les mêmes causes produiraient les mêmes effets. Les autorités maliennes doivent non seulement faire preuve de discernement et de maturité, mais aussi et surtout avoir la sagesse de retirer le projet comme l’ont fait Alpha Oumar Konaré en 2001 et Amadou Toumani Touré en 2011.
Rien que par la violence verbale des uns contre ce projet et la résolution des autres à faire passer le texte constitutionnel, on peut affirmer que le Mali est en passe de rentrer dans une zone de turbulences. Le constat est que d’un camp à l’autre, les positions semblent être irréconciliables et le ton est loin d’être à l’apaisement. Avant l’ouverture officielle de la campagne pour le referendum constitutionnel le 23 juin, les signaux d’une violence, pour le moment, verbale sont perceptibles entre les opposants regroupés au sein d’un Collectif dénommé AN TE SON, ABANA et les partisans du oui avec comme têtes de proue les ministres de la Réforme de l’Etat et des droits de l’Homme, Me Kassoum Tapo et son homologue de l’Administration Territorial Tièman Hubert Coulibaly. Les jours à venir s’annoncent houleux.
Youssouf Sissoko