Mot de la semaine : Démission

Le régime IBK est suspendu à la décision que prendront ce vendredi 5 juin les militants et sympathisants de l’Imam  Mahmoud Dicko, des partis politiques du Front pour la Sauvegarde de la Démocratie, FSD et ceux du Mouvement Espoir Mali Kura, EMK. Les trois entités sociopolitiques ont décidé de battre le pavé ce vendredi pour demander la démission du Président de la République, Ibrahim Boubacar Keita, pour des griefs qu’ils ont jugé gravissimes pour un chef d’Etat. Pourront-ils y parvenir ? A quoi devrait-on s’attendre après une telle manifestation ?

Les organisations sociopolitiques initiatrices de la marche reprochent essentiellement au Président de la République un avilissement du pays sur tous les plans : scolaire, sanitaire, économique, social, politique, sécuritaire et même humanitaire. Ils disent ne pas comprendre comment celui qui a promis une gouvernance vertueuse pouvait tomber aussi bas ? Ils ont rappelé à IBK ses anciens propos ceux qu’il a tenus à l’encontre de l’ancien Président de la République Amadou Toumani Touré. Sans détour et dans un langage empreint de discourtoisie, IBK avait dépeint tout ce que l’ancien Président ATT avait fait. Il l’a qualifié d’incompétent, d’incapable et d’illettré. Il a passé au crible sa gouvernance avec son corollaire de corruption, de népotisme et de gabegie pour en conclure que s’il était ATT face aux manquements graves aux principes de bonne gouvernance, il aurait révoqué immédiatement ses ministres qui se seraient rendus coupables. Comment celui qui a tenu des tels propos pourrait  en faire autant sinon plus graves que son prédécesseur à qui il a égrené un chapelet des griefs ? L’Imam Dicko  au micro de notre confrère de Renouveau TV, et en guise de réponse à ses détracteurs qui trouvent excessive sa demande de démission, il a tout simplement rappelé les mêmes propos qu’IBK a tenus à l’encontre d’ATT. Donc l’Imam pense qu’il n’est nullement excessif de demander démocratiquement à un président de la République de démissionner surtout sur la base des gravissimes faits à lui reprochés. Pourront-ils obtenir cette démission et quelles en seront les conséquences sur la précaire stabilité de notre pays ? Voici la logique question que tout bon citoyen doit se poser.

Les manifestants ont bel et bien le droit de réclamer la démission du Président de la République. Ils se seraient inspirés de certains exemples  comme l’Algérie,  l’Egypte, et la  Tunisie, mais en le disant et surtout en l’obtenant il faudrait s’attendre à des graves conséquences sur la stabilité du pays. La première conséquence est l’anarchie, voire la chienlit généralisée que son départ créerait. Le camp du Président comme celui des manifestants ne vont jamais s’entendre sur le reste du processus jusqu’aux élections présidentielles. Dans un désordre indescriptible, l’armée s’invitera dans les débats pour mettre de l’ordre. Cette dernière ne va-t-elle pas confisquer le pouvoir comme en 1968 ? La deuxième conséquence de la chute prématurée du régime pourrait être la désagrégation totale du pays. En cas de crise institutionnelle, comme en  2012,  on risque d’assister à une levée des boucliers au nord avec la CMA, au centre avec les différentes communautés demandant toutes, leur indépendance. La troisième conséquence de la démission du Président IBK en plein mandat pourrait être les sanctions de la communauté internationale. Ne serait-ce que par principes, on mettra le Mali  en quarantaine avec  une suspension de toutes coopérations bilatérales multilatérales jusqu’au retour des institutions démocratiques. Le pays pourrait-il résister à un embargo ?  La réponse est non, donc la démission d’un Président de la République est le pire des scénarios pour une République comme la nôtre, pauvre et  enclavée.

Youssouf Sissoko