Le taux de mortalité néonatale et infantile chute d’année en année au Mali, mais le problème reste posé. Et la non observance des consultations prénatales, longtemps considérée comme la principale cause de cette situation, n’est plus la seule explication. Les spécialistes s’accordent à dire aussi que le manque d’eau, d’assainissement et les mauvaises pratiques d’hygiène font également partie des causes majeures de décès néonatals.
A en croire Dr Awa Diall, médecin pédiatre à l’hôpital Grabriel Touré, tous les agents de santé sont aujourd’hui unanimes que le manque d’accès à l’eau potable et à un assainissement adéquat sont sources de beaucoup de maladies chez les enfants. « Il est incontournable dans la lutte contre la mortalité
néonatale et infantile. Avant, pendant et après l’accouchement, l’enfant reste très fragile, donc allergique à un environnement mal sain qui peut lui coûter une infection mortelle. L’infection commence d’abord par la peau et remonte ensuite aux autres organes », explique Awa Diall. C’est pourquoi, poursuit-elle, l’utilisation de l’eau potable est vivement recommandée durant l’accouchement où le risque d’infection est élevé chez le nouveau-né. « Au moment de l’accouchement, la sage-femme doit se laver les mains avant de recevoir l’enfant au risque de l’infecter. Elle doit également observer les mêmes mesures d’hygiène durant tout le processus de l’accouchement : la coupure du cordon, la prise du poids et de la taille de l’enfant, jusqu’à son lavage qui intervient six heures après l’accouchement », a indiqué la pédiatre.
Le non-respect des mesures d’hygiène par le personnel de la santé pendant l’accouchement est aussi cause de transfert des germes de maladies d’un enfant à un autre. L’importance de l’eau potable, de l’hygiène et de l’assainissement dans la réduction de la mortalité néonatale et infantile n’est plus à démontrer.
Selon Dr Diall, l’amélioration de la qualité de l’eau ferait reculer de 6% à 25% la morbidité attribuable aux maladies diarrhéiques. Il a été établi que l’accès à l’assainissement contribue à la réduction des cas de diarrhée chez l’enfant de 7 à 17 % et des décès des moins de 5 ans de 5 à 20 %. Le lavage des mains au savon est aussi reconnu comme moyen simple et efficace de prévention des certaines infections et des maladies diarrhéiques.
Mais malheureusement, il n’est pas rare d’observer les mauvaises pratiques d’hygiène dans beaucoup de nos centres de santé.
L’eau, l’hygiène et l’assainissement sont intimement liés. Le manque d’eau potable rend difficile l’observance des mesures d’hygiène. Tel est le triste constat fait au Centre de Santé Communautaire (CSCom) de Kanadjiguila en commune du Mandé qui souffre d’un manque crucial d’eau potable, obligeant
le personnel et les patients du centre à faire régulièrement recours à l’eau de puits. A en croire Kadiatou Sow, sage-femme au centre, l’eau est tellement rare que le personnel sanitaire se contente seulement d’une bouilloire d’eau pour nettoyer les femmes après l’accouchement. « Nous avons de vrais soucis en terme d’hygiène et d’assainissement. Car on ne peut pas parler d’hygiène sans eau potable. Nous sommes approvisionnés en eau par un château en
caoutchoucs qu’on ne peut laver. En plus, régulièrement nous sommes confrontés à des coupures d’eau », a déploré la sage-femme.
Au CSCom de Mamaribougou dans la commune du Mandé, le constat est pire. Ce centre de santé est approvisionné par un puits qui tarit chaque année à partir du mois d’avril. Conséquence, selon le chef de poste, Nawaly Kéïta, par faute d’eau, le centre n’est nettoyé que deux fois par semaine. L’offre des
services de soins devient également difficile.
Cette situation interpelle les décideurs. Compte tenu de l’importance de l’accès à l’eau potable, l’hygiène et l’assainissement dans la réduction de la mortalité néonatale et infantile, il convient de les inscrire comme priorité dans les politiques et programmes de santé maternelle et infantile.
Youssouf Z