Mme Konaté: La Cellule Technique des Réformes du Cadre des Affaires (CTRCA) est née de la volonté du gouvernement malien de promouvoir un développement harmonieux, à travers un partenariat constructif entre les secteurs public et privé. Créée en 2009, la CTRCA est placée sous la tutelle du Ministère du Commerce et de l’Industrie. L’objectif général de la cellule vise à améliorer la pratique des affaires par la simplification et la facilitation des procédures administratives, d’une part, et la réduction des coûts et délais liés à l’obtention des licences administratives, de l’autre, en vue de faire du Mali une bonne destination pour les investisseurs.
Ses missions prioritaires concertent la facilitation de l’ensemble des étapes liées à l’implantation et au développement des entreprises privées. La CTRCA assure le secrétariat du Comité Mixte de Suivi des Réformes Etat / Secteur privé, présidé par le Premier ministre et anime les différents cadres de concertation Etat / Secteur privé créés au niveau technique autour d’indicateurs comme la création d’entreprises, le paiement des impôts et taxes, le permis de construire, le commerce transfrontalier, le transfert de propriété et la sécurité juridique des investissements. Pour ce faire, la Cellule coordonne aussi les actions de renforcement des capacités et de communication sur les réformes planifiées. Elle assure le suivi-évaluation des réformes du Cadre des Affaires au Mali.
De sa création à nos jours, peut-on savoir ce que la Cellule a apporté au monde des affaires?
De la création de la cellule à nos jours, les principales réformes réalisées ont favorisé l’amélioration de la qualité des services aux usagers, la compétitivité et la viabilité des entreprises locales dans de nombreux domaines.
Pour la Création d’entreprises, il s’agit de l’opérationnalisation du Guichet Unique de Création d’entreprises au sein de l’Agence pour la Promotion des Investissements (API- Mali), le 29 mai 2009, qui a permis de simplifier ou d’éliminer les procédures dont le nombre a été progressivement réduit de 11 à 4 en 2011. Il est à noter la réduction des délais, qui sont passés de 26 jours en 2008 à 3 jours à l’intérieur du Guichet Unique. Les frais de création d’entreprises ont été aussi réduits. Le Guichet unique a effectivement contribué à booster la création d’entreprises, avec 14 087 entreprises créées entre juin 2009 et juillet 2012, soit en moyenne un taux d’augmentation de près de 20% par an.
En outre, l’interconnexion des services utilisateurs du Numéro d’Identification Nationale NINA (Direction Générale des Impôts, Institut National de la Statistique, Institut National de Prévoyance Sociale et Agence Nationale pour l’Emploi) au Guichet Unique de création d’entreprises permet l’échange de données sécurisées entre lesdits services et le Guichet unique et le nouveau Code des Investissements adopté (la loi N° 2012- 475/P-RM a été promulguée).
Concernant le Permis de construire, son obtention a été facilitée par la suppression de l’exigence pour le promoteur de conduire une étude d’Impact Environnemental et Social (EIES) pour les entreprises à moindre risque en juin 2009. Cette action a permis une réduction du délai de 9% et du coût de 32,7% au profit des entreprises selon les estimations du rapport Doing Business. S’y ajoutent l’allégement du processus d’obtention du permis de construire de 30 à 19 jours en 2009 et à 11 jours pour les petits édifices en 2010 et la simplification du mécanisme, par la mise en place de voies de recours pour les pétitionnaires / investisseurs. En un an, on a constaté l’augmentation du nombre de Permis octroyés et près de 200 projets de construction ont bénéficié de la mesure sur l’EIES.
Le Payement des Impôts et taxes a profité de l’élaboration et de l’utilisation du formulaire de déclaration unique pour le payement des impôts et taxes à fréquence mensuelle en juillet 201. Le Commerce transfrontalier est désormais plus aisé grâce à l’opérationnalisation du TRIE unique manuel, en cours de mise en œuvre, qui sera effective en décembre 2012, pour rendre fluides les échanges sur le corridor par la simplification des procédures et la réduction des délais à l’import et à l’export. L’interconnexion de la Douane sénégalaise à l’antenne de la Douane malienne au port de Dakar permettra la mise en œuvre du TRIE informatique et la suppression, en 2010, des contrôles redondants aux abords des bureaux de dédouanement et la main levée des marchandises une fois que les droits de l’Etat sont acquittés (lettres circulaires de la Direction Générale des Douanes, de la Direction Nationale du Commerce et de la Concurrence et de la Direction Nationale de l’Agriculture) ont réduit les délais, tout comme l’informatisation, en 2010 toujours, du formulaire de déclaration D24, permettant d’enlever la marchandise sur engagement.
La réduction des taux de Transferts de propriété est importante, de 15 à 7% aujourd’hui et l’exécution des contrats profite de mesures comme la protection judiciaire du lien contractuel, la célérité des opérations et l’exécution diligente des décisions de justice. La protection des investisseurs a été renforcée par l’amélioration des conditions de divulgation d’informations par les entreprises, au profit des actionnaires minoritaires et l’instauration d’un climat de confiance.
Enfin, la Fermeture des entreprises est plus rapide avec la célérité des opérations et l’exécution diligente des décisions de justice.
Le contexte actuel, caractérisé par l’absence d’Investissements, a-t-il joué sur le fonctionnement et les perspectives de votre structure?
Il est évident que le contexte actuel est très difficile pour le monde des affaires. Certaines entreprises sont en train de fermer ou de mettre leur personnel au chômage technique. Des fournisseurs habituels n’accordent plus de crédits et des banques nationales connaissent des difficultés auprès des banques à l’étranger pour la garantie des transactions (crédits documentaires). Cependant, la CTRCA continue ses activités et prépare activement les grands projets, qui sont financés d’abord par le Budget national.
Son rôle étant de faciliter, simplifier et harmoniser les procédures, la CTRCA met le temps présent à profit pour revoir les textes et procédures administratifs dans les domaines du commerce transfrontalier et du permis de construire. Il s’agit pour la Cellule de détecter toutes les lourdeurs administratives, pour les simplifier ou au besoin les supprimer et d’identifier les textes contradictoires ou redondants, pour les harmoniser et les simplifier. L’objectif étant, à chaque fois, de faciliter le travail des exportateurs, des importateurs et des transporteurs de marchandises.
La Cellule doit également travailler à faciliter les collaborations nécessaires entre les différentes administrations intervenant dans les affaires et le secteur privé, DNCC, Douanes, Impôts, Contrôles, DNTTMF, Trésor, Transitaires, Transporteurs, Assurances et Banques. Ce n’est que dans un contexte de stabilité que les réformes peuvent accroître le rendement espéré de l’investissement, stimuler son développement et, par conséquent, entraîner une hausse de la croissance économique.
En dépit de la faiblesse des investissements publics dans le contexte actuel, la Cellule entend être prête dès la reprise, avec les moyens disponibles, pour la mise en œuvre du plan d’actions prioritaires 2012.
Le pays est en récession. Quel sera l’apport de votre structure pour aider le Gouvernement à passer ce cap?
Les réformes sont capitales, dans un pays comme le Mali, pour amorcer un développement certain et réduire significativement la pauvreté par une augmentation des investissements privés nécessaire aux entreprises et à l’emploi. Du fait de la continentalité du Mali, tout le monde est conscient du fait qu’il nous faut un approvisionnement régulier en marchandises diverses et biens d’équipement, pour couvrir nos besoins fondamentaux.
La Cellule travaille à l’établissement d’un climat sain des affaires, d’un environnement propice au développement des affaires et d’un accroissement des recettes de l’Etat. Elle a déjà travaillé à l’établissement d’un cadre de concertation entre les opérateurs économiques et l’administration publique. Elle est à la tâche pour la mise en place d’un Guichet Unique Electronique du Commerce Extérieur et des Transports. Ce Guichet sera une plateforme informatique, reliant entre elles toutes les administrations impliquées dans l’import / export et le transport transfrontalier de marchandises. Il permettra aux opérateurs d’effectuer directement, en ligne, toutes leurs procédures administratives et fiscales, partout où la connexion à cette plateforme sera possible.
Parallèlement, la CTRCA est occupée à implanter une autre plateforme informatique sur le permis de construire et demeure mobilisée avec d’autres acteurs, pour l’informatisation du Registre du Commerce et du Crédit Mobilier (RCCM).
Quel avenir pour la CTRCA dans le monde des affaires malien?
Conformément au Décret N°09-127/PM-RM du 25 mars 2009, modifié par le Décret N°2011-142/PM-RM du 25 mars 2011, la CTRCA est chargée du suivi-évaluation des réformes. A ce titre, elle continuera toujours son rôle d’interface entre le monde des affaires et le secteur public, pour proposer des solutions de mise en œuvre des réformes. Elle mettra également en œuvre le volet communication qui accompagne les mesures de réforme à l’endroit de l’ensemble des acteurs. C’est dire que les réformes ne peuvent et ne doivent pas rester de simples compilations de projets, dont la mise en œuvre et les impacts n’intéresseront plus personne, mais plutôt qu’elles doivent déboucher sur une amélioration permanente du fonctionnement des services et de la qualité des prestations rendues.
Avez-vous un appel à lancer à vos partenaires, extérieurs comme intérieurs?
A nos partenaires de l’intérieur, nous disons que les mesures de réforme nécessitent l’implication de tous les acteurs, publics et privés. Les réformes en cours (Guichet unique du permis de construire, Guichet unique électronique du commerce extérieur et des transports, TRIE unique…) seront le fruit d’un partenariat et d’une confiance mutuelle entre le secteur public et les opérateurs économiques. Cet élan et cette méthode doivent continuer. Les acteurs privés du commerce extérieur doivent savoir que les réformes sont faites pour eux, tandis que les agents de l’Etat doivent comprendre que la simplification des procédures entraîne l’informatisation et la modernisation des structures et accroît les recettes de l’Etat.
Nous souhaitons à tous et toutes le retour rapide à une situation normale, afin que nos partenaires extérieurs puissent revenir et / ou reprendre leurs activités d’appui au développement de notre économie.