Le 31 juillet de chaque année est célébrée la Journée panafricaine des femmes. Au-delà de la célébration qui fait le plus souvent plus de place au folklore qu’à la réflexion, nous pensons que le devoir de reconnaissance voudrait qu’on rende hommage à une grande pionnière qui a donné à l’Organisation panafricaine des femmes (OPF) ses lettres de noblesses au Mali et dans la sous-région : Mme Alwata Ichata Sahi ! Zoom sur une pionnière de plus en plus effacée, mais toujours influente.
Une femme d’une valeur inestimable ! Une dame à l’exceptionnel sens du leadership. Une reconnaissance unanime des proches, anciens collaborateurs, compagnons de lutte… de Mme Alwata Ichata Sahi. Une vraie Nyeleni qui a pris l’Organisation panafricaine de la femme (OPF) à bras le corps pour la sortir de l’ombre grâce à son engagement et son talent dans le plaidoyer et le lobbying.
Ses efforts ont permis d’abord aux femmes de s’approprier cette organisation pour en faire un tremplin incontournable pour les mobiliser ou pour élaborer toute politique en leur faveur. Sous sa conduite, l’OPF a toujours eu son mot à dire dans la vie de la nation, dans les orientations sociopolitiques et économiques du pays et de l’Afrique de l’ouest !
Le Mali avait perdu le Secrétariat Général de cette organisation suite aux évènements de novembre 1968. Et ce n’est que trente ans plus tard (1998) que notre pays a été élu cette fois-ci pour abriter le Secrétariat régional l’Afrique de l’ouest que Mme Alwata a dirigé de cette date jusqu’en 2011. Elle a ensuite passé la main de son plein gré.
Et les 13 années qu’elle a passées dans ce fauteuil ont marqué la vie de l’OPF d’une encre indélébile. En témoignent les avancées réalisées sous sa direction. Il s’agit, entre autres, de la signature d’un accord de siège entre le Mali et l’OPF ; l’élaboration d’un Plan d’action sous régional dont les principales axes tournent autour d’une synergie d’action comme la mise en place d’antennes nationales ; création de comités de femmes influentes et sages pour gérer les conflits ; la généralisation de la célébration de la Journée panafricaine dans tout le Mali et dans la sous région ; la consolidation des relations entre les Maliennes et les femmes des communautés africaines résidant au Mali ; la réalisation d’un bosquet de l’intégration africaine au sein duquel il y a un monument en hommage aux femmes africaines…
Une héritière devenue icône
La liste est loin d’être exhaustive. Elle ne mentionne pas surtout les brillantes contributions apportées dans plusieurs fora à travers le monde sur les droits des femmes, etc.
Ainsi, Mme Alwata a repris et hissé très haut le flambeau hérité de ces femmes leaders du continent ont décidé de créer, le 31 juillet 1962 en Tanzanie, l’Organisation panafricaine des femmes pour assurer un développement intégré et harmonieux des femmes d’Afrique.
Dans la lutte pour l’émancipation et l’autonomisation de la Femme, Mme Alwata Ichata Sahi est une pionnière, un modèle… De la Coopérative des Femmes pour l’Education, la Santé Familiale et l’Assainissement (COFESFA) au ministère de la Promotion de la Femme, de l’Enfant et de la Famille (pendant le régime Intérimaire du Pr. Dioncounda Traoré) en passant bien naturellement par l’OPF, elle devenue une icône qui a énormément contribué à l’éveil des consciences par rapport à la situation des femmes et aux avantages qu’une communauté ou un pays peut tirer de leur plein épanouissement.
Une mission remplie en toute discrétion avec beaucoup humilité, sans jamais tirer la couverture à elle seule… Une humilité dans laquelle elle baigne toujours car, contrairement à ce qu’on peut imaginer, Mme Alwata continue à apporter son expérience et son expertise à la vie de cette nation dans bien de domaines. Mais, en toute discrétion ! D’ailleurs depuis quelques années, elle préside le Conseil d’administration de l’Agence pour la Promotion des exportations du Mali (APEX-MALI).
Et chaque fois qu’elle l’opportunité, elle n’hésite pas à prendre la parole pour exhorter la société à renouer avec les valeurs positives qui ont toujours été la charpente de la vie en société, de la vie en couple dans notre pays. «Accrochés aux réseaux sociaux et aux nouvelles technologies, nos enfants ne connaissent rien à nos valeurs essentielles. Les jeunes pensent que le mariage se limite à l’amour, à s’aimer. C’est pourquoi les unions se disloquent facilement car ni les maris ni leurs épouses ne sont préparés à faire réellement face à la vie en couple», a déploré l’ancienne Secrétaire exécutive de l’Organisation panafricaine des femmes (OPF) et ancienne ministre de la Promotion de la Femme, de l’Enfant et de la Famille pendant la période intérimaire. C’était lors de la cérémonie de remise des «Trophées d’Or» du «Consortium pour la Citoyenneté et la Solidarité pour tous» le 16 février 2019 au Radisson Blu de Bamako.
Un parcours atypique axé sur des valeurs
Native de Gao et la soixantaine abordée avec une élégance rare, Mme Alwata est une femme politique malienne. Enseignante de formation, titulaire d’un baccalauréat en philosophie et d’une maîtrise d’anglais, Alwata Ichata Sahi a notamment occupé les fonctions de chef de cabinet du ministère du Logement, des Affaires foncières et de l’Urbanisme. Elle sera par la suite nommée ministre de la Famille, de la Promotion de la Femme et de l’Enfant le 25 avril 2012 dans le gouvernement du Dr Cheick Modibo Diarra. Elle est reconduite au même poste dans le gouvernement d’union nationale le 20 août 2012.
Détentrice de plusieurs diplômes et attestations dans le cadre du renforcement de capacités après de nombreux stages et formations, Mme Alwata a accumulé les expériences en matière de gestion et de protection de l’environnement, de promotion de la femme, du management, de la formation et de l’organisation des associations de femmes et de jeunes. Au niveau associatif, elle a présidé la Coopérative des femmes pour l’éducation, la santé familiale et l’assainissement (COFESFA) entre 1993 et 1998. Sur le plan politique, elle a été conseillère municipale en Commune II de Bamako De 1995 à 2002. Parallèlement, elle est consultante et facilitatrice de plusieurs ateliers de formation. Chef de projet à plusieurs reprises, elle a également participé à plusieurs stages et formations. Médaillée du Mérite agricole du Mali dans le cadre de l’environnement et Chevalier de l’Ordre national du Mali, Alwata Ichata est une polyglotte (elle parle français, anglais, sonrhaï, tamasheq, bamanan et haoussa) qui adore aussi la cuisine, la lecture, la musique et la marche.
Une reconnaissance unanime sur les qualités de la Nyeleni
Et ceux ou celles qui ont approché cette femme leader ne tarissent pas d’éloges pour la décrire. «Mme Alwata est une vraie amazone qui ne cesse de se battre pour une meilleure et une plus grande représentation des femmes dans les instances de prise de décisions… Restons debout avec elle pour que la lutte ne soit pas vaine», témoigne le doyen Maliki Kanté depuis Paris (France).
Et pour Aïchatou Tiokary, une admiratrice de l’icône de l’émancipation féminine, «Mme Alwata est une vraie Nyeleni. Grâce à elle, un grand nombre de femmes savent aujourd’hui comment se comporter pour le bien être de leurs familles. Prions Dieu pour qu’elle soit toujours en bonne santé afin de continuer à nous guider sur le droit chemin».
«C’est une femme battante qui a beaucoup apporté à l’OPF. C’est une femme leader compétente, digne et très humble avec toujours le sourire aux lèvres…», a témoigné Mme Maïga Sina Damba, leader politique et ancienne ministre de la Promotion de la Femme, de l’Enfant et de la Famille
Alwata Ichata a donc porté l’OPF en lui consacrant entièrement son énergie, sa bravoure et son intelligence. Cette dame au grand cœur a su donner à cette organisation ses lettres de noblesse dans la dignité. Loin de lui monter à la tête, toute cette reconnaissance unanime et cette notoriété méritée ne font que conforter l’humilité et raffermir la foi d’Alwata Ichata Sahi.
«Que Dieu nous donne la force de continuer ce noble combat pour le bonheur des peuples africains», souhaite cette pieuse mère de famille, une citoyenne modèle et une patriote convaincue.
Moussa Bolly