Migrants: Rome légifère pour sauver son accord avec l’Albanie

Le gouvernement italien, dirigé par Giorgia Meloni et formé d’une coalition entre la droite et l’extrême droite, a adopté ce lundi un décret visant à contourner une décision judiciaire qui bloquait un accord sur les migrants avec l’Albanie.

La Première ministre Meloni a accusé les juges du tribunal de Rome de partialité après qu’ils ont ordonné le retour en Italie de 12 migrants égyptiens et bangladais qui avaient été envoyés en Albanie. Cette décision représente un revers pour Meloni, qui souhaitait que son plan serve de modèle pour l’Europe.

Le décret adopté vise à surmonter cet obstacle en désignant 19 pays comme « sûrs », ce qui permettrait à Rome de traiter rapidement les demandes d’asile depuis l’Albanie, avec la possibilité d’une expulsion pour les demandeurs issus de ces pays. Trois pays – le Cameroun, la Colombie et le Nigeria – ont été retirés de la liste précédente pour se conformer à une décision récente de la Cour de justice de l’Union européenne (CJUE), selon Matteo Piantedosi, ministre de l’Intérieur.

Le droit européen prime sur le droit national, et les juges italiens se sont appuyés sur une décision de la CJUE qui stipule que seuls des pays entiers peuvent être désignés comme sûrs, et non certaines régions spécifiques. Toutefois, la nouvelle liste comprend toujours le Bangladesh, la Tunisie et l’Égypte, même si les demandeurs d’asile peuvent toujours faire valoir leur situation personnelle.

Le ministre de la Justice, Carlo Nordio, a critiqué la décision de la CJUE, la qualifiant de complexe et mal interprétée. Giorgia Meloni a également dénoncé le fait que les juges se prononcent sur la désignation des pays sûrs, estimant que cela relève du gouvernement.

Le décret, qui entre en vigueur immédiatement, vise à accélérer les procédures et à éviter que les demandes d’asile soient utilisées pour échapper à la justice. Cependant, certains experts, dont l’avocat spécialisé en immigration Guido Savio, estiment que cette modification législative pourrait soulever de nouvelles questions juridiques.

L’Italie, en première ligne face aux arrivées de migrants traversant la Méditerranée, cherche depuis longtemps à renforcer le soutien de ses voisins européens pour faire face à la pression migratoire. Giorgia Meloni, élue en 2022, avait promis de réduire les débarquements et d’accélérer les expulsions.

La tension avec les juges s’est encore aggravée après que Meloni a publié des extraits d’une correspondance interne d’un juge, dans laquelle il mettait en garde contre l’influence de la Première ministre, qu’il jugeait plus dangereuse que l’ancien Premier ministre Silvio Berlusconi. L’opposition a critiqué la publication de cet extrait, soulignant que le juge appelait également à défendre l’indépendance de la justice, et non à faire de l’opposition politique.

Au niveau de l’Union européenne, chaque État membre est responsable de la création de sa propre liste de pays sûrs, bien que l’UE envisage d’élaborer une liste commune.

La rédaction

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