Pays d’immigration pour des milliers de Maliens, la Libye est aussi le premier investisseur étranger au Mali comme en témoignent des dizaines de projets financés et les entreprises rachetées par le pays de Mouammar Kadhafi. Un départ du Guide de la révolution libyenne sera fortement ressenti par notre pays. Revue des investissements de la Libye au Mali.
Au cours des dix dernières années, l’Etat et les opérateurs libyens ont investi la quasi-totalité des secteurs économiques maliens. Ils interviennent dans des domaines tels que le tourisme, l’hôtellerie ou le commerce. En termes d’investissements, la Libye injecte aussi des milliards dans le secteur pétrolier.
Compte-tenu des rapports bilatéraux entre le Mali et la Libye, l’hôtel de l’Amitié ainsi que l’ex-hôtel Kimpesky (actuel El Farouk) situés en bordure du fleuve ont attiré investisseurs libyens.
Les Libyens ont pu acquérir la plus grande structure hôtelière du pays à savoir l’hôtel Laico Niger. Puis, ils ont racheté l’hôtel Azalaï de Tombouctou. Le rachat à 6 millions d’euros du Mariétou Palace et bientôt terminé, vient compléter ce patrimoine immobilier.
Rien que pour Mariétou Palace (dont l’inauguration est prévue pour 2011), le directeur général de l’Omatho, Oumar Balla Touré signale que la Libye investira à hauteur de 23 milliards de F CFA. Car, dit-il, cet hôtel a un positionnement stratégique et constituera à n’en pas douter un mirador pour la ville de Bamako. Cet important projet prévoit aussi l’aménagement et l’embellissement des berges du fleuve Niger sur environ 2 km.
Selon M. Touré, les Libyens vont investir plus d’une cinquantaine de milliards de F CFA dans le secteur de l’hôtellerie au Mali. Cet investissement, selon lui, restera au Mali, d’autant que la main d’œuvre et les infrastructures resteront maliennes.
« Il est prévu 600 à 700 emplois directs créés grâce aux fonds libyens. Or, dans le secteur du tourisme, un emploi direct crée deux emplois indirects ». Pour le patron de l’Omatho, l’investissement déjà acquis et en perspective pour les opérateurs libyens, s’estime aujourd’hui à près de 70 milliards de F CFA.
Pour ce qui est du secteur pétrolier, l’investissement libyen croît de manière exponentielle. Avec l’avènement il y a 3 ans, de la chaîne pétrolière « Oil Libya » qui est en train d’étendre ses racines dans le pays. A en croire nos sources, ils sont nombreux, ces opérateurs pétroliers libyens qui aspirent à exploiter l’énorme potentiel que leur offre le marché malien.
Les Libyens sont aussi très présents dans le secteur bancaire du Mali par le biais d’une nouvelle banque : la Banque commerciale du Sahel (BCS) dont le capital se chiffre à 10 millions d’euros. Cette banque s’est spécialisée dans le micro-crédit.
La Société nationale du tabac et allumettes du Mali (Sonatam) a aussi été sauvée de la faillite par la Libye qui l’a rachetée à 70 millions d’euros pour assurer sa relance. Toutes ces activités vont désormais bénéficier de l’encadrement d’un bureau populaire d’investissement créé par des privés libyens à Bamako, dans le quartier chic d’Hamdallaye.
Cette structure est chargée de coordonner leurs actions. L’un de ces privés vient d’installer une société de concassage de pierres à Koulikoro, 2e région malienne après Kayes. Coût du projet : 2 millions d’euros.
Et le guide de la Grande Jamahiriya libyenne, Mouammar Kadhafi, s’est engagé à financer la nouvelle cité administrative en chantier depuis des années.
Malibya, un projet d’aménagement de 100 000 ha en cours à l’Office du Niger
Le gouvernement libyen a décidé aussi de mettre en valeur 100 000 hectares dans la zone Office du Niger à Ségou mis à sa disposition par le Mali. C’est dans ce cadre qu’une société dénommée Malibya Agriculture a été créée en vue de concrétiser les aspirations de nos deux peuples frères et de leurs dirigeants en matière d’autosuffisance alimentaire.
Société dédiée au développement agricole du Mali, Malibya Agriculture prévoit de grands travaux d’aménagements à l’Office du Niger pour de la production de riz hydride dont les prévisions dépassent largement le rendement habituel à l’hectare, en collaboration avec le Centre national chinois du riz hybride.
Le premier volet de ce projet est relatif à l’agrandissement du canal d’approvisionnement en eau et au bitumage d’une route de 40 km dans la zone de Macina, précisément à Bougouwéré. Ce premier volet devrait commencer avec l’aménagement d’une tranche de 25 000 hectares. Aujourd’hui, ce sont les travaux de 17 000 ha qui sont engagés. Pour cela, un gigantesque canal de deux lots a été creusé.
Le premier est un don de la Libye au Mali. Il est long de 18 km et large de 120 m, d’une profondeur de 3 m avec un débit de 230 m3/s. Avec ses régulateurs, ce premier lot comporte trois ponts et un déversoir pour drainer l’eau ailleurs. Quant au second lot, il est long de 22 km et large de 54 m, avec une profondeur de 4 m et un débit de 130 m3/s. Il comporte deux régulateurs et deux ponts.
C’est sur ce deuxième lot que les investisseurs libyens pourront intervenir. Les aménagements qui vont être réalisés ici seront d’un grand apport pour la zone Office du Niger en quête d’un développement intégré.
Un changement de régime en Libye remettrait en cause tous ces projets dont l’importance est inestimable pour l’économie nationale. Selon des leaders de l’opposition au pouvoir de Mouammar Kadhafi, les investissements libyens à l’étranger sont plutôt des stratégies déguisées de blanchement d’argent. C’est pourquoi, ils promettent d’en faire un audit dès leur arrivée aux affaires. C’est pourquoi, les jours à venir seront autant cruciaux pour Kadhafi que pour nous.
Rassemblés par Abdoul Karim Maïga
(avec le Journal du Mali) 25/02/2011