Meeting du Haut Conseil Islamique au Stade du 26 Mars / Descente des Oulémas dans l’arène politique

De mémoire de Bamakois, jamais le stade du 26 mars n’a été aussi plein. Et, cela pouvait se comprendre aisément.  A la faveur du meeting organisé par le Haut conseil Islamique du Mali sur le code des personnes et de la famille et sur les élections de 2012, tout ce que le Mali compte d’oulémas avait répondu à l’appel du Haut Conseil islamique, à commencer par le Cherif de Nioro, qui selon les différents témoignages, met pour la première fois ses pieds dans un stade de football. Il n’étai pas seul. Bon nombre de responsables de partis politiques invités avaient aussi fait le déplacement.

Parmi eux, on a pu voir : Ibrahim Boubacar Keita du RPM, Tiébilé Dramé du Parena, Me Mountaga Tall du CNID, Ndiaye Bah du PDES, Ben Fana Ousmane du PCR, Iba Ndiaye de l’Adema, Modibo Sangaré de l’UNPR, etc. Alors que Mahamoud Dicko, Président du Haut conseil islamique du Mali, était parti à la rencontre du Cherif de Nioro, entre Kati et Kolokani, El Hadji Mody Sylla, premier vice Président et le Cherif Ousmane Madani Haïdara, deuxième vice Président, ont souhaité la bienvenue aux nombreux musulmans qui ont fait le déplacement dès les premières heures de la matinée pour prendre d’assaut les gradins du stade.

Quant à Cheick Mohamed Traoré, il a exposé les points qui avaient amené  les musulmans du Mali à s’opposer au Code des personnes et de la famille. Mais, auparavant, il a tenu à préciser que les musulmans du Mali ne se sont jamais opposés à la modification du code. Selon lui, les musulmans maliens ont simplement exigé que ce code prenne en compte la spécificité du pays qui est à plus de 90% musulman et à respecter au maximum la tradition et la culture du pays. Il a rapidement exposé les 10 points d’achoppement qui, selon lui, ont tous été pris en compte dans le code adopté après relecture.

« Tous ces points étaient de nature à embraser le pays. Et, c’est pour cela qu’on avait rejeté le code », a-t-il déclaré. Avant d’inviter le Président de la république à aller au bout de sa promesse par la promulgation du Code déjà voté par l’Assemblée nationale. « S’il est vrai que la démocratie est une réalité au Mali et si nous sommes indépendants, la position des musulmans doit compter au Mali, parce qu’ils constituent les 95% de la population », a-t-il conclut. Ensuite, Bourama Touré, pour le compte des familles fondatrices de Bamako, Bamoussa Touré, pour le compte des chefs de quartiers de Bamako, sont intervenus.

Si pour Bourama Touré, le code rejeté par la communauté  islamique du Mali était une imposition de l’extérieur, Bamoussa Touré pour sa part a salué toutes les autorités maliennes qui se sont investies pour l’élaboration d’un document consensuel. Au nom de l’IMAMA, Boubacar Camara est intervenu pour dire que les imams du Mali ont pardonné la faute que les députés avaient commises en votant  le code contesté. Pour les femmes musulmanes du Mali, Kadidia Togola est intervenue pour rappeler les avantages que les femmes ont désormais par la légalisation du mariage religieux.

Un Président au service de l’Islam en 2012

Pour le compte des jeunes musulmans, Moussa  Boubacar Bah, dans un discours très musclé, a fait vibrer le stade. Il a fait changer le débat de cap, en passant de 180° du code des personnes et de la famille, aux élections de 2012. « La population malienne est à majorité jeune et la majorité de cette jeunesse est musulmane. C’est grâce à la mobilisation de cette jeunesse qu’on a pu avoir les modification souhaitées dans le code », a-t-il déclaré. Avant d’indiquer qu’ils ne vont pas passer leur vie à faire des meetings, des marches et des protestations. « Nous allons faire les futurs députés et le futur Président de la République.

Nous allons voter pour ceux qui prennent en compte nos aspirations. Les jeunes musulmans invitent le Haut conseil islamique à donner le portrait robot du futur Président de la République et de tous ceux qui veulent assumer des charges électives au Mali », a-t-il déclaré. Avant d’avertir : « Pas de tricherie pendant les élections de 2012 pour asseoir quelqu’un à la tête du Mali. La France et l’Union européenne ne doivent pas s’immiscer dans les élections au Mali », a-t-il ajouté. Il a eu une adresse spéciale pour l’ORTM. « L’ORTM est une télévision qui appartient aux Maliens. Pour cela, il faut qu’il donne suffisamment de temps aux différents candidats pour exposer leur programme de société afin que la population vote en toute connaissance de cause », a-t-il soutenu. Mahamoud Dicko, en sa qualité de Président du Haut conseil islamique du Mali, lui a emboîté le pas. « Le Code est déjà voté.

On attend que le Président de la République le promulgue. Et, cela est déjà un acquis. Mais ce qui n’est pas aujourd’hui acquis, ce sont les  nombreux défis auxquels le Mali est confronté. Il faut que le pays change. Il faut que la sécurité s’assume et soit partout au Mali », a-t-il dit.  Il a dénoncé le système de distribution de la justice au Mali. « La justice doit changer. Il faut la droiture dans ce pays », a-t-il conseillé, sous forme d’exigence sérieuse. A son avis, les Maliens ne peuvent plus accepter que des juges, au gré de leurs humeurs, décident de distribuer la justice aux plus offrants.

Il a aussi dénoncé  le dysfonctionnement du système éducatif et exigé que toutes les dispositions soient prises pour la formation des jeunes maliens. « Notre pays n’est pas à vendre et personne ne peut l’acheter. Nous allons voir tous les programmes des différents candidats et nous allons voter pour celui qui prend en compte nos aspirations profondes dans un Mali où les musulmans comptent », a-t-il déclaré. Il a estimé que désormais le Peuple malien est debout et se battra pour que la paix ne soit jamais perturbée dans ce pays.

« Nous sommes en attache avec nos frères musulmans du nord et nous espérons trouver une solution à cette crise récurrente afin que toutes les filles et fils du Mali se donnent la main pour bâtir le pays. Le Mali n’est pas menacé par l’islamisme, mais par la corruption et la mauvaise gouvernance », a-t-il fulminé. Il a conclu en soutenant,  qu’on le veuille ou non, que le Mali est un pays islamique.

Sur ce, le chérif de Nioro est venu au micro pour faire des prières pour le Mali. Ces prières et bénédictions ont mis fin à la cérémonie.

Assane Koné

 

Le Républicain 17/01/2012