Maroc : les binationaux, un réservoir pluriel

Après la Belgique, au premier tour, et l’Espagne, en huitièmes de finale, le Maroc va affronter la France, mercredi en demi-finale de la Coupe du monde 2022.

Une nouvelle occasion pour les nombreux binationaux des Lions de l’Atlas de croiser la route de l’un des pays d’accueil de leurs familles.

Si le Maroc réussit un parcours historique lors de ce Mondial 2022 en terre qatarienne, c’est bien sûr tout d’abord grâce aux exploits sportifs des Lions de l’Atlas. Mais ces succès prennent un relief d’autant plus fort que les hommes de Walid Regragui les ont en grande partie obtenus face à des pays intimement liés à l’histoire du leur, fort des liens tissés avec les terres d’accueil de la riche diaspora marocaine, ces « MRE » (Marocains résidant à l’extérieur), naturalisés ou non, des communiqués officiels. Et voilà que l’ancienne puissance coloniale se dresse sur la route d’une éventuelle finale, mercredi au stade Al-Bayt.

« Le Maroc a battu la Belgique, c’est symbolique pour les binationaux belgo-marocains. Le Maroc a battu l’Espagne, c’est symbolique pour les binationaux hispano-marocains. Et il va jouer la France, c’est symbolique pour les binationaux franco-marocains », rappelle l’un de ces derniers, Jamel Aït Ben Idir, ancien milieu de terrain du Havre et du Wydad Casablanca . « C’est une série d’affiches exceptionnelles, cela facilite le travail du sélectionneur », estime cet ex-international marocain. Polyglotte et diplomate, né en France mais fort de sept années de coaching au Maroc, Walid Regragui dispose en outre des qualités requises pour opérer la synthèse de ce réservoir pluriel.
La Belgique et les Pays-Bas, premiers contingents

Car si la Tunisie comptait sur les douze joueurs binationaux de sa liste des 26 dix Franco-Tunisiens, et si donc le match du premier tour du Mondial entre les Bleus et les Aigles de Carthage revêtait des allures de choc fratricide, il n’en sera pas exactement de même de cette demi-finale inédite entre la France et le Maroc. L’ancienne puissance coloniale reste certes la première terre d’accueil de la diaspora marocaine devant l’Espagne et la Belgique, mais les joueurs franco-marocains ne sont que deux dans l’effectif des Lions de l’Atlas. Et non des moindres : le défenseur central et capitaine Romain Saïss (Besiktas), passé par Wolverhampton et Angers, et l’ailier gauche Sofiane Boufal, actuel sociétaire de ce même SCO d’Angers.

Sur les quinze binationaux présents sous les couleurs marocaines au Qatar, trois viennent d’Espagne, deuxième terre d’installation des Marocains sur le Vieux Continent : le gardien numéro 2 Munir El Kajoui, natif de l’enclave espagnole de Melilla, le jeune milieu offensif excentré Ez Abde Elzazzouli, prêté par le Barça à Osasuna, et bien sûr le latéral droit du PSG Achraf Hakimi, issu de la prestigieuse Castilla du Real Madrid. Alors que l’Italie (Walid Cheddira) et l’Allemagne (Abdelhamid Sabiri) envoient tous deux un binational au Mondial, ce sont la Belgique (avec Selim Amallah, titulaire dans le trio du milieu de terrain, plus les remplaçants Bilal El Khanouss, Anass Zaroury et Ilias Chair) et les Pays-Bas d’Hakim Ziyech, Noussair Mazraoui, tous deux passés par l’Ajax Amsterdam, Sofyan Amrabat (formé au FC Utrecht) et Zakaria Aboukhlal (issu du PSV Eindhoven), qui fournissent le gros du contingent marocain.
Les binationaux, une priorité… nationale

Choisir sa nationalité sportive peut s’avérer déchirant pour les jeunes binationaux. Aussi la Fédération royale marocaine de football (FRMF) cherche-t-elle à approcher les intéressés le plus précocement possible. « Les joueurs sont approchés très tôt dans le but de les attirer du côté marocain. On ne force jamais les choses, c’est une discussion honnête avec le joueur et l’entourage », expliquait récemment au quotidien La Dernière Heure Noureddine Moukrim, entraîneur des U23 de l’Union Saint-Gilloise et ex-émissaire de la FRMF en Belgique.

D’importants moyens sont néanmoins déployés pour séduire le joueur et sa famille. « Tout est fait pour impressionner et mettre à l’aise d’emblée, reconnaissait Moukrim, lui-même ancien international marocain. Les installations sont dignes d’un dix étoiles (…). Il y a des piscines, des terrains multisports, des hôtels de luxe, ils ont mis les moyens et jouent là-dessus, c’est impressionnant. À côté de ça, il y a des programmes de formation très performants. »

Cette entreprise de séduction ne fonctionne pas à tous les coups. Sollicité par le Maroc, pays de sa mère, le jeune et prometteur attaquant Loïs Openda (22 ans) a préféré la Belgique, son pays natal. Et c’est depuis le banc de touche des Diables Rouges que l’avant-centre du RC Lens a assisté à la défaite (2-0) de son équipe contre celle qui le convoitait, le 27 novembre dernier au stade Al-Thumana.

Source: Afrique.tv5monde