Pour bien comprendre la décision d’IBK, la réaction de HAIDARA et la prise de position des musulmans, voici l’analyse des faits
Conférence de presse d’information ou d’intoxication ?
Beaucoup de rumeurs et de doutes planaient sur l’organisation de la fête de Maouloud 2015. Ces incertitudes ont été propagées à cause de l’attaque meurtrière des terroristes, le 20 novembre dernier, sur l’hôtel Radisson de Bamako. Afin de couper court à de telles rumeurs persistantes, le Groupement des Leaders Spirituels Musulmans du Mali a organisé, le 3 décembre 2015, une conférence de presse d’éclaircissements au domicile de Chérif Ousmane Madani Haidara à Banconi à Bamako. Le thème principal était « Maouloud, facteur de paix et de cohésion sociale ». A cette rencontre avec la presse, ont participé plusieurs leaders religieux du Groupement dont le Secrétaire général, Macki Bah ; l’Imam Mohamed Djafari Diabaté, Alfousseini Diakité, Hamza Maïga et tant d’autres.
En intervenant dans le même sens que ses confrères, un autre journaliste se leva et insista : « Motion président, motion…La fête du Maouloud étant prévu le 23 ou 24 décembre 2015, selon nos informations, le Pouvoir veut instaurer un autre Etat d’urgence à quelques jours seulement de cette célébration pour l’interdire compte tenu de ce qui prévaut dans le pays », a-t-il persisté.
Le conférencier, l’éloquent Prêcheur, Haidara, tenta de rassurer les journalistes en ces termes : « Non, non, non ! C’est des rigolades ça. C’est nous-mêmes qui sommes le gouvernement. Comment le gouvernement peut, à l’approche du Maouloud, tenter d’interdire cette fête ? Pour nous, ce ne sont que des rumeurs tenues autour du thé. Non, non, non, cela, ne nous inquiète pas du tout. Le but de la conférence de presse d’aujourd’hui est de faire comprendre aux gens le niveau de l’organisation et le thème principal du Maouloud que nous fêterons bientôt. Comme l’ont bien expliqué Macki Bah, Hamza Maiga et autres. Comprenez que les dirigeants n’ont pas intérêt que le Maouloud soit interdit…cette possibilité d’interdiction ne nous fait pas peur du tout… La célébration du Maouloud arrange aussi les dirigeants car on y prêche la paix et on fait des bénédictions pour que Dieu protège le Mali »
L’Etat d’urgence décrété à 48 heures de la célébration du Maouloud confirme les infos de la presse malienne
C’est le lundi 21 décembre qu’un conseil de ministre spécial convoqué par le président de la république s’est tenu en présence du premier ministre autour d’un seul sujet : La sécurité publique. Il y a été décidé un autre Etat d’urgence de 10 jours réduisant les libertés de rassemblement surtout pendant les deux fêtes du Maouloud (naissance et baptême du 23 au 24 et du 29 au 30 décembre 2015), celle du Noël et de fin d’année(du 24 au 25 et du 31 décembre au 1er janvier 2016). C’est maitre Mountaga Tall, ministre de l’enseignement supérieur, qui a été chargé d’expliquer cette mesure impopulaire et complexe : « L’état d’urgence restreint (réduit) les libertés. De nombreux pouvoirs sont transférés à l’autorité administrative.
Il s’agit des gouverneurs, des préfets… A titre d’exemple, pendant l’état d’urgence, les autorités administratives peuvent restreindre la circulation des personnes, des véhicules ou des biens à des endroits bien délimités et à des heures bien définies…Les cortèges, les défilés, les rassemblements, les manifestations sur la voie publique peuvent être interdits mais ne sont pas automatiquement interdits… Les réunions publiques et privées peuvent êtres interdites…Les salles de spectacles, les stades et même les lieux de cultes peuvent êtres fermés…», a-t-il explicité.
Une raison inavouée de l’instauration de l’état d’urgence
A défaut de pouvoir contacter HAIDARA, nous avons pu joindre un de ces très proches collaborateurs. Celui-ci, sans détour, nous a dit : « Nous avons bien compris, cet état d’urgence a été décrété pour saboter la célébration du Maouloud. Dites à tous ceux qui vous contacteront que la place, la date et l’heure de la fête restent toutes maintenues…nous sommes confiants pour réussir ce Maouloud 2015. »
Avant le coup d’état militaire du 22 mars 2012, des candidats à la présidentielle dont IBK et Soumaila Cissé avaient déposé leurs candidatures. Ces deux, alors considérés parmi les favoris, se sont vite lancés dans une course à la montre pour trouver beaucoup de votants. C’est en ce moment qu’IBK et ses proches collaborateurs qui n’ont pu obtenir de Chérif Ousmane Madani Haidara un engagement précis pour eux, ont considéré le patron de Ançar Dine comme un soutien de Soumaila Cissé. Certains se baseraient sur de bonnes relations d’amitié qui seraient entre une femme de Haidara et celle de Soumaila Cissé. Malgré cela, IBK continuait à fréquenter Haidara chez lui et quelquefois dans ses lieux de prêche. Car, mieux vaut garder le contact avec l’homme le plus populaire du Mali. Surtout que celui-ci n’a ouvertement porté son choix sur aucun candidat. A l’époque, lors de certains de nos passages chez Haidara, nous avons voulu en savoir plus. Il nous a répondu que d’autres personnes de différents milieux lui ont posé la même question. Il précisa n’avoir choisi aucun candidat. Dans le cas où il choisira, qu’il n’aura aucune crainte de le dire publiquement.
Après l’élection d’ IBK, un grand nombre de gens, même des leaders religieux et des apolitiques, ont désapprouvé sa façon de gérer le pays. Haidara lui-même a sévèrement critiqué le pouvoir IBK dans l’affaire de démolition des maisons de Souleymanebougou. Aussi, la totale désapprobation du cas de l’expulsion du GATIA de la localité d’Anéfis imposée par IBK sous pression de la France, IBK avait alors humilié le puissant Haidara en refusant de le recevoir pour parler de ce cas d’Anefis. La tension est alors montée de plusieurs crans entre le leader religieux et le chef politique. Entre eux le bras de fer se durcissait. C’est le « moussalaha », l’amadouement qui sous-tend leur relation depuis lors. Bien que ces prises de position de Haidara dérangent IBK, il lui a fait des aides, financière et sécuritaire, lors du Maouloud 2014 pour regagner les faveurs des musulmans maliens. Des gestes que Haidara a vivement salué sans arrêter de le critiquer s’il le faut. La grandissante popularité de Haidara qui refuse de se soumettre au régime IBK, préoccupe le pouvoir. Prétexter la précarité de la situation sécuritaire pour dissuader beaucoup de gens à suivre le prêcheur organisateur du Maouloud au stade, affaiblirait son influence. Ces nombreux croyants pourront célébrer cette fête dans plusieurs lieux de culte des quartiers. Selon nos infos, il fallait décréter l’état d’urgence dans les dernières heures du moment de la célébration. Il était prévu que la grande majorité des musulmans boudent la fête au stade. Malheureusement, cette réinstauration stratégique de l’état d’urgence a produit l’effet contraire dans le milieu musulman.
Le déroulement de l’évènement Maouloud
Ainsi de bouche à oreille, à travers des mosquées et certains médias de communication, les membres du GLSM ont mobilisé tous leurs canaux d’information pour réussir l’organisation de la fête. Ce qui fut fait. Car, en dépit de l’état d’urgence, le Maouloud 2015 a battu le record de participation des musulmans : près de 75.000 participants dans et autour du plus grand stade de Bamako d’une capacité de 50.000 places. La pelouse tout comme les alentours de ce stade de football ont été occupés. Les organisateurs ont installé des écrans géants pour satisfaire les participants.
Parmi les quelques intervenants, c’est Oumar Mariko du Parti Sadi qui a réchauffé le grand public musulman ainsi : « Karamoko, Chérif Ousmane Madani Haidara, j’adresse mes salutations à vous et à tout votre monde présent ici. Ce n’est pas la première fois pour moi d’être invité par vous ici et d’avoir un temps de parole. Cette nuit, j’ai pour vous de la salutation et de la félicitation car il avait été dit que cette rencontre ne doit pas se tenir. Pourtant, elle s’est tenue », a dit Oumar Mariko qui a été fortement ovationné par le public dès après avoir prononcé cette dernière phrase faisant allusion à l’état d’urgence voté spécialement contre ladite rencontre. Mariko remonté continua : « Nous prions Dieu pour que cette rencontre se termine bien… Dans notre pays que Dieu nous préserve des faiseurs de chèques qui ne sont que des mauvais dirigeants refusant d’éviter le bien public. Ces genres de dirigeants sont des mauvais exemples. », a-t-il ainsi terminé sa parole sous de grands et longs cris approbateurs pour ses propos.
Quant au Prêche, l’évènement principal de la célébration du Maouloud, animé par le grand patron de Ançar Dine international, Chérif Ousmane Madani Haidara, on peut le résumer en 5 principaux points :
1 – L’honnêteté des dirigeants dans la gestion des biens publics « quand une personne bouffe la part de 100 personnes, ce pays ne peut pas avancer… », dit-il.
2 – La solidarité entre musulmans « …Dès que j’ai fait appel au Président des ançars, il a pu vite amasser auprès des autres membres de notre organisation plus d’un milliard de francs pour la construction d’un grand hôpital ici que l’ancien président Amadou Toumani a inauguré », précisa, Haidara, le prêcheur international
3 – La grande croyance religieuse « L’année dernière, un véhicule rempli de musulmans se dirigeait vers un « Ziara » lieu de culte, quant il fut explosé par une bombe des ennemis. Une femme musulmane dont une jambe a été coupée s’est mise à prier les ambulanciers, au nom d’Allah, de ne pas l’amener à hôpital mais plutôt à son lieu de culte où elle préfère mourir », a relaté, Haidara.
4 – L’Islam une religion de non-violence porteuse de pitié « Une autre musulmane pratiquante, pour avoir attaché un chat et le laissé mourir de faim et de soif, Dieu l’a voué à l’enfer. Donc tous ceux qui tuent un être humain au nom de la religion, ne sont pas des musulmans », a-t-il affirmé.
5 – Le Stoïcisme musulman dans la pratique de l’islam « Je veux que les dirigeants comprennent que « Bagabagali » la menace, peut empêcher certes, les cérémonies de mariage ou d’autres fêtes mais jamais la célébration de la religion. Le Maouloud est notre religion à nous. Pour l’empêcher, quand on tue 100 parmi nous, 1000 autres personnes la feront. Si on met du feu entre nous et notre Maouloud, je jure au nom de Dieu, nous pourrons être brulés mais nous célébrerons notre maouloud. Donc, aucune menace, aucune intimidation ne nous fera peur… », a martelé avec vigueur et rigueur, le prêcheur Chérif O. M. Haidara
Conférence de presse d’avertissement de Haidara envers IBK
C’est l’homme le plus populaire du Mali, Chérif Ousmane Madani Haidara, requinqué par la réussite totale de la fête du Maouloud, qui a rencontré dans son domicile, le samedi 02 janvier 2016, la presse. Cette fête musulmane que le très bon pilote IBK, plébiscité mais perturbé par sa famille d’abord et ses amis à bord, a tenté de saboter par la proclamation d’un état d’urgence inopportun. Une tentative qui, au lieu d’intimider les musulmans, les a, par contre, galvanisé à sortir plus nombreux pour fêter le Maouloud. La présidence et le gouvernement du Mali n’ont pas compris que la religion est l’opium du peuple. Sans tournures, Haidara a tenu des propos tranchants dont : «les campagnes politiques du Président IBK ont débuté dans mon salon ici jusqu’aux lieux de prêche, et avant qu’il ne soit Président, on le voyait débarquer dans nos lieux de rencontre sans invitation.
Maintenant qu’il est à Koulouba, même s’il nous fausse compagnie, nous sommes toujours ici» et il avertit « Ces gens connaissent mal notre capacité à installer à la Présidence un de nos Imams si nous le voulons . Dès qu’un Président soupçonne que son déclin approche, il lui vient à l’idée de s’opposer au Maouloud… il est temps que les choses changent car ce pays ne peut continuer dans cette mauvaise direction…d’autres responsables justes et compétents, différents des actuels, géreront bientôt ce pays, et on saura reconnaître le mérite, car on ne peut continuer à vivre de cette façon »
La morale de cette fête du Maouloud 2015
De l’indépendance du Mali en 1960 jusqu’à l’année 2015, aucun pouvoir politique ne s’est opposé directement ou indirectement à la célébration du Maouloud par la grande communauté musulmane. C’est seulement en 2015 que le régime IBK, après avoir aggravé la situation sécuritaire et identitaire du pays, tenta d’empêcher la fête du Maouloud. Pour ce faire, IBK propose implicitement la suspension de la fête du Maouloud en décrétant subitement un état d’urgence. Chérif Ousmane Madani Haidara qui dispose d’une grande capacité organisationnelle a incité les musulmans à fêter.
Les croyants se sont imposés par la solidité de leur foi religieuse en sortant plus nombreux pour fêter l’Anniversaire de naissance du prophète. Car, si cet Etat d’urgence sans prudence avait provoqué l’annulation ou la dispersion du Maouloud, le populaire Haidara aurait perdu toute sa notoriété. Surtout, toute la fidélité des musulmans à Dieu et à son dernier Messager, serait affaiblie.
IBK ayant perdu dans ce bras de fer, a appelé et rencontré ce prêcheur harangueur pour s’expliquer, s’excuser afin d’atténuer sa défaite.
Lacine Diawara