Mali : LE PERIL TERRORISTE

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LES CONCESSIONS FAITES PAR LES PARTIES DANS L’ACCORD
DE PAIX ONT PU ETRE INTERPRETEES COMME UNE TRAHISON

L’accord de paix est en fait un compromis politique bâti sur des concessions importantes qui ont pu apparaître aux extrémistes de tous les bords comme autant d’actes de trahison, provoquant du coup quelques résistances à sa signature. En témoignent les différents reports de date et toute la panoplie du dilatoire savamment déployée, sans compter les réserves formulées par certains partis politiques et organisations de la société civile. Dans le long travail d’explication et de communication qui a suivi la signature, le gouvernement semble avoir mieux réussi que la CMA dont les irréductibles ont fini par donner du grain à moudre à des islamistes, à moins que ce ne soit le contraire. Ces deux entités sont depuis longtemps complices et les cloisons qui les séparent n’ont jamais été étanches, ce qui leur permet d’utiliser constamment la technique du caméléon comme une arme de survie. Devant l’escalade actuelle de la violence, on est en droit de se demander pourquoi le dialogue inclusif inter-malien n’a pas pris en compte la nébuleuse islamiste, tout au moins dans sa composante malienne. Pendant que le gouvernement et les groupes armés négociaient sous l’égide de la communauté internationale, n’aurait-on pas dû engager le dialogue interne avec Iyad Ag Ghali et ses lieutenants, surtout que leur préoccupation affichée n’est pas la partition du pays mais le concept de la laïcité qu’ils interprètent comme un déni de la foi, une entrave à la bonne pratique de l’Islam, responsable à leurs yeux des difficultés du pays ? Le contexte social marqué par la dépravation des mœurs à tous les niveaux, le chômage des jeunes et le pillage des ressources publiques en toute impunité a fragilisé une couche importante de la population qui, faute de mieux est devenue vulnérable à la tentation islamiste. Déjà, avec le rejet puis le retrait pur et simple du projet de code de la famille, on a pu mesurer la capacité de mobilisation et de résistance de cette frange de la population. Dans ces conditions, la paix et la réconciliation peuvent-elles être effectives sans les islamistes ? Les faits ont tendance à prouver le contraire car, si les séparatistes sont reconnus minoritaires et même ultra-minoritaires, ce n’est pas le cas des islamistes dont personne ne peut préjuger du nombre et de la représentativité dans le pays.

LE GATIA, UNE BENEDICTION POUR LE MALI,
UN OS DANS LA GORGE DES SEPARATISTES

Au début de la crise, les séparatistes et islamistes étaient tous embarqués dans le même train avant de se séparer à la suite de certaines altercations. Cette séparation affectera le cours du processus de paix et la résolution de la crise. En effet, le wagon séparatiste a été estampillé fréquentable et conduit avec tous les égards à Ouagadougou, puis à Alger dans le cadre de la médiation internationale. Celui des islamistes qui avait malencontreusement pris la direction de Mopti, verra sa marche sèchement stoppée à Konna. Bombardés et dispersés sans ménagement dans le vaste Sahara, ses occupants toujours actifs sont désormais logés partout et nulle part. Le hic, c’est que la communauté internationale qui mène le bal les juge plus dangereux que les séparatistes alors que les populations pensent tout le contraire. Cette différence de perception s’explique par des enjeux purement politiques et économiques : un Mali fragilisé par des velléités séparatistes serait moins une menace pour les intérêts occidentaux qu’un Mali acquis à des islamistes. Toutefois, Aqmi et le Mujao, n’occupant plus le devant de la scène, les acteurs actuels sont plutôt d’obédience locale ; ce dont il faut tenir compte comme il convient de faire preuve de discernement face aux derniers accrochages entre les éléments de la Plateforme et ceux de la Coordination. La MINUSMA qui cache mal l’ombre de la France voudrait en faire un prétexte pour créer une zone de sécurité autour de Kidal, comme s’il s’agissait de la seule localité du nord menacée par les attaques. Depuis longtemps se lit clairement la volonté de faire de cette ville un sanctuaire et d’en écarter les forces armées maliennes. A quelle fin ? Le GATIA apparaît aujourd’hui comme une véritable bénédiction pour le Mali et un os dans la gorge des tenants de la création de l’enclave de Kidal.

C’est la seule force patriotique à même de contrarier ce qui se trame dans le nord à l’insu du gouvernement et des populations. Hier, en visitant Ménaka, il a mis au grand jour des caches d’armes suspectes. Pour l’heure, on voit que son action pourrait compromettre le futur statut promis à Kidal. Les attentats commis un peu partout dans le sud pourraient bien être des manœuvres de diversion. Les Maliens doivent ouvrir l’œil et le bon.

La saine appréciation des réalités commande aujourd’hui qu’on prenne langue par les canaux appropriés avec Iyad, Koufa et tous les autres pour faire l’économie d’une violence aveugle car, quelle que soit leur conviction, ils n’en restent pas moins des Maliens et des alliés déclarés dans la lutte contre la partition du pays.

Mahamadou Camara
Email : mcc1mcc@yahoo.fr / camara_mc2006@yahoo.fr

Source: Diasporaction.com 26/08/2015