Mali, Burkina, Niger… D’où viennent les armes qui prolifèrent au Sahel ?

L’Office des Nations unies contre la drogue et le crime (UNODC) vient de publier un rapport qui tente de tracer la provenance des armements utilisés dans les drames qui endeuillent les pays sahéliens.

Il y a quelques jours, les Nations unies démontaient le cliché qui consiste à penser que le radicalisme religieux est le ressort principal des actes dits « terroristes » dans les pays du Sahel, attentats ayant coûté la vie à pas moins de 9 300 personnes en 2022. L’ONU démontrait la variété des violences –banditisme ou tensions intercommunautaires diverses autant que rébellions ou jihad– et la multiplicité de motivations personnelles d’enrôlement, allant du suivisme familial à la quête d’emplois.

En provenance du continent

Après le « pourquoi », l’Office des Nations unies contre la drogue et le crime (UNODC) tente désormais d’appréhender le « comment », évoquant, dans un rapport publié ce 14 février, la circulation des armes à feu et munitions entre la Mauritanie, le Mali, le Burkina Faso, le Niger et le Tchad. Un sujet essentiel, à la fois de nature à suggérer des stratégies « d’assèchement » et à inspirer les fake news les plus folles. Alors qu’une certaine idéologie diffuse la rumeur selon laquelle les salafistes seraient secrètement armés par des chancelleries occidentales en manque de sensations coloniales, le document de l’UNODC révèle que les arsenaux utilisés viennent surtout du continent africain.
Indépendamment des fusils artisanaux « made in Africa » qu’acquièrent principalement des groupes de chasseurs traditionnels ou des milices communautaires, les productions industrielles qui circulent sont généralement « déviées » d’affectations africaines, même si elles ont été fabriquées ailleurs. Celles-ci proviennent de lots hérités d’anciens conflits comme les rébellions touarègues des années 90, de stocks volés aux forces nationales sur le champ de bataille, ou encore achetés à des militaires corrompus.

Financements

Une filière d’approvisionnement de plus en plus fréquente est celle des civils enrôlés comme supplétifs, comme les Volontaires pour la défense de la patrie du Burkina, des combattants amateurs plus corruptibles ou simplement moins compétents pour sécuriser les armes fournies. La toute première aptitude de l’homme à qui l’on fournit un fusil doit pourtant être sa capacité à empêcher que celui-ci ne tombe entre de mauvaises mains…

Quelle que soit l’origine de tel ou tel outil de mort, les trafics se complaisent dans des zones où l’État est absent, après avoir été défaillant, des marchés pouvant s’ouvrir aux yeux de tous, notamment près des frontières ou le long des grands axes de transport. Pullulent notamment des points de vente de fusils d’assaut de type AK –particulièrement durables– provenant de Libye.

Au regard des importants volumes en circulation et de la modicité des saisies, la traque des armes semble bien impuissante. Il faudrait enfin cerner l’amont du « comment », la question des financements qui rendent possibles l’achat de kalashnikov qui ne sont pas volées, et celle de la combinaison entre le trafic des armes et celui des produits psychotropes.

Source: Jeune Afrique