Alors que l’isolationnisme de la Transition malienne se confirme de plus en plus, faut-il craindre qu’elle adopte une telle posture jusqu’au bout ? En effet, largement critiqué par les Maliens mais aussi par les autres africains qui partagent le même espace que le Mali, le mutisme militaire de la MINUSMA a de quoi susciter indignation et incompréhension. Le vote du Conseil de Sécurité des Nations-Unies qui se fera aujourd’hui intervient dans un contexte inédit marqué par le changement de curseur du Mali au profit de la Russie, ennemi quasi juré de l’Occident. Un contexte qui rappelle celui de la guerre froide où tout moyen était bon pour ennuyer l’autre bloc. Ainsi, le dossier malien serait devenu un moyen de plus, cette fois pour la Russie, qui pourrait bien brandir son droit de véto et ainsi empêcher le non renouvellement de la mission onusienne. Scénario bien possible, mais assez complexe, puisque les autres membres du Conseil ont leur mot à dire.
Une étincelle dans une partie du monde, et voilà que ce dernier s’embrase. La guerre russo-ukrainienne a des effets négatifs sur tout le globe. Il s’agit de conséquences économiques et financières, mais aussi et surtout, sur le plan diplomatique et géopolitique. Aussitôt, le monde se fissura, les pro russes d’un côté, les occidentaux de l’autre, et d’autres super puissances qui semble opter pour Poutine sans toutefois le valider entièrement. La position du Mali d’Assimi Goita, exporta cet état de fait en Afrique. Le pays est de plus en plus dans l’escarcelle russe et s’isole également comptant pleinement et entièrement sur cet « allié fiable ». L’Occident n’est plus en odeur de sainteté au Mali et les regards sont plutôt tournés vers l’est.
Cependant, la Transition malienne aurait-elle demandé à la Russie d’opposer son véto au vote d’aujourd’hui ? Est-ce que la Russie a-t-elle réellement besoin du feu vert des autorités maliennes actuelles pour cela ? Autre question d’égale importance, le gouvernement veut-il le départ de la MINUSMA ?
Cette dernière question est pertinente puisqu’au-delà de l’aspect militaire, la mission onusienne au Mali intervient dans plusieurs autres domaines dans les zones en proie à l’insécurité. Son utilité, dans les domaines humanitaires notamment, a maintes fois été reconnue. D’ailleurs, un sondage publié récemment a prouvé que les populations des zones affaiblies par l’insécurité et la précarité sont largement d’avis que la MINUSMA est utile et qu’il faut qu’elle reste.
Ce qu’il faut craindre c’est de créer un vide humanitaire après celui sécuritaire créé avec le départ de Barkhane et l’EUTM. Le Mali perdra ainsi de précieux alliés « occidentaux » au profit de son nouvel allié de l’est. Mais le prix en vaut-il la peine ?
Ahmed M. Thiam
Source: Alternance