Le Conseil de sécurité de l’ONU a levé mercredi les sanctions contre l’Erythrée, après un accord de paix historique avec l’Ethiopie et un réchauffement de ses relations avec Djibouti qui laissent augurer de changements positifs dans la Corne de l’Afrique.
Le Conseil a adopté à l’unanimité cette résolution élaborée par la Grande-Bretagne qui lève l’embargo sur les armes, toutes les interdictions de voyage, les gels d’avoirs et les autres sanctions visant l’Erythrée.
Asmara a aussitôt salué cette décision, tout comme Addis Abeba.
Le chargé d’affaires érythréen à l’ONU, Amanuel Giorgio, s’est réjoui de « la fin d’une période difficile pour l’Erythrée et la région ».
« Les actions et l’inaction du Conseil ont eu des conséquences nocives pour le peuple d’Erythrée et la Corne de l’Afrique », mais « les Erythréens ne regarderont pas en arrière et ne seront pas rancuniers. Tout en ayant les leçons historiques des deux dernières décennies à l’esprit, ils sont déterminés à créer une nation prospère et pacifique », a-t-il dit au Conseil de sécurité après l’adoption de la résolution.
Le Premier ministre éthiopien Abiy Ahmed a de son côté affirmé dans un communiqué que la levée des sanctions allait « avoir un impact considérable sur l’amélioration de la stabilité de la Corne de l’Afrique » et sur la normalisation des relations.
Le pays est depuis 2009 sous le coup de sanctions du Conseil de sécurité pour son soutien présumé aux jihadistes en Somalie, une accusation que le gouvernement érythréen a toujours niée.
La résolution reconnaît que les observateurs de l’ONU « n’ont pas trouvé de preuves formelles que l’Erythrée soutienne les shebab » somaliens.
– Efforts avec Djibouti –
Asmara a signé en juillet avec l’Ethiopie un accord de paix qui a mis fin à deux décennies d’hostilités et conduit à un apaisement de ses relations avec Djibouti.
La résolution appelle d’ailleurs aussi l’Erythrée et Djibouti à poursuivre les efforts en vue de régler leurs différends.
Les relations entre Djibouti et l’Erythrée s’étaient tendues après une incursion en avril 2008 de troupes érythréennes vers Ras Doumeira, un promontoire stratégique surplombant l’entrée de la mer Rouge au nord de Djibouti-ville. Les deux pays s’étaient opposés à deux reprises en 1996 et 1999 pour cette zone.
Le texte demande en outre à Asmara de fournir des informations sur le sort de soldats djiboutiens disparus après les heurts d’il y a dix ans.
A la demande de Paris, un rapport sera présenté tous les six mois au Conseil de sécurité sur les efforts consentis par l’Erythrée pour se rapprocher de Djibouti, où la France, les Etats-Unis et la Chine disposent de bases militaires.
L’ambassadeur éthiopien à l’ONU Taye Atske Selassie a estimé auprès de journalistes que « les développements en cours (allaient avoir) un impact en termes de progrès économiques, de prospérité et de droits de l’homme ».
Le ministre des Affaires étrangères de l’Erythrée, Osman Mohammed Saleh, avait demandé en septembre, à la tribune de l’Assemblée générale annuelle de l’ONU, la levée de sanctions « injustifiées » qui « ont provoqué des dommages considérables à l’économie du pays et à sa population ».
Ancienne province de l’Ethiopie, l’Erythrée a déclaré son indépendance en 1993 après avoir chassé les troupes éthiopiennes de son territoire deux ans plus tôt.
Les deux pays se sont livré entre 1998 et 2000 une guerre qui a fait quelque 80.000 morts, notamment en raison d’un conflit frontalier.
Les relations sont ensuite restées particulièrement tendues, l’Ethiopie refusant de céder un territoire disputé malgré un jugement favorable à l’Erythrée en 2002 d’une commission indépendante internationale soutenue par l’ONU.
(©AFP / (14 novembre 2018 18h38)