J’étais à l’église de la cathédrale de Bamako pour les obsèques de la sœur d’un ami. J’étais plutôt aux funérailles d’une sœur pour faire plus simple. La salle était bondée et les responsables devant conduire la cérémonie étaient tous religieusement calés à leurs places préétablies. L’atmosphère apaisée nous emportant dans des réflexions qui nous dépassaient certainement.
Et avec surtout la présence du cercueil, on comprenait que l’on était rien ! Que de la poussière appelée à disparaître sous les pieds des vivants ! D’ailleurs la tombe de Monseigneur Luc Sangaré (décédé le 11 février 1998) sous le vestibule à l’entrée de l’église, où il fût enterré, symbolise largement et devant l’éternité la modestie et la soumission sous les pieds des fidèles.
Participant à part entière à cette célébration bien émotive, je me surprends en train de répondre, entre les harmonieux chants liturgiques de la chorale, aux «Allahou Akbar» d’un muezzin qui ont surgis soudainement, amplifiés par des haut-parleurs très performants. Alors, l’adhan me capta l’attention jusqu’à la fin, avec les chants liturgiques en fond sonore. Et après avoir fermé l’appel du muezzin avec un «aš-šahãda» bien intériorisé, je me retrouvai replongé dans l’ambiance de l’église où on devait se lever une énième fois pour une prière encore.
C’est en ce moment que je me dis : waouh ! C’est aussi cela mon pays ? Un islam omniprésent, s’invitant dans les églises sans prévenir et sans perturber. Et des églises au cœur de l’islam tenant sans se plaindre. Le tout, soutenant un peuple qui s’évade dans ses croyances sans peut-être se poser de véritables questions.
Reconnaissons que l’Occident a fabriqué son Jean Diarra et sa Jeanne Dakouo. Et que l’Arabie a assimilé son Moussa Haïdara et sa Khadidiatou Traoré. Ainsi, la Niéba Coulibaly et le N’Golo Dembélé se cachent indubitablement derrière leurs noms de baptême. Et dans l’option, nous, nous nous situons où réellement ? Quels sont les arguments pour nos particularités ?
Je ne pense nullement remettre en cause nos croyances qui sont désormais ancrées en nous. Enfouies au plus profond de nos âmes, devenant nature, de véritables ADN choisis. Cela est acté et déjà achevé. Cependant, un travail de retrouvaille doit se faire. Elle doit se faire sur le renforcement des passerelles qui nous entremêlent sur le plan purement coutumier. Et ce référencement social pourrait nous lier encore plus permettant à cette tolérance actuelle de se renforcer encore plus.
Ainsi, l’identité culturelle de la «malianité» pourrait se faire assez robuste afin de pouvoir supporter assez longtemps et, sûrement, nos diversités spirituelles, sachant que celles-ci n’agiront juste que pour que nous puissions psychologiquement tenir en ce bas monde, souvent difficile à confronter sans croyance. Aujourd’hui à la cathédrale de Bamako, j’ai découvert que le Mali a une autre richesse. Même si elle est très fragile, elle pourrait être une grande force pour la cohésion nationale et pourrait être un angle sérieux pour bâtir une véritable nation «Arc-en-ciel». Seulement tout dépend de certaines volontés patriotiques et d’un travail important de conception.
Tout en étant de rigoureux croyants, évitons de nous noyer dans les coutumes des autres. Sachons extirper les coutumes des autres dans ces choses sensées être universelles. Savoir s’insérer intellectuellement dans ce que l’on aime permet de gommer tout complexe envers qui que ce soit. Dieu seul sait ! Et il sait mieux que nous. Pourtant, il nous a doté d’un cerveau qui nous permet de dompter l’éléphant et de nager avec les dauphins dans leur habitacle naturel, tout en concurrençant les oiseaux en l’air.
Moussa Sey Diallo